Point final d'une cavale de 20 ans L'ex-fugitif Thierry Ascione condamné à 18 ans de réclusion pour complicité d'assassinats

blue News / AFP

11.10.2024

Le double assassinat il y a 33 ans d'un couple de restaurateurs français établis au Guatemala a connu vendredi son épilogue judiciaire avec la condamnation à 18 ans de réclusion de l'ex-fugitif Thierry Ascione, reconnu coupable de complicité d'assassinats et d'escroquerie par la cour d'assises de Paris.

Thierry Ascione a toujours nié être impliqué dans ce double assassinat. Il a simplement reconnu avoir frauduleusement encaissé un chèque de 80.000 dollars dans une banque de Miami, quelques jours après l'assassinat (archives).
Thierry Ascione a toujours nié être impliqué dans ce double assassinat. Il a simplement reconnu avoir frauduleusement encaissé un chèque de 80.000 dollars dans une banque de Miami, quelques jours après l'assassinat (archives).
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Avant même que le président David De Pas ne termine la lecture du verdict, le fils de Bernard Béreaud et la soeur de Marie-Antoinette Perriard, les deux victimes sauvagement tuées à Guatemala City dans la nuit du 27 au 28 décembre 1991, ne peuvent retenir leurs larmes de joie.

La cour a répondu oui à toutes les questions concernant la culpabilité de Thierry Ascione. Pour la famille des victimes c'est un soulagement après une longue attente.

Le président annonce une peine de 18 ans de réclusion, au-delà des 15 ans réclamés par l'avocat général.

Debout dans le box des accusés, Thierry Ascione, 65 ans, souffrant d'une myopathie congénitale et récemment victime d'un AVC, a l'air hagard. Ses avocates, qui avaient plaidé l'acquittement, tentent de le réconforter mais il ressemble à un boxeur groggy après un KO.

Jusqu'au bout il a nié être impliqué dans ce double assassinat. Il a simplement reconnu avoir frauduleusement encaissé un chèque de 80.000 dollars sur un compte de Bernard Béreaud dans une banque de Miami, quelques jours après l'assassinat. Mais «j'ai escroqué la banque, pas M. Béreaud», a-t-il soutenu à l'audience.

Ses avocates, Mes Margaux Durand-Poincloux et Salomé Cohen disposent de 10 jours pour interjeter appel.

Retour sur les faits

Dans la nuit du 27 au 28 décembre 1991, Bernard Béreaud et Marie-Antoinette Perriard, propriétaires de deux restaurants réputés de la capitale du Guatemala, Chez Pierre et Le bistrot de Paris, doivent se rendre à l'aéroport prendre un vol pour Miami d'où ils ont prévu de partir en croisière avec un couple d'amis.

Le couple n'arrivera jamais à l'aéroport. Leurs corps, affreusement mutilés, la langue coupée et les dents cassées, seront retrouvés le 28 décembre dans deux endroits différents de Guatemala City.

Deux Français dont le neveu du couple Jean-Philippe Bernard et l'ex-légionnaire Philippe Biret sont interpellés fin janvier 1992. Un troisième suspect, Thierry Ascione, est introuvable.

A l'audience, il a expliqué qu'il comptait revenir au Guatemala après son passage à Miami, ignorant tout du double meurtre. Alors qu'il se trouvait au Mexique, un de ses contacts d'affaires - il vendait des camions à l'armée -, le colonel S., l'a prévenu qu'il serait plus prudent de ne pas rentrer car la justice guatémaltèque voyait en lui un coupable idéal, a-t-il expliqué à l'audience, peu avare de récits rocambolesques racontés avec une faconde méridionale.

Typhon en Indonésie

Il serait alors parti en Asie, a-t-il soutenu.

Moins chanceux, Jean-Philippe Bernard et Philippe Biret ont été condamnés à 30 ans de prison et ont passé plus de 15 ans derrière les barreaux.

En Asie, Ascione «fait des affaires» jusqu'à son interpellation en mai 1995 à Bangkok avec des faux papiers volés à un touriste américain au Vietnam.

Extradé en France en septembre 1995, il est mis en examen et incarcéré.

Après près de cinq  ans de détention provisoire, il est remis en liberté en mai 2000, en attente de son procès, mais en profite pour se faire la belle.

Son procès en juin 2001 se déroulera sans lui. Jugé par contumace, il écope de la réclusion criminelle à perpétuité.

Pendant 20 ans sa trace se perd. Il bourlingue dans une bonne partie de l'est de l'Asie: Japon, Malaisie, Hong Kong, Chine, Philippines...

En 2021, pensant, à tort, que les faits qui lui sont reprochés sont prescrits il raconte être parti en voilier vers la Nouvelle-Calédonie. Las, son voilier est pris dans un typhon dans les eaux indonésiennes.

Ascione l'ignore mais il fait l'objet d'une notice rouge d'Interpol. Après beaucoup de tergiversations l'Indonésie l'expulse vers les Pays-Bas en juin 2023. Les autorités néerlandaises le remettent finalement à la France en octobre 2023.

«Ce qui m'a toujours le plus déplu c'est d'être accusé à tort», a dit Ascione vendredi matin avant le délibéré. Mais la cour d'assises ne l'a pas entendu.

© Agence France-Presse