Forte d'une soirée à Mar-a-Lago, d'une invitation à l'investiture de Donald Trump lundi et d'un bon rapport avec Elon Musk, Giorgia Meloni apparaît comme la dirigeante européenne d'importance la plus proche du futur président des Etats-Unis.
AFP
17.01.2025, 08:14
Gregoire Galley
Les experts mettent toutefois en garde Bruxelles, inquiète des premiers pas de Trump sur de nombreux sujets - de l'Ukraine aux tarifs douaniers -, sur la fiabilité de la Première ministre italienne comme médiatrice, compte tenu de son euroscepticisme.
La leader d'extrême droite doit encore confirmer si elle ira à la cérémonie d'investiture à Washington, où elle est l'une des rares parmi ses pairs européens à avoir été invitée, une preuve du «grand respect» que le président élu a pour elle et l'Italie selon une source transalpine.
Même s'ils ne se connaissent pas bien, Meloni et Trump partagent les mêmes valeurs conservatrices et se sont rencontrés deux fois depuis l'élection du dirigeant républicain en novembre.
Le parti post-fasciste de Meloni, Fratelli d'Italia, entretient en outre de longue date des liens avec Steve Bannon, l'un des artisans de la victoire de Trump en 2016.
Et contrairement aux autres dirigeants de grands pays européens, la Première ministre peut se targuer d'excellentes relations avec Musk, le milliardaire omniprésent aux côtés de Trump.
Par conséquent, des soutiens de Meloni la voient comme un éventuel «pont» entre la Maison Blanche et l'UE, alors qu'elle avait déjà su construire une relation solide avec le président sortant Joe Biden, qui avait salué son ferme soutien à Kiev face à l'invasion russe.
Dès l'élection de Trump, elle lui a parlé au téléphone, puis l'a rencontré lors de la réouverture de Notre-Dame de Paris et, début janvier, elle lui a fait une visite éclair dans sa résidence de Floride, où il l'a qualifiée de «femme fantastique».
Après sa visite, elle a affirmé qu'ils étaient «prêts à travailler ensemble», minimisant notamment ses sorties sur le Groenland et le canal de Panama, destinées selon elle à la Chine. Et elle a volé au secours de Musk, très critiqué pour s'en être pris aux chefs de gouvernement britannique et allemand sur son réseau X.
«Giorgia Meloni a de meilleures relations avec Trump que tout autre dirigeant européen (important). Cependant, je ne parlerais pas de relation +spéciale+», estime Teresa Coratella, du groupe de réflexion European Council on Foreign Relations.
Mais Meloni «remplit un grand vide dans le débat européen actuel sur l'attitude à tenir vis-à-vis de Trump ou d'Elon Musk», explique-t-elle à l'AFP, alors que l'UE est à la peine pour discuter avec Trump et les membres de sa future administration.
Trump a mis en avant son «excellente relation» avec le président français Emmanuel Macron, mais les deux hommes sont à l'opposé sur l'échiquier politique. Quant au Premier ministre nationaliste hongrois Viktor Orban, il partage les idées de Trump mais est à couteaux tirés avec Bruxelles.
Depuis son arrivée au pouvoir en 2022, Meloni a pris à revers ses opposants en adoptant une attitude pragmatique vis-à-vis de Bruxelles.
Mais «Meloni n'agira pas pour le compte de l'Europe, elle agira pour son propre compte. Et si cela se traduit par un affaiblissement de l'Europe, elle ne s'en préoccupe pas vraiment», met en garde Nathalie Tocci, directrice de l'Institut italien pour les Affaires internationales. L'un des premiers tests pourrait être l'Ukraine, que, selon Mme Tocci, Meloni pourrait lâcher si Trump donne un signal en ce sens.
Les relations de Meloni avec Washington sont appréciées en Italie, où elle bénéficie d'une cote de popularité toujours haute, particulièrement après l'obtention de la libération d'une journaliste italienne détenue en Iran. Grâce à l'aide des Etats-Unis, Cecilia Sala a pu rentrer en Italie juste quelques jours après le voyage de Meloni en Floride.
Mais sa proximité avec Musk a été vivement critiquée par les partis d'opposition, notamment quand il est apparu que le gouvernement italien négociait avec sa société SpaceX un contrat de cybersécurité de 1,5 milliard d'euros.
Comme ailleurs, un climat de nervosité règne en Italie sur les futures actions de Trump. Une hausse des tarifs douaniers pénaliserait le pays déjà fortement endetté, qui dépense seulement 1,57% de son PIB pour sa défense et ne peut se permettre d'accéder à la demande de Trump de monter à 5%.
Quoi qu'il en soit, «si Trump estime qu'il est dans l'intérêt des Etats-Unis de faire quelque chose de nuisible à l'Europe, y compris à l'Italie, il le fera», avertit Nathalie Tocci.
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