Interview Camille Grenu: «La télévision n’est pas épargnée par le virus»

Camille Grenu est présentatrice sur France Info, la chaîne tout info de France Télévisions, lancée en 2016. Elle officie les samedis et dimanches, de 6h à 10h. Fidèle au poste malgré l'épidémie qui sévit, elle nous raconte ce que le coronavirus a changé.

Quel est votre rythme de travail?

Je me lève à 2h du matin pour arriver peu avant 3h au siège de France Télévisions. Depuis le début du confinement, nous n’avons plus de coiffeur et de maquilleur, nous nous préparons nous-mêmes. Ensuite, j’écris pour mes 4 heures d’antenne et je commence la présentation de la tranche info à 6 heures du matin. Nous sommes en binôme.

Y a-t-il beaucoup de cas de Covid 19 positifs au sein de France Télévisions?

Cela change de jour en jour. La direction communique très clairement dessus, en donnant régulièrement le nombre de personnes contaminées, guéries, etc. France Télévisions est une grande rédaction, avec des antennes régionales et de nombreux journalistes, dont certains sont placés à l’isolement. En toute logique, la télévision n’est pas épargnée par le virus.

Qu’est-ce que le virus a changé dans votre façon d’exercer?

On se doit de montrer l’exemple. On ne peut pas faire comme si de rien n’était, alors que les Français sont confinés. Je suis choquée de voir certaines autres chaînes d’information qui ont 5 ou 6 invités en plateau. La direction de l’information de France Info a décidé de ne plus faire d’interviews avec des invités présents en plateau. Aujourd’hui, on ne fait que des interviews vidéo, par Skype. On limite le nombre de personnes présentes physiquement au siège de la télévision.

Et dans la manière de présenter?

Auparavant, les deux présentateurs lançaient les journaux, côte à côte. Maintenant, ils sont à bonne distance l’un de l’autre. Le présentateur ne s’avance plus vers les chroniqueurs. Les techniciens en régie portent des masques, car ils ne peuvent pas respecter une distance de sécurité dans un espace aussi étroit. Depuis quelques jours, toute personne qui doit physiquement travailler sur le site de France Télévisions se voit distribuer 2 masques par jour sur présentation de son badge. Sur le terrain, les journalistes se tiennent à bonne distance des gens qu’ils interviewent. On a vu réapparaître les micros au bout d’une longue perche…

Cette période est propice aux fake news. Comment luttez-vous contre ce phénomène?

Les périodes de stress intense sont propices aux rumeurs les plus folles, aux arnaques en tous genres… Les journalistes démêlent le vrai du faux. En ce moment, les téléspectateurs reprochent aux médias d’être anxiogènes. Ils regardent la télévision pour avoir des informations pratiques et être rassurés. On recueille leurs questions, on y répond. Par exemple, «ai-je le droit de sortir avec mon conjoint en voiture?». On tente de répondre à leurs interrogations, tout en délivrant des informations factuelles. Notre équipe des modules s’attèle à débusquer les fake news et à remettre les choses au clair avec des experts. On travaille aussi sur l’aspect «feel good» du confinement: les histoires de guérisons, les artistes qui font des concerts depuis chez eux, les sketchs d’humoristes, les recettes des chefs cuisiniers… On est là aussi pour donner des informations qui font du bien!

Et sur le terrain, comment le travail des reporters a-t-il évolué?

Seuls 15% des effectifs de France Télévisions ne sont pas en télétravail. La direction de l’information a mutualisé les éditions de France2 et de France3, le midi et le soir. Ce qui permet de garder une équipe de réserve, au cas où certains tombent malades, et d’assurer la continuité du service public.

Quelle est la signature de la chaîne France Info?

Le sérieux, la vérification des informations et l’interactivité. Dans les derniers sondages, nous sommes la chaîne d’info en qui les téléspectateurs ont le plus confiance. Le site internet est très apprécié aussi, les connections ont explosé depuis le début du confinement. On répond aux questions, aux demandes de précisions… Sur l’usage de la chloroquine par exemple, on a donné la parole à des experts qui ont différents points de vue. C’est ça aussi la marque de fabrique de cette chaîne d’information!

CoronavirusPas de «retour à la normale»