Une mère évoque l’horreur «Comme si c'était hier...» - 34 ans après le drame, elle attend des réponses

AFP

14.1.2025

Trente-quatre ans jour pour jour après son enlèvement à Mulhouse (Haut-Rhin), la justice enquête toujours sur l'affaire Anaïs Marcelli, une petite fille de 10 ans dont le corps avait été retrouvé trois mois plus tard dans les Vosges, un cold case pour lequel un appel à témoin a été lancé récemment.

La justice enquête toujours sur l'affaire Anaïs Marcelli.
La justice enquête toujours sur l'affaire Anaïs Marcelli.
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Ce 14 janvier 1991, Anaïs Marcelli rentre de son école rue du Nordfeld, dans le centre-ville de Mulhouse, quand elle disparaît. Malgré d'importantes recherches la petite fille reste introuvable, jusqu'à ce qu'un promeneur ne retrouve son corps trois mois plus tard, le 21 avril 1991, au col de Bussang, à une quarantaine de kilomètres.

La fillette était morte depuis longtemps. Son corps était caché par un tas de pierres, dans un état bien conservé en raison des températures froides de l'hiver. Le médecin légiste avait établi une probable mort par strangulation à mains nues, sans violence sexuelle.

«C'était un lundi, le 14 janvier 1991. Je m'en rappelle comme si c'était hier, surtout que la veille, le dimanche, je m'étais un peu fâchée avec Anaïs pour une histoire de devoirs. Elle n'était pas contente et m'avait dit que c'était le pire jour de sa vie», se rappelle Martine Mercklen, sa maman, aujourd'hui âgée de 71 ans.

«Ce soir-là, je me suis dit que j'avais un peu d'avance (après mon travail) et que je pouvais aller à sa rencontre. Mais finalement j'avais de la paperasse à faire et je me disais qu'elle allait arriver... J'aurais dû m'écouter, écouter mon instinct. J'y pense souvent».

D'Anaïs, Martine Mercklen garde son sourire et une boîte en forme de cœur: «J'y ai mis plein de petites choses qu'elle aimait. Anaïs était lumineuse, adorait ce qui était beau, la décoration. Elle était très coquette. Elle adorait regarder la télévision et avait même un film fétiche, +Le Grand Chemin+, avec Richard Bohringer et Anémone. C'est marrant, sur l'affiche du film il y a une petite fille, on dirait Anaïs. Anaïs est toujours en moi, je lui parle comme si elle était là. C'est ma manière de la faire vivre».

«Troublantes contradictions»

L'enquête s'était penchée dans un premier temps vers le grand-père de la petite-fille, beau-père de Martine Mercklen. Le parquet évoquait alors «les troublantes contradictions quant à l'emploi du temps du grand-père», et relevait les «relations troubles ayant existé entre la mère d'Anaïs et son beau-père (attouchements), alors qu'elle était âgée de 12 ou 13 ans». «Les éléments recueillis dénotent un comportement sexuel pervers de ce proche direct d'Anaïs».

Toutefois, le suspect, placé en garde à vue, n'avait jamais été mis en examen. Il est décédé en 2022. Un non-lieu avait été rendu en 1997, l'enquête rouverte en 2015.

Beaucoup de pistes avaient été lancées, aucune n'avait abouti: Francis Heaulme, Michel Fourniret , un pédophile néerlandais du nom de Michel Stockx, Jean-Pierre Treiber... De nombreux suspects avaient été envisagés par les enquêteurs. En juillet 2022 le parquet de Mulhouse s'est dessaisi de l'affaire au profit de la nouvelle juridiction nationale spécialisée dans les affaires non résolues, à Nanterre.

«Un espoir nouveau»

«Je n'aimerais pas partir sans connaître la vérité», reprend Martine Mercklen. «Le dossier qui a été repris à Nanterre c'est un espoir nouveau. J'ai rencontré la juge d'instruction et il y a eu une vue des lieux en juillet dernier. Elle est venue en Alsace avec des enquêteurs. C'était la première fois que je retournais rue du Nordfeld et au col de Bussang. Je ne pensais pas que ce serait aussi douloureux... Comme si c'était hier».

«Aujourd'hui je sais qu'avec les nouvelles méthodes d'investigations on pourra peut-être fermer des portes et trouver le coupable. Pour ma part je reste convaincue qu'il y a des choses à chercher du côté de Michel Fourniret».

En lien avec le pôle judiciaire de Nanterre, l'avocate de Martine Mercklen, Aurélie Jaafar, a obtenu un numéro de téléphone pour un appel à témoins (0800.35.83.35) et une adresse mail (temoignage-ocrvp@interieur.gouv.fr).

«Je me suis toujours dit que jamais je ne survivrais à ça et pourtant, 34 ans après je suis là, sans doute portée par Anaïs. Elle n'aurait jamais voulu que je baisse les bras», conclut Mme Mercklen.