L'ex-leader franco-suisse d'une communauté protestante dans les Pyrénées (sud-ouest de la France) a été condamné vendredi à cinq ans d'emprisonnement, dont deux avec sursis, pour viols sur deux anciennes adeptes et abus de faiblesse, par une cour criminelle.
Keystone-SDA
24.01.2025, 18:50
ATS
L'homme, libre sous contrôle judiciaire depuis 2019, après avoir effectué une année de détention provisoire, ne retournera pas en prison car le reste de la peine d'emprisonnement ferme, à savoir deux ans, peut être aménagé. Il a également été condamné à sept ans de suivi socio-judiciaire.
L'avocat général avait requis 15 ans de réclusion criminelle.
L'une des avocates des parties civiles, Jasmine Medjebeur, a qualifié la peine prononcée d'«assez clémente», ajoutant: «Il a quand même été reconnu coupable de viols, de toute l'emprise et des horreurs sur la vie des gens».
De son côté, l'un des avocats de la défense, Alexandre Parra-Bruguière, s'est dit «déçu par la condamnation pour viol, mais satisfait de la peine» prononcée.
«Dérive sectaire»
Dans son réquisitoire, l'avocat général Pierre Aurignac avait décrit une «sujétion psychologique et physique», un mécanisme d'«emprise», d'«ascendance» de l'accusé de 44 ans sur des membres de la communauté, installée dans un village des Pyrénées, et une «dérive sectaire».
«Il a non seulement profité de la vulnérabilité préexistante, mais il a créé, entretenu, une emprise sur chacune» de ses victimes, «il doit être condamné pour les viols» de deux membres de la communauté, a-t-il dit aux juges de la cour criminelle.
À la fin des années 2000, l'accusé, âgé de 28 ans, passé par la banque Rothschild avant de se lancer dans une quête spirituelle, sa compagne et plusieurs proches s'étaient installés à Ganties, petite commune rurale pour fonder «L'Espoir», une communauté d'inspiration protestante dissoute en 2016.
«Loup déguisé en agneau»
L'association «L'Espoir», qui a compté 80 à 90 membres à son apogée, avait justifié son auto-dissolution, dans un communiqué repris à l'époque dans le quotidien La Croix, en mettant en cause l'ex-gourou «fondateur et prédicateur de cette mission» qui «s'est malheureusement avéré être un loup déguisé en agneau».
Durant le procès, qui a débuté le 17 janvier, ce leader charismatique qui était appelé «l'apôtre», a nié les viols, affirmant que les relations sexuelles qu'il a eues avec des femmes de la communauté étaient librement consenties.
Puis il a cherché à convaincre qu'il avait changé. «Aujourd'hui, je travaille dans le sport santé avec ma femme qui est conseillère en nutrition. Je ne veux plus jamais mettre un pied en prison. Je veux rester auprès de mes enfants». La religion? «Je ne suis plus là-dedans».
«Le système mis en place (par l'accusé) est pervers et ne permet pas l'opposition», a plaidé Me Medjebeur, représentant les femmes qui l'ont accusé de viol. Il «s'est immiscé au plus profond de l'intimité des membres de la communauté», «c'est un prophète autoproclamé. Un berger qui garde ses brebis.»
Une autre avocate de la partie civile a évoqué des victimes «au parcours accidenté», qui représentaient des «proies idéales».
«Il ne les a pas violées», a en revanche martelé Sarah Nabet-Claverie, une avocate de la défense, mettant en avant «les lettres d'amour» que ses «victimes présumées» lui écrivaient, l'appelant «mon prince».
De son côté, Me Parra-Bruguière a critiqué le travail des enquêteurs et souligné «le chagrin, les remords, la pénitence» exprimés devant la cour par un accusé «touchant de sincérité».
Son épouse et mère de leurs six enfants a minimisé dès l'ouverture du procès le rôle de son mari dans les dérives au sein de la communauté, même si elle a admis que ses prêches étaient parfois «trop durs, trop radicaux». Aux accusations de viols, elle a répondu «relations adultérines» consenties.