Avec le départ hypermédiatisé de Serena Williams et l'absence totale du «Big Three» en quarts de finale chez les hommes, l'US Open 2022 a vraisemblablement marqué l'avènement d'une nouvelle ère dans le tennis mondial.
En s'imposant dimanche en finale, Carlos Alcaraz a remporté à 19 ans son premier titre du Grand Chelem et a été sacré N.1 mondial. Il est le plus jeune à atteindre le sommet de la pyramide depuis la création du classement ATP en 1973.
Chez les femmes, Iga Swiatek a apporté à 21 ans un début de stabilité dans une hiérarchie extrêmement mouvante: la Polonaise a conforté sa place de N.1 en remportant son second Majeur de l'année (le troisième au total) après Roland-Garros. Aucune joueuse n'avait gagné deux tournois du Grand Chelem la même année depuis l'Allemande Angelique Kerber en 2016 (Open d'Australie et US Open).
«Elle se sent bien dans le rôle de N.1», relève Mats Wilander, lui-même ex numéro un mondial et actuel consultant pour Eurosport, en soulignant que la Polonaise avait tiré profit de son admiration pour Rafael Nadal en adoptant son «intensité de jeu».
Sur le circuit masculin, où la place du patron a été laissée vacante par Daniil Medvedev (26 ans) après son élimination en 8es, on pourra arguer que Novak Djokovic (35 ans) n'était pas là pour jouer le titre. Et, plus globalement, que son rang dans la hiérarchie a été faussé cette saison.
Le Serbe n'a en effet pu défendre son titre en Australie ni ses points de la finale de l'US Open pour avoir refusé de se faire vacciner contre le Covid, tandis que son sacre à Wimbledon (21e Majeur, à une longueur du record de Nadal) a compté pour du beurre au classement, puisqu'aucun point n'y a été distribué.
Alcaraz-Sinner, sur la durée
Il n'en reste pas moins qu'Alcaraz a brillamment confirmé toutes les attentes placées en lui depuis un an et qu'il s'est trouvé un adversaire de choix sur la durée en la personne de l'Italien Jannik Sinner (21 ans).
Sans oublier Casper Ruud (23 ans), réputé terrien mais qui s'est affirmé également sur dur cette année: le Norvégien a joué deux finales majeures (Roland-Garros et US Open) et serait devenu N.1 mondial s'il s'était imposé dimanche à Flushing Meadows. Septième mondial en arrivant à New York, il en repart N.2.
«Il n'a pas le charisme pour mettre le feu à un stade comme le font Alcaraz ou Frances Tiafoe, mais il fait honneur à notre sport», a relevé l'ex-N.1 John McEnroe sur Eurosport.
A l'opposé du très réservé scandinave, le spectaculaire américain Frances Tiafoe (demi-finaliste à 24 ans) a lui aussi peut-être pris rendez-vous pour les futures batailles de chefs, tout comme le volcanique australien Nick Kyrgios (27 ans, finaliste à Wimbledon et quart-de-finaliste à New York), qui a su dompter ses nerfs ces derniers mois pour se mêler à la crème de la crème. «Je pense que la relève de la garde a finalement lieu», a résumé McEnroe.
«Leur temps est venu»
Tout en regrettant l'absence de Djokovic, McEnroe s'est dit «excité» par les huit joueurs ayant atteint les quarts: Kyrgios, Khachanov, Berrettini, Ruud, Sinner, Alcaraz, Rublev et Tiafoe. «Leur temps est venu», a-t-il assuré.
«Djoko» n'a pas dit son dernier mot et sera sans aucun doute encore candidat aux principaux titres et à la place de N.1. Mais il perd inexorablement ses rivaux historiques Roger Federer (41 ans), qui n'a plus joué en tournoi depuis Wimbledon 2021, et Rafael Nadal, que les problèmes physiques et les projets familiaux semblent devoir de plus en plus éloigner de la compétition.
Et si l'on craignait le vide que laisseraient immanquablement les départs des trois plus grands joueurs de l'histoire, les bras de fer entre Sinner et Alcaraz, en 8es à Wimbledon et en quarts à l'US Open, laissent à eux seuls augurer d'autres duels à couper le souffle.
«Jannik et moi avons démontré (en quarts de finale à Flushing Meadows, NDLR) que nous sommes le présent du tennis et qu'une longue carrière s'ouvre devant nous», a souligné Alcaraz. Son entraîneur Juan Carlos Ferrero a été encore plus direct: «Sinner et Carlos pourraient dominer le circuit les dix prochaines années».
Lauréat 2009 à Flushing Meadows, l'Argentin Juan Martin Del Potro, qui fut un des rares joueurs à s'imposer durant le règne du Big 4 (Federer, Nadal, Djokovic, Murray), est également très enthousiaste à l'idée de cette «rivalité en train de grandir».
«Je pense que la partie que nous venons de voir (Alcaraz-Sinner en quarts) pourrait être le Federer-Nadal» de demain, a-t-il estimé sur ESPN.