Nouvelle image pour LFI ? «Je les entends quand même bien gueuler derrière moi»

AFP

31.10.2024

Les vagues Insoumises du bruit et de la fureur sont-elles en train de s'échouer sur le rivage de l'institutionnalisation ? En ayant gagné en responsabilités à l'Assemblée, le groupe LFI, longtemps critiqué pour son style conflictuel, présente dorénavant une image plus lisse dans l'hémicycle.

LFI : un nouveau style aussi pour Jean-Luc Mélenchon ?
LFI : un nouveau style aussi pour Jean-Luc Mélenchon ?
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Créée en 2016, La France insoumise compte dorénavant, parmi ses 71 élus à l'Assemblée, deux des huit présidents de commission permanente et deux des six postes de vice-présidents.

Parmi ces derniers, l'élue du Val-de-Marne, Clémence Guetté, cadre du mouvement de gauche radicale, garante de son programme de rupture, et proche de Jean-Luc Mélenchon. Et un des premiers moments marquants à ce poste a été, lors d'une séance qu'elle dirigeait, de recadrer depuis le perchoir son collègue LFI Louis Boyard.

«Quand je préside l'Assemblée nationale, je m'applique à le faire avec le plus d'impartialité possible», a-t-elle expliqué par la suite, précisant que son style, calme, était «une façon de démontrer que les Insoumis ne (...) peuvent pas être réduits aux caricatures qui en sont faites».

«Ce qui est sûr, c'est que la vice-présidence vous oblige. C'est assez étonnant de voir le contraste entre Guetté dans l'hémicycle et à la tribune», note un cadre RN de l'Assemblée, même si la députée du Val-de-Marne n'est pas la première Insoumise vice-présidente - Caroline Fiat l'a été entre 2022 et 2024.

«Les Insoumis ont changé leur stratégie en partie. Ce qui est plutôt flatteur parce qu'ils reprendraient la nôtre», ajoute-t-il, en référence à la stratégie de dédiabolisation de l'extrême droite à l'Assemblée, longtemps comparée, par contraste, à celle de la conflictualisation des Insoumis.

«Jeu de rôles»

Autre figure d'apaisement du camp LFI, le président de la commission des Finances Eric Coquerel assure que lui et ses collègues sont «capables de compromis, si c'est pour faire avancer nos idées».

«Il y a la volonté de montrer qu'on n'est pas isolé. On n'est pas ce groupe mis en dehors de l'arc républicain, rejeté par tout le monde. Il y a une volonté de rappeler pourquoi on s'est créé et c'est pour gouverner ce pays. Je pense que c'est une volonté forte de Jean-Luc Mélenchon», appuie l'élu de Seine-Saint-Denis.

«C'est un jeu de rôles», nuance cependant un député écologiste. «Je les entends quand même bien gueuler derrière moi dans l'hémicycle», appuie-t-il.

Mais à quoi attribuer ce changement - partiel - d'attitude? Simple poids des institutions républicaines qui se fait ressentir sur les épaules des troupes mélenchonistes, ou nécessité électorale?

Ce que La France insoumise a gagné comme électorat d'un côté via les coups d'éclat au Palais Bourbon - comme le drapeau palestinien brandi par Sébastien Delogu - elle a pu le perdre de l'autre.

«Tout le monde a vu qu'on est passé de 75 à 72 députés élus (entre 2022 et 2024, ndlr) et qu'on a eu une dizaine de camarades battus. Le diagnostic est dressé en interne», assure un député LFI.

«Nouvelles responsabilités»

«On apprend, on est dans un nouveau mandat, avec de nouvelles responsabilités», explique pour sa part l'élu de Loire-Atlantique Matthias Tavel.

«Quand vous êtes le premier groupe de la coalition arrivée en tête aux législatives et que l'extrême droite est aussi puissante, il faut chercher à être compris», ajoute-t-il.

Ironiquement, ce nouveau style qui se tient à l'écart des outrances correspond à celui réclamé - en vain - pendant des mois par les anciens «frondeurs» Insoumis, qui appelaient à un discours apaisé et resserré autour des questions économiques et sociales. «Ils nous ont purgés puis ils ont pris notre ligne», grimace un ancien frondeur.

«Depuis qu'ils nous ont exclus, ils sont unitaires, impeccables sur les violences sexistes et sexuelles et parlent de +terroristes+ pour le Hamas. C'est ce qu'on demandait», ajoute un autre.

Une référence à l'exclusion du groupe LFI du député Hugo Prevost, accusé de violences sexistes et sexuelles, qui tranchait avec la manière dont les Insoumis avaient géré l'affaire Quatennens.