Narcobanditisme Un assassinat par erreur décrypté à Besançon

ATS

16.12.2024 - 10:46

Le procès de trois hommes, déjà condamnés pour trafic de stupéfiants, s'est ouvert lundi à Besançon pour l'assassinat d'un jeune de 22 ans, tué par erreur en 2020. La cour d'assises du Doubs rendra son verdict vendredi.

Deux bandes rivales se disputaient le contrôle du marché de la drogue dans le quartier sensible de Planoise à Besançon entre novembre 2019 et mars 2020 (photo symbolique).
Deux bandes rivales se disputaient le contrôle du marché de la drogue dans le quartier sensible de Planoise à Besançon entre novembre 2019 et mars 2020 (photo symbolique).
ATS

Keystone-SDA

Le hall du tribunal a été sécurisé en raison de la tension qui entoure cette affaire survenue dans le cadre d'affrontements entre trafiquants.

L'accusé de 24 ans, portant un col roulé blanc et une doudoune noire sans manche, et le prévenu de 31 ans, pull foncé, se sont installés, entourés de cinq membres cagoulés des Eris (Equipe régionale d'intervention et de sécurité) des services pénitentiaires.

Ils sont accusés d'avoir assassiné la victime alors qu'elle circulait en voiture à Besançon et d'avoir tenté d'assassiner son passager. L'enquête a révélé qu'ils s'étaient trompés de voiture, et donc de cible. Ils visaient en réalité un homme affilié à une bande rivale, le clan «Abdou».

Un troisième accusé, âgé de 31 ans, est en fuite à l'étranger et sera jugé par contumace, de complicité d'assassinat. Désigné comme le chef du clan, il est suspecté d'avoir commandité le crime et facilité sa réalisation en fournissant armes (un fusil-mitrailleur HK-MP5 et un revolver), voiture et téléphones cryptés aux tueurs.

Il sera néanmoins représenté par un avocat, comme l'autorise la loi. Tous trois risquent la prison à perpétuité. Les trois accusés ont déjà été condamnés à de multiples reprises pour trafic de stupéfiants, violences aggravées et association de malfaiteurs.

Les faits remontent au 8 mars 2020 vers 21h00. La victime circule avec un ami à Besançon lorsqu'il est pris en chasse par des hommes armés. Ils tirent à 29 reprises dans sa direction et le touchent à plusieurs reprises, dont une fois à la tête.

Le tireur avait pris soin d'entailler la balle pour qu'elle se scinde en deux. Également blessé, son passager parvient à s'enfuir.

Messagerie cryptée

A l'époque, les malfaiteurs bisontins, comme de nombreux groupes criminels français et européens, échangent librement via la messagerie téléphonique cryptée Sky ECC, se croyant à l'abri des écoutes policières.

Mais en 2019 une enquête sur ce réseau est ouverte à Lille, puis confiée à des juges parisiens spécialisés dans la lutte contre la criminalité organisée. L'ensemble des conversations concernant cet assassinat est alors déchiffré et transmis aux enquêteurs de la police judiciaire et de la sûreté départementale de Besançon.

Le décryptage de ces échanges et les investigations permettent d'identifier le tireur et le conducteur de la voiture. Les investigations ont mis également en cause cinq hommes soupçonnés d'avoir participé au crime à des degrés moindres. Ils seront jugés ultérieurement.

L'assassinat du jeune mécanicien de 22 ans, totalement étranger au trafic de stupéfiants, marque l'épilogue de cinq mois d'intimidations et d'affrontements armés entre deux bandes rivales, les clans «Mordjane» et «Abdou», qui se disputaient le contrôle du marché de la drogue dans le quartier sensible de Planoise entre novembre 2019 et mars 2020.

Outre la mort de la victime, ces règlements de comptes emblématiques de l'émergence de trafiquants ultra-violents et de plus en plus jeunes dans les villes moyennes de France, ont fait une douzaine de blessés, âgés de 14 à 31 ans. Une cinquantaine de membres des deux clans ont été condamnés à des peines allant jusqu'à dix ans d'emprisonnement.