Présidentielle américaine Venus fêter, les partisans de Harris repartent la boule au ventre

ATS

6.11.2024 - 08:33

Petit à petit, la foule bruyante, chantante et dansante, venue pour vivre un «moment historique», s'est mise à douter. Et l'angoisse a pris le dessus au milieu de la nuit à Washington.

Des partisans de la candidate démocrate à la présidence, la vice-présidente Kamala Harris, quittent une soirée de surveillance de la campagne électorale après l'annonce qu'elle ne prendrait pas la parole le mercredi 6 novembre 2024, sur le campus de l'université Howard à Washington. (AP Photo/Ben Curtis)
Des partisans de la candidate démocrate à la présidence, la vice-présidente Kamala Harris, quittent une soirée de surveillance de la campagne électorale après l'annonce qu'elle ne prendrait pas la parole le mercredi 6 novembre 2024, sur le campus de l'université Howard à Washington. (AP Photo/Ben Curtis)
KEYSTONE

En arrivant en début de soirée sur la pelouse de Howard, cette université surnommée la «Harvard noire», les partisans de Kamala Harris répétaient en boucle leur espoir de voir pour la première fois une femme noire à la tête des Etats-Unis.

Ils osaient à peine envisager la défaite et attendaient avec impatience la vice-présidente démocrate qui devait s'exprimer devant eux. Un discours finalement annulé après minuit et demi, ce qui a entraîné le départ de ceux qui espéraient encore.

L'installation prévue était pourtant grandiose: sur la grande estrade, un drapeau américain tous les deux mètres et un éclairage délicatement choisi. En face, des centaines de caméras, du monde entier.

«Il y a encore des voix à compter», est venu expliquer l'un de ses conseillers, annonçant que la candidate ne s'exprimerait que le lendemain.

«Comment préserver la démocratie»

Peu après 23h00, le froid tombe soudain sur le campus d'Howard à mesure que les résultats s'égrènent. Les visages commencent à se fermer et le coeur n'est plus à la danse.

Tout le monde a le regard rivé sur les écrans géants, plus personne n'agite son drapeau. Les premiers résultats sont en faveur de l'ancien président républicain Donald Trump.

C'en est trop pour Charlyn Anderson qui quitte Howard avant même minuit: «Je suis anxieuse, je pars, mes jambes ne peuvent plus me porter».

«Je pense au chemin qui nous attend», si Donald Trump l'emporte, explique-t-elle, le visage fermé. Triturant son petit drapeau américain, elle lâche: «comment préserver la démocratie maintenant?». «Nous n'abandonnerons pas tant que ce ne sera pas fait, mais j'ai peur.»

Tourné face à l'écran géant où le rouge des républicains s'affiche de plus en plus, Ken Brown, ancien étudiant de Howard, est sous le choc: «c'est un très mauvais candidat, ça n'a pas de sens».

Derrière lui, la foule, très jeune, semble sonnée. «Je ne sais pas qui vote pour lui. Je ne comprends pas», ajoute-t-il.

«Nation déchirée»

C'est avec l'espoir de voir du «changement» que Kwame Anderson était arrivée en début de soirée avec plusieurs amies.

«Je prie pour que cette nation ne soit pas encore plus déchirée qu'elle ne l'est déjà, nous avons besoin de paix», dit-elle. «Nous ne voulons plus de violence, nous ne voulons plus de haine.»

Derrière cette femme aux longues tresses, des tribunes ont été installées au milieu des imposants bâtiments universitaires faits de briques rouges et de colonnes blanches.

Au pied d'un grand arbre aux couleurs de l'automne, les milliers de partisans de Kamala Harris ont beaucoup chanté et dansé pour tromper l'attente. Certains n'avaient pas hésité à sortir leurs habits du dimanche, d'autres les talons aiguilles.

L'université Howard est une institution centrale dans la formation des élites noires américaines et occupe une place essentielle dans le récit personnel de la vice-présidente. Depuis son diplôme en 1986, elle y est souvent retournée.

En repartant, plus personne n'ose parler de «nuit historique», expression qui était sur toutes les lèvres en début de soirée. Cela fait déjà un moment que la chanteuse tout de blanc vêtue, couronne argentée sur la tête, qui venait régulièrement entonner l'hymne américain, a disparu.

«Il reste le mur bleu, il reste le mur bleu», répète un groupe de jeunes, t-shirts de l'université sur le dos, en scrutant frénétiquement leurs téléphones. Ils font référence au Michigan, au Wisconsin et à la Pennsylvanie, ces Etat clé, situés dans le nord-est du pays, sont les derniers espoirs du camp démocrate.

Autour d'eux, deux femmes, les larmes aux yeux s'étreignent, en silence.

ATS