«L'apparence d'un patient atteint de Parkinson»Biden est-il apte pour un 2e mandat? L'avis des experts
ATS
15.7.2024 - 07:40
Face aux lapsus, difficultés d'élocution et autres signes désormais scrutés à la loupe chez le président américain Joe Biden, des experts scientifiques mettent en garde contre toute conclusion trop hâtive sur son état de santé. Ils l'appellent à passer des examens supplémentaires.
15.07.2024, 07:40
15.07.2024, 07:50
ATS
Ces tests, arguent-ils, devraient être rendus publics et mettre un terme aux spéculations s'ils ne confirment pas les craintes actuelles. Ces experts disent comprendre les inquiétudes, mais rappellent que seuls des médecins l'examinant de près peuvent poser un véritable diagnostic.
Depuis deux semaines et sa prestation catastrophique lors d'un débat face à l'ancien président américain Donald Trump, la candidature du démocrate de 81 ans à un second mandat tangue violemment.
Toute la question, selon le neurologue Dennis Selkoe, est de distinguer «la limite entre ce qui relève du processus de vieillissement normal» et «d'une maladie neurologique». «Faire une erreur de nom, même fréquemment, n'est pas automatiquement un signe de démence sénile ou d'Alzheimer», explique à l'AFP ce professeur à la Harvard Medical School.
Parkinson
Mais Joe Biden a, pour cet expert, qui voit de nombreuses personnes souffrant de maladies neurodégénératives, «l'apparence d'un patient atteint depuis peu de Parkinson». Il cite sa tendance à parler à voix basse (hypophonie) sa mobilité raide et lente.
En février, Joe Biden a passé un examen médical complet dont un compte-rendu a été rendu public. Il indiquait qu'un «examen neurologique détaillé» avait écarté Parkinson. Mais la nature des tests inclus et le détail des résultats n'ont pas été publiés.
Une maladie neurologique aurait-elle pu se déclencher depuis, en cinq mois? Si les examens étaient assez poussés, alors une maladie naissante aujourd'hui aurait été détectable en février, selon Dennis Selkoe. Mais l'expert se demande si les tests étaient alors allés assez loin.
Dans un éditorial, la revue scientifique Lancet a appelé dès mars à la mise en place d'une procédure standardisée pour examiner les présidents, afin de contrer la «désinformation» et les «spéculations».
Transparence exigée
«En l'absence d'une méthode efficace pour évaluer l'état de santé des présidents [...] le public américain reste tributaire des rapports publiés volontairement par les médecins personnels», soulignait ce texte.
«Le temps est venu d'une transparence absolue», juge également Jay Olshansky, professeur de santé publique à l'université de l'Illinois à Chicago, spécialiste de la vieillesse. Il plaide en faveur d'un test cognitif, que Donald Trump a mis au défi Joe Biden de passer. Il en existe plusieurs reconnus (MMSE, MoCA...), qui peuvent être inclus dans un examen neurologique ou qui peuvent être utilisés comme premier dépistage.
Joe Biden assure qu'il passe un test cognitif chaque jour simplement en exerçant ses fonctions. Mais «je ne crois pas que ce soit similaire», commente Dennis Selkoe. Le président peut rester capable de réaliser des tâches auxquelles il est habitué, mais «différentes» de ce que ces tests demandent, par exemple répéter une liste de mots prononcée cinq minutes plus tôt.
Jeudi en conférence de presse, le président a assuré que si ses médecins recommandaient un nouvel examen neurologique, il s'y plierait. Avant d'ajouter: «mais personne ne me le suggère actuellement».
Agisme
Avec l'âge, le cerveau se transforme, explique à l'AFP Allison Sekuler, présidente de la Baycrest Academy, un hôpital spécialisé dans les soins aux personnes âgées. «Des déchets s'accumulent», compare-t-elle, et certaines parties «rétrécissent». Une première étape, appelée trouble cognitif léger, peut ensuite se transformer en maladie comme Alzheimer.
Lors de leur débat, Joe Biden comme Donald Trump, 78 ans, ont «montré des difficultés à suivre le fil d'une question», juge l'experte, qui recommanderait donc que tous deux soient examinés. «Mais on ne parle que de l'un d'entre eux, car il correspond à notre stéréotype du vieillissement».
Jay Olshansky regrette également l'âgisme «flagrant» selon lui contre Joe Biden, comme la récente Une du magazine The Economist, affichant un déambulateur avec l'insigne présidentielle.
Or «l'intelligence cristallisée», c'est-à-dire la capacité à utiliser l'expérience passée pour raisonner, «ne cesse de se renforcer» dans le temps, rappelle-t-il. C'est pourquoi aucune limite d'âge maximum n'a été posée pour être président, mais qu'une limite basse existe (35 ans), dit-il.
Selon une étude de 2020 dont il était le co-auteur, Joe Biden avait alors 95% de chance de survivre à son premier mandat, en prenant en compte l'espérance de vie moyenne de sa classe d'âge et ses facteurs de risque personnels. Pour le second mandat de Joe Biden, la simulation a été répétée: à cause de ses quatre ans de plus, les chances de survie du président tombent à 75%.
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