Alors que les Suisses viennent de rejeter l’extension des autoroutes, un autre sujet brûlant de mobilité se profile à l’horizon. En effet, avec l’augmentation du nombre de voitures électriques sur nos routes, il s’agira de trouver, dans un avenir proche, une alternative afin de compenser le manque à gagner de la taxe sur le carburant. blue News décrypte les solutions qui se trouvent actuellement sur la table.
Enjeux majeurs : comment taxer les voitures électriques ?
Avec l’augmentation du nombre de voitures électriques sur les routes, il s’agira de trouver, dans un avenir proche, une alternative afin de compenser le manque à gagner de la taxe sur le carburant. Décryptage.
12.11.2024
Depuis le début des années 2010, les voitures branchées (c’est-à-dire hybride/rechargeable et électrique) ne cessent de gagner du terrain en Suisse. Ainsi, en 2014, 0,1% du parc des voitures de tourisme était composé de véhicules hybrides/rechargeables et électriques.
Aujourd’hui, cette part se monte à près de 6,3%. Une tendance qui n’est pas prête de s’inverser comme le rapporte le TCS. «En examinant les véhicules branchés, on constate une croissance exponentielle du parc. Depuis 2012, le nombre de ces véhicules a été multiplié par 100, passant de moins de 2000 unités à près de 250 000. Ce rythme de croissance implique un doublement tous les deux ans ou une multiplication par dix tous les cinq ans», indique l’association suisse de défense de l’automobile sur son site internet.
Si cette tendance peut réjouir les défenseurs du climat, l’essor de l’électrification du parc automobile helvétique diminue, en revanche, les recettes du Fonds pour les routes nationales et le trafic d’agglomération (Forta). Ce dernier sert à financer les routes nationales et les grands projets en faveur du trafic d’agglomération. Pour mémoire, près de 70% de ce fonds est alimenté via des taxes sur les huiles minérales.
«Le problème avec le véhicule électrique est que les stations de recharge peuvent se trouver un peu partout dans le pays»
Marc-Antoine Fénart
Professeur HEIA-FR
Afin d’atténuer ce manque à gagner, le Conseil fédéral a décidé que, depuis le 1er janvier 2024, les véhicules électriques importés ou produits en Suisse devaient être taxés à hauteur de 4%, comme c’est déjà le cas pour les autres véhicules. Mais cette mesure ne suffira pas à pérenniser le financement du Forta avec l’augmentation du nombre de véhicules électriques dans notre pays. Le Conseil fédéral se doit donc de trouver de nouvelles sources pour subventionner ce fonds. En ce moment, deux solutions sont discutées : l’une propose de taxer les kilowattheures alors que la seconde alternative souhaite taxer les kilomètres parcourus.
L’application de ces deux méthodes comporte une multitude de défis. «Le problème avec le véhicule électrique est que les stations de recharge peuvent se trouver un peu partout dans le pays. Elles peuvent être à la maison, sur le lieu de travail ou dans des espaces publics. La question est donc de savoir comment vérifier et mettre en place les outils afin de contrôler cette taxation», expose Marc-Antoine Fénart, professeur à la HEIA-FR, au sujet de la solution des kilowattheures. Avant d’ajouter : «L’autre problème est que des personnes peuvent venir recharger leur véhicule en Suisse et aller rouler en France ou l’inverse.»
Professeur à la HES-SO Valais, Stéphane Genoud met le doigt sur un autre point sensible : «Pour les gens qui rechargent leur véhicule à la maison, l’électricité utilisée est directement inscrite dans le compteur électrique. L’information est donc là, mais elle est difficilement identifiable.» De ce fait, même si la taxation aux kilowattheures est celle qui s’approche le plus du système qu’on a aujourd’hui avec les stations essence, elle parait très complexe à appliquer.
Débats enflammés
La solution de la taxation aux kilomètres parcourus fait aussi naître plusieurs challenges. En effet, avec cette méthode, il faudrait placer des traceurs sur les véhicules ce qui obligeraient les autorités à créer un cadre juridique concernant l’exploitation de ces données. «Communiquer avec une voiture engendre immanquablement des soucis au niveau de la confidentialité des informations recueillies», indique Stéphane Genoud.
Malgré tout, la taxation aux kilomètres parcourus semble être la moins pire des deux solutions présentes sur la table. «Avec cette méthode, on est plus proche de payer en fonction de l’infrastructure routière qu’on utilise», souffle Marc-Antoine Fénart. «A mon avis, cette méthode me parait globalement plus facile à mettre en pratique», conclut l’expert.
L’Office fédérale des routes (OFROU) est actuellement en train de réfléchir à ces deux méthodes. Le Conseil fédéral devrait donc présenter bientôt un projet puisqu’il entend taxer l’électromobilité à partir de 2030, au plus tôt. Comme cela concerne une modification de la Constitution, le peuple sera appelé aux urnes. De quoi augurer de nombreux débats enflammés.
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Un projet inclut prochainement une taxation des voitures électriques. Le Conseiller fédéral Albert Rösti dévoile des solutions. Un système de mesure par GPS serait-il envisagé pour suivre les trajets ?
09.10.2024