Pessimisme à KievLes Ukrainiens s'inquiètent: «Quelque chose va changer...»
ATS
6.11.2024 - 14:54
Dans les rues de Kiev, le pessimisme est le maître-mot mercredi. Car la victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine risque de plomber l'aide à l'Ukraine, dont l'armée recule déjà, jour après jour, face aux Russes.
À Kiev, les passants réagissent à la victoire de Trump
Dans les rues de Kiev, le pessimisme est le maître-mot mercredi. Car la victoire de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine risque de plomber l'aide à l'Ukraine.
06.11.2024
Keystone-SDA
06.11.2024, 14:54
06.11.2024, 15:03
ATS
Ces derniers mois, le milliardaire a martelé pouvoir imposer une paix en Ukraine en «24 heures», sans jamais expliquer comment, mais en décriant l'ampleur de l'aide versée à Kiev.
Marchant dans les rues froides de la capitale ukrainienne, Natalia Pitchaktchi, une quinquagénaire déplacée de la ville de Marioupol, occupée par les Russes depuis le printemps 2022, est inquiète. «Je ressens une sorte d'anxiété, parce que je ne sais pas à quoi m'attendre», explique-t-elle à l'AFP. «C'est inquiétant».
«Quelque chose va changer»
«Quelque chose va changer, il n'y aura plus de soutien» américain, continue Natalia en référence aux dizaines de milliards de dollars d'aide militaire et financière que Washington et les membres de l'Otan ont fourni depuis le début de la guerre en 2022, permettant à Kiev de continuer à se battre contre un envahisseur bien plus puissant.
Ici, on craint que le nouveau président américain puisse imposer un plan de paix largement favorable à la Russie. Selon des médias occidentaux, M. Trump souhaiterait démilitariser mais laisser de facto sous contrôle russe la zone actuellement occupée par Moscou, soit 20% du territoire ukrainien. Il serait aussi favorable à ce que Kiev renonce à rejoindre l'Otan, comme le réclame le Kremlin.
Or, cela va à l'encontre du «plan de victoire» voulu par le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dont les points les plus importants sont, pourtant, une invitation officielle à rejoindre l'Otan, ainsi que le renforcement des aides militaires pour verrouiller le ciel ukrainien des attaques de Moscou et frapper en profondeur sur le sol russe.
Et Kiev réclame toujours le respect de son intégrité territoriale, excluant toute concession de son territoire, ce qui semble donc contredire certaines des idées du milliardaire américain.
«Victoire impressionnante»
En félicitant Donald Trump pour sa «victoire impressionnante», le président Zelensky a néanmoins dit espérer que ce résultat aidera l'Ukraine à obtenir «une paix juste». «J'apprécie l'engagement du président Trump en faveur de l'approche 'la paix par la force' dans les affaires mondiales», a-t-il écrit sur X.
Fin octobre, un haut responsable de la présidence ukrainienne avait voulu se montrer rassurant auprès de l'AFP, jugeant «très bonne» la rencontre Zelensky-Trump en septembre à New-York. Le président ukrainien a d'ailleurs qualifié mercredi de «formidable» leur rendez-vous d'alors.
Une position moins défaitiste partagée par Tetiana Podleska, informaticienne interrogée par l'AFP dans les rues de Kiev. «Je ne pense pas que ça (ce résultat, ndlr) changera grand-chose», dit-elle laconique. «Cela ne changera pas en mieux, c'est certain», concède-t-elle, «mais pour le pire, c'est peu probable».
Recul continu
Olga Prikhodko, jeune enseignante trentenaire, elle aussi interrogée dans la capitale ukrainienne, estime que l'élection américaine doit conduire l'Ukraine à «réfléchir à la suite des événements» pour s'assurer d'une victoire contre la Russie «parce que nos vies, l'avenir de notre pays sont entre nos mains».
Reste que, les forces ukrainiennes ne cessent de reculer, la Russie, malgré d'importantes pertes, conservant sa supériorité en hommes et en armes. Et désormais, les Occidentaux et Kiev voient arriver des renforts nord-coréens pour l'armée russe.
L'armée russe a pris quelque 500 kilomètres carrés de territoire ukrainien en octobre, un record depuis les premières semaines du conflit en mars 2022, selon une analyse par l'AFP des données de l'Institut américain pour l'étude de la guerre (ISW).
Promesses à tenir
Olga espère donc que les alliés de l'Ukraine tiendront leurs promesses de soutenir le pays jusqu'à la victoire, même si les autorités ukrainiennes ne cesse de dénoncer la timidité des réponses occidentales à l'escalade russe.
«Je crains que le soutien diminue, mais j'espère que la raison et les principes démocratiques prévaudront dans le monde», dit-elle. Igor Stryjeous, travailleur dans une centrale nucléaire ukrainienne, est lui aussi «inquiet», voyant en Trump un homme potentiellement «dangereux» pour l'Ukraine. Sa victoire «inquiète tout le monde», dit-il, «pas seulement l'Ukraine, mais le monde entier».