Ascension fulgurante Qui est Jordan Bardella, le nouvel atout de l'extrême droite française ?

AFP

6.5.2024

Il est le nouvel atout du Rassemblement national, celui qui espère faire du parti d'extrême droite la première formation de France aux prochaines européennes. Jordan Bardella, 28 ans, séduit de plus en plus d'électeurs, en dépit de critiques récurrentes sur son manque de fond et sa «duplicité».

Jordan Bardella est le nouvel atout du Rassemblement national.
Jordan Bardella est le nouvel atout du Rassemblement national.
IMAGO/ABACAPRESS

AFP

6.5.2024

Formules ciselées pour cogner et sourire à toute épreuve pour les selfies: la tête de liste du RN donne un coup de jeune au parti historique de l'extrême droite française fondé au début des années 1970 par Jean-Marie Le Pen, 95 ans.

La stratégie de dédiabolisation entamée il y a une dizaine d'années par sa fille Marine Le Pen, qui a lissé l'image du parti et rompu avec les déclarations antisémites et racistes de son fondateur, trouve son aboutissement avec Bardella. Il s'est imposé en moins de cinq ans dans un paysage politique en plein renouvellement.

Crédité de 32% des intentions de vote à moins de cinq semaines du scrutin, loin devant la liste de la majorité présidentielle d'Emmanuel Macron à 17%, le jeune homme au physique de gendre idéal «séduit dans toutes les catégories», résume le sondeur Frédéric Dabi dans La Croix.

«Attrape-tout»

«Le Rassemblement national devient un parti attrape-tout, présent dans toutes les catégories et géographies», abonde Gilles Finchelstein, de la fondation Jean Jaurès, pour qui «le RN sans le moindre doute finira en tête, comme en 2014 et 2019.»

M. Bardella met en avant ses origines modestes, d'ascendance italienne et élevé par sa mère dans une banlieue parisienne populaire, pour apparaître proche des préoccupations des Français: pouvoir d'achat, immigration, insécurité...

Adhérent au parti d'extrême droite depuis ses 17 ans, il en a gravi les échelons jusqu'à en prendre la tête en 2021, tandis que Marine Le Pen, arrivée deux fois au deuxième tour de l'élection présidentielle derrière Emmanuel Macron, prépare l'échéance de 2027.

Il a été son porte-parole lors de la dernière campagne de 2022. Il a également conduit la liste RN aux dernières européennes de 2019, arrivée en tête juste devant celle de la majorité présidentielle.

Le scrutin européen du 9 juin pourrait parachever cette ascension à une double condition: «arriver en tête et avec un score supérieur à celui de 2019», résume l'un de ses proches.

M. Bardella, à qui Marine Le Pen a promis le poste de Premier ministre si elle est élue en 2027, a fait monter les enchères en indiquant qu'il demanderait une dissolution de l'Assemblée nationale si son parti arrive en tête, posant ainsi les enjeux en termes français plus qu'européens.

La tête de liste de l'extrême droite a d'ailleurs davantage fait campagne sur des thèmes nationaux, alimentant ainsi les critiques de ses opposants sur sa méconnaissance et son désintérêt pour l'Europe.

M. Bardella, qui s'enorgueillit d'avoir dépassé le million d'abonnés sur TikTok, est accusé de soigner son image médiatique plus que sa connaissance des dossiers, et est critiqué pour son «absentéisme» au Parlement européen. L'eurodéputée de la gauche radicale Manon Aubry le qualifie de «député fantôme».

Esquive

Il n'est «pas très à l'aise» sur les dossiers européens, dit une ministre macroniste, «il se tait et se cache», abonde une autre.

Lors d'un meeting à Perpignan le 1er mai, il a prononcé un plaidoyer fourre-tout pour une «Europe des nations», «des réalités», «des gens», «du concret», «des identités», «des frontières», «du juste échange, du patriotisme économique, de la priorité nationale, de la préférence européenne».

Mais lors d'une conférence le 25 avril pour présenter son programme, organisée après le discours sur l'Europe du président Macron, il a esquivé les questions des journalistes.

Jeudi soir, le candidat d'extrême droite a tenu un premier débat télévisé avec la tête de liste macroniste, Valérie Hayer, qui a accusé le RN de «duplicité» sur l'Europe et d'être la «courroie de transmission» de la Russie.

M. Bardella a répliqué coup pour coup et éludé les critiques sur certains membres de sa liste comme Thierry Mariani, connu pour ses positions pro-Kremlin. Un autre débat avec le Premier ministre Gabriel Attal pourrait avoir lieu prochainement.