Alain Berset« Il ne faut pas reperdre le contrôle une troisième fois »
clsi, ats
19.3.2021 - 15:18
19.03.2021, 15:18
19.03.2021, 16:04
ATS
Les restaurants ne rouvriront pas leurs terrasses le 22 mars. Le Conseil fédéral a repoussé vendredi les principales mesures d'assouplissement. Seule concession: les Suisses pourront se réunir à dix à la maison.
La Suisse a déjà perdu le contrôle de la pandémie à deux reprises, en mars et en octobre. «Il ne faut pas faire la même erreur une troisième fois», a martelé vendredi le ministre de la santé Alain Berset devant la presse.
La situation se détériore. «Nous sommes au début d'une troisième vague», a-t-il précisé. Les cas sont repartis à la hausse à partir du 20 février. Une semaine plus tard, les hospitalisations ont suivi. «Il n'y a pas encore de découplage des deux courbes.»
C'est pourquoi le Conseil fédéral a décidé d'avancer à petits pas dans la réouverture. Perdre le contrôle revient à prolonger la crise, a ajouté le conseiller fédéral. «Avec la vaccination, nous avons un moyen de sortir de la crise» et d'esquisser de meilleures perspectives pour l'été.
L'ouverture des terrasses repoussée
Le gouvernement avait mis la semaine passée un paquet d'assouplissements en consultation. Outre la réouverture des terrasses, les théâtres, les cinémas ou encore les centres sportifs auraient de nouveau été accessibles sous condition. Les cantons s'y sont montrés favorables.
Face à la dégradation de la situation épidémiologique, le Conseil fédéral n'a finalement pas adopté les mesures envisagées. Un seul assouplissement sera effectif dès lundi: les réunions privées à domicile passeront de 5 à 10 personnes maximum, enfants compris.
Cet allégement a été décidé en prévision de Pâques, explique le gouvernement dans un communiqué. Il recommande toutefois de limiter le nombre de ménages présents et de se faire tester avant de retrouver famille et amis.
Risque trop grand
Le risque de perdre le contrôle est trop grand pour permettre d'autres assouplissements, poursuit-il. Depuis fin février, le nombre d'infections est reparti à la hausse, comme dans les pays voisins, et il devrait doubler toutes les trois à quatre semaines. De plus, les nouvelles souches, plus contagieuses et mortelles, sont désormais responsables de 80% des contaminations.
Trois des quatre critères fixés pour la réouverture ne sont en outre pas remplis. L'incidence sur deux semaines est supérieure à 200 cas pour 100'000 habitants, le taux de positivité dépasse 5% et le taux de reproduction se situe à 1,14, soit bien plus que 1. Seule l'occupation des soins intensifs est inférieure à la limite requise.
La campagne de vaccination n'avance pas non plus suffisamment vite. Pour le moment, le nombre de vaccinations effectuées ne permet pas d'éviter une augmentation des hospitalisations, souligne le Conseil fédéral.
Le gouvernement n'a ainsi pas cédé à la pression exercée par une partie de la branche économique et du monde politique. Les parlementaires, issus principalement de la droite, ont laissé transparaitre à plusieurs reprises leur volonté de rouvrir rapidement le pays lors de la session qui vient de se terminer.
L'impatience se fait aussi ressentir du côté de la population. Selon un sondage SSR, plus de deux Suisses sur trois souhaitent une réouverture des terrasses d'ici la fin mars. Seuls 22% sont prêts à attendre avril, et 10% plus tard. Ils sont toutefois toujours plus nombreux à faire confiance au Conseil fédéral dans sa gestion de la crise.
Le gouvernement évaluera le 14 avril les prochaines étapes de déconfinement. L'objectif est de continuer la campagne de vaccination afin de permettre les assouplissements présentés la semaine dernière après Pâques. D'ici là, les mesures actuelles de lutte contre le Covid-19 restent en vigueur.
Trois phases
Un seuil à partir duquel des mesures plus strictes devront être prises a également été fixé. Le Conseil fédéral a établi un modèle en trois phases qui dépend du nombre de vaccinations.
Tant que tous les individus vulnérables ne sont pas vaccinés, l'incidence sur quatorze jours ne doit pas dépasser 350. Le nombre de lits occupés aux soins intensifs, les hospitalisations et le taux reproduction seront aussi pris en compte.
Les exigences seront revues à la baisse dès que toutes les personnes vulnérables seront vaccinées. Le gouvernement n'avance, dans ce cas, pas de critères précis. Enfin, plus aucune restriction ou indicateur ne seraient nécessaires quand toutes les personnes qui le souhaitent auront été vaccinées, sauf s'il faut réagir à l'apparition de nouvelles souches.
Déception des cantons
Le report de la plupart des mesures d'assouplissement par le Conseil fédéral déçoit la majorité des cantons. Nombre d'entre eux appelaient le gouvernement à encore davantage d'allégements.
«Une stratégie d’assouplissement prudente a aussi été soutenue par une majorité des cantons lors de la consultation», rappelle la Conférence des directeurs cantonaux de la santé (CDS) vendredi dans un communiqué. Des allégements étaient attendus dans le domaine de la formation, et la moitié des cantons souhaitaient que l'ouverture des restaurants concerne aussi l'espace intérieur. Mais la CDS se dit consciente de la difficulté de la situation.
Les cantons attendent désormais du Conseil fédéral que, lors des prochaines étapes, il tienne compte des progrès de la vaccination et de l’élargissement des tests. Le modèle proposé comportant trois phases et différents indicateurs «va dans ce sens», considère la CDS.