Soutien à Israël, mais... Biden face au défi d'une dangereuse escalade au Moyen-Orient

ATS

15.4.2024 - 06:39

Soutien «inébranlable» à Israël mais tout faire pour éviter une guerre avec l'Iran. C'est le dilemme posé à présent à Joe Biden face au Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu.

Le président Biden est sous pression en pleine campagne présidentielle aux Etats-Unis, pris à partie à sa gauche face au désastre humanitaire à Gaza comme à sa droite, pour sa «faiblesse» supposée.
Le président Biden est sous pression en pleine campagne présidentielle aux Etats-Unis, pris à partie à sa gauche face au désastre humanitaire à Gaza comme à sa droite, pour sa «faiblesse» supposée.
KEYSTONE

En se portant à la défense d'Israël face à l'attaque sans précédent samedi de l'Iran, le président américain a joint le geste à la parole. Les forces américaines dans la région ont ainsi contribué à détruire des «dizaines» de drones et missiles.

C'est la première fois qu'un président américain est amené à défendre Israël directement, faisait-on valoir à Washington. Mais les Etats-Unis craignent une riposte israélienne contre l'Iran avec le risque de provoquer une dangereuse spirale au Moyen-Orient, sur fond de guerre dans la bande de Gaza, le scénario catastrophe tant redouté depuis des mois.

Que fera le Premier ministre israélien? Washington, en tout cas, veut calmer le jeu. «Le président a été clair: nous ne voulons pas d'escalade. Nous ne voulons pas d'une guerre étendue avec l'Iran», a déclaré dimanche sur les télévisions américaines le porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche, John Kirby.

«Pas d'escalade importante avec l'Iran»

Les Etats-Unis n'entendent pas non plus participer à d'éventuelles représailles israéliennes, assure un haut responsable américain s'exprimant aux journalistes sous couvert de l'anonymat. Et, selon lui, Israël «ne cherche pas une escalade importante avec l'Iran» alors même que cette attaque était destinée à «détruire et tuer».

L'Iran s'est de son côté félicité de ce qu'il estime être une riposte justifiée à la frappe, imputée à Israël, ayant détruit son consulat à Damas le 1er avril. Le président démocrate de 81 ans, en campagne difficile pour sa réélection face à Donald Trump en novembre, a porté son message directement lors d'un entretien téléphonique samedi soir.

«Peser soigneusement les risques»

Le président Biden a «clairement dit au Premier ministre (israélien) que nous devons peser soigneusement et de façon stratégique les risques d'une escalade» afin d'éviter une guerre régionale plus large, selon le haut responsable américain.

Le calcul de Washington semble être que Téhéran a obtenu ce qu'il voulait avec une démonstration de force en représailles à la frappe attribuée à Israël, qui a tué de hauts gradés iraniens. Et, pour les Américains, Israël a prouvé de façon spectaculaire sa puissance défensive, avec 99% des projectiles iraniens interceptés.

Depuis l'attaque sans précédent du Hamas le 7 octobre puis l'offensive israélienne qui ravage la bande de Gaza, Joe Biden s'efforce d'éviter une guerre régionale, redoutant de se voir entraîner directement dans un conflit au Moyen-Orient.

Le président américain, qui s'est réuni virtuellement dimanche avec ses homologues du G7 et s'est entretenu avec le roi Abdallah II de Jordanie, se retrouve dans une position délicate: de plus en plus critique de Benjamin Netanyahu, avec qui il entretient de difficiles relations, pour sa conduite de la guerre depuis six mois dans la bande de Gaza, mais doit pour autant lui assurer son soutien total.

Il est allé jusqu'à suggérer que les Etats-Unis pourraient modifier leur politique d'aide militaire à Israël, eux qui sont leur principal fournisseur en armes.

«Très cynique»

«Cela le met dans une situation très difficile», confirme Colin Clarke, directeur de recherche au Soufan Group. «Il se méfie des motivations de Netanyahu, qui tente d'étendre la guerre à toute la région pour détourner l'attention de la guerre qui se déroule mal pour lui à Gaza», ajoute-t-il.

Selon le chercheur, le Premier ministre israélien s'efforce aussi de «masquer les différends très réels qui existent avec l'administration Biden» au sujet du territoire palestinien, assiégé par Israël et menacé d'une famine à grande échelle.

Un autre expert, James Ryan, s'attend lui «à ce que Biden tente de restreindre Israël, mais Netanyahu a déjà montré qu'il était prêt à tester toutes les limites que Biden souhaitait imposer». «Tout cela est, malheureusement, très cynique», relève le directeur exécutif du Middle East Research and Information Project.

Le président Biden est sous pression en pleine campagne présidentielle aux Etats-Unis, pris à partie à sa gauche face au désastre humanitaire à Gaza comme à sa droite, pour sa «faiblesse» supposée, comme l'affirme son rival républicain Donald Trump.

«Si Joe Biden incite les Israéliens à ne pas du tout riposter alors il est une honte pour les Etats-Unis», s'est avancé dimanche sur CNN John Bolton, ancien conseiller de Donald Trump, appelant au contraire qu'Israël à «détruire le programme nucléaire iranien».

ATS