Afghanistan La journée des femmes afghanes sous l'éteignoir taliban

ATS

8.3.2022 - 14:22

L'Afghanistan a célébré dans la discrétion mardi la journée internationale pour les droits des femmes, les militantes féministes vivant dans la crainte d'être arrêtées ou détenues par le nouveau régime taliban.

Des femmes afghanes assistent à un séminaire pour mettre en évidence les problèmes rencontrés par les femmes afghanes et pour mettre en évidence les droits des femmes à la lumière de l'islam, à l'occasion de la journée internationale de la femme à Kaboul, Afghanistan, le 08 mars 2022.
Des femmes afghanes assistent à un séminaire pour mettre en évidence les problèmes rencontrés par les femmes afghanes et pour mettre en évidence les droits des femmes à la lumière de l'islam, à l'occasion de la journée internationale de la femme à Kaboul, Afghanistan, le 08 mars 2022.
KEYSTONE

Depuis leur retour au pouvoir le 15 août dernier, les fondamentalistes islamistes ont balayé 20 ans de liberté conquise par les femmes. Celles-ci sont désormais exclues des emplois publics, interdites de voyager seules, ou encore obligées de s'habiller selon une interprétation stricte de la charia, la loi islamique.

«Les talibans nous ont pris le ciel et la terre», s'est désolée auprès de l'AFP une militante du groupe Unité et solidarité femmes, sous couvert d'anonymat.

Les nouveaux maîtres du pays avaient pourtant promis de se montrer plus souples que lors de leur premier régime (1996- 2001), quand les femmes étaient privées de presque tous leurs droits. Mais le redouté ministère de la Promotion de la vertu et de la Prévention du vice a vite remplacé celui des Affaires féminines.

Mouvement étouffé

«Si l'on se soucie des droits des femmes, où que ce soit dans le monde, il faut regarder l'Afghanistan avec beaucoup d'inquiétude», a déclaré à l'AFP Heather Barr, de l'organisation Human Rights Watch (HRW). «Il est choquant de voir à quelle vitesse les progrès des 20 dernières années ont été effacés, et comment la communauté internationale fait si peu pour défendre les femmes afghanes», a-t-elle regretté.

Dans les premiers mois du nouveau régime, des Afghanes ont voulu s'opposer aux restrictions imposées par les talibans. Elles ont organisé des petites manifestations, principalement à Kaboul, pour le droit à l'éducation et au travail.

Un mouvement brutalement étouffé: en début d'année, des organisatrices de rassemblements ont été arrêtées et détenues au secret, certaines pendant plusieurs semaines. A chaque fois, les autorités ont nié toute implication dans les disparitions. Depuis leur libération, ces militantes vivent cachées, dans la peur.

Journée du 8 mars reconnue

Mardi, le ministère des Affaires étrangères a au moins reconnu la journée du 8 Mars, en souhaitant qu'elle soit «un jour favorable pour toutes les femmes». Le gouvernement leur permettra «d'avoir une vie honorable et bénéfique, à la lumière de la noble religion de l'islam et de nos traditions», a-t-il assuré dans un communiqué.

Aucun évènement public n'était programmé pour marquer la journée, à part une exposition dans les locaux de l'ONU à Kaboul de produits fabriqués par des entreprises locales appartenant à des femmes. Un groupe de femmes a été interdit d'effectuer collectivement un lâcher de ballons, et chacune devait le faire individuellement chez elle.

Des membres du Mouvement des femmes puissantes d'Afghanistan prévoyaient de donner leur sang dans un hôpital de la capitale, mais ont là aussi essuyé un refus. Le directeur de l'établissement «a déclaré que le don de sang par des femmes n'est pas autorisé, conformément à la charia», a expliqué à l'AFP l'une d'elles, Zakia Zahadat.

ATS