«Il peut changer les choses» Déçus par les démocrates, les Latinos optent de plus en plus pour Trump

AFP

22.10.2024

Déçus par les démocrates sur les questions économiques et migratoires, de plus en plus de Latino-Américains comme Maria Salinas disent qu'ils voteront pour Donald Trump à la présidentielle, un appui qui pourrait être crucial pour lui.

D'après un sondage New York Times/Siena College réalisé début octobre, la plupart des Latino-Américains ne se sentent pas concernés quand Donald Trump accuse les migrants d'être des criminels et d'"empoisonner le sang" du pays.
D'après un sondage New York Times/Siena College réalisé début octobre, la plupart des Latino-Américains ne se sentent pas concernés quand Donald Trump accuse les migrants d'être des criminels et d'"empoisonner le sang" du pays.
KEYSTONE

Marc Schaller

«Trump peut changer un peu les choses», assure cette femme qui tient un stand sur un marché aux puces au nord de Las Vegas, dans le Nevada, un des Etats décisifs en vue du 5 novembre.

«J'ai des membres de ma famille qui attendent depuis des années un moyen de régulariser leur situation et rien, que des promesses et des promesses. (Les démocrates) font de beaux discours, mais rien ne change pour nous», s'exclame cette commerçante de 56 ans. Et d'assurer à propos du républicain: «Cette fois, je vais lui donner mon vote pour voir s'il peut nous aider.»

Dans ce labyrinthe d'étals colorés, nombreux sont les membres de la communauté latino à blâmer les démocrates pour l'augmentation du coût de la vie et les politiques migratoires.

S'il continue globalement de se porter sur le Parti démocrate, le vote latino est depuis quelques années grignoté par les républicains.

En 2012, 71% des Latino-Américains ont voté démocrate et 27% républicain. En 2020, ce n'était plus que 66%, Donald Trump obtenant 32% des suffrages. Et selon un récent sondage d'UnidosUS, 57% des Latinos penchent aujourd'hui pour la démocrate Kamala Harris, contre 34% pour Trump.

Un fléchissement qui pourrait peser lourd, notamment dans le Nevada où cette communauté représente un cinquième de l'électorat et où le scrutin s'annonce extrêmement serré, les sondages donnant à peine un demi-point d'avance à Harris.

«Très énervé»

«Je n'ai jamais compris pourquoi on dit que les latinos doivent être démocrates», lâche Javier Barajas, patron de restaurants à Las Vegas. «Les démocrates ne nous ont jamais aidés», accuse ce sexagénaire qui a traversé dans les années 1970 la frontière entre Etats-Unis et Mexique.

Il avait déjà voté en 2020 pour Donald Trump. Mais ce n'est qu'aujourd'hui qu'il dit se déclarer ouvertement républicain.

«Maintenant, oui, je le dis, car je suis très énervé contre les démocrates (...). C'est une façon de leur dire: +Ok, ça suffit. Nous ne sommes pas d'accord avec vous, vous devez nous prendre plus au sérieux+».

Javier Barajas fait par exemple l'éloge de l'ancien président républicain Ronald Reagan qui permit en 1986 la régularisation de plusieurs millions d'immigrants. Selon lui, les promesses d'"expulsions massives" faites par Donald Trump ne concerneront que les «délinquants»: «Il ne s'attaquera pas aux travailleurs».

Il assure ne pas prendre personnellement les propos véhéments du candidat républicain à l'encontre des migrants mais affirme avoir prévenu l'ancien président, qui a visité son restaurant, comme d'ailleurs Joe Biden, que de nombreux latinos détestaient cette rhétorique.

D'après un sondage New York Times/Siena College réalisé début octobre, la plupart des Latino-Américains ne se sentent pas concernés quand Donald Trump accuse les migrants d'être des criminels et d'"empoisonner le sang" du pays.

«Immigrée comme nous»

Pour autant, la candidature de Kamala Harris a rebattu les cartes et pourrait aider les démocrates à enrayer les progrès de Trump.

«Bien qu'elle ne soit pas latina, elle est une immigrée comme nous. Elle a vécu les mêmes situations de discrimination», pointe Reina Velis, 62 ans.

La candidate «est le fruit de parents immigrés», abonde Ricardo Fernandez, 54 ans, en référence aux parents indien et jamaïcain de la vice-présidente.

Pour cet homme d'affaires, qui a émigré du Mexique il y a plus de quarante ans, le Parti démocrate «va davantage dans le sens de nos idées et de notre façon d'être», mais devrait faire plus pour parler aux Latino- Américains.

Selon lui, le soutien au milliardaire -en dépit de sa violente rhétorique anti-immigration- s'explique par le fait que «de nombreux latinos ne sont pas bien informés».

«Il est très important pour la communauté de prêter attention à ce qui se joue ici», insiste-t-il. «Nous parlons d'une candidate qui dit vouloir aider la classe moyenne et d'un candidat (...) dont le plan consiste à favoriser les milliardaires et les millionnaires».

Or, souligne-t-il, «combien de Latinos sont millionnaires aux États-Unis?»