Novak Djokovic est à nouveau le meilleur joueur du moment – et le meilleur de l'histoire ? Les chiffres parlent en faveur du Serbe, mais le coeur a ses raisons...
La consigne du directeur du tournoi Craig Tiley avant le début de l'Open d'Australie était claire et nette: quiconque sifflerait Novak Djokovic serait exclu du site. Pour Roger Federer ou Rafael Nadal, une telle précaution n'a jamais été nécessaire. Mais le meilleur joueur du moment n'est pas le plus aimé, et cela le ronge.
Deux choses sont importantes aux yeux de Novak Djokovic: les records et l'amour des gens. Dans le premier domaine, il connaît un succès phénoménal. Dimanche à Melbourne, il a remporté son 22e titre du Grand Chelem pour égaler Rafael Nadal. Dans le second domaine, il n'est définitivement pas au top en dehors des Balkans.
«C'est un fait que dans 90% des cas, je ne joue pas seulement contre un adversaire, mais aussi contre le stade», avait souligné un jour Djokovic à Wimbledon. «Je suis habitué à cela, mais je ne suis qu'un être humain. Parfois, je me mets en colère quand on me provoque». Pourtant, il y a de nombreuses raisons d'apprécier le Serbe.
Aimable, éloquent, drôle
Amical, éloquent, éloquent, drôle, accessible. Contrairement à Rafael Nadal, 14 fois sacré Roland-Garros, Djokovic s'exprime en français à Paris, en italien à Rome, et même un peu en allemand de temps en temps, et dans un excellent anglais partout dans le monde. Il s'efforce de répondre à tous ses interlocuteurs et, après le dernier match de l'année aux ATP Finals, il a souvent gratifié les journalistes de chocolats – même après une défaite.
Les qualités d'athlète et de compétiteur de Djokovic n'ont de toute façon pas besoin d'être discutées, il n'y a guère de plus grand athlète, tous sports confondues. Mais alors que sur le terrain, il ne commet plus guère d'erreurs non provoquées dans les moments décisifs, il en commet régulièrement dans la vie de tous les jours. «D'une certaine manière, ces choses semblent s'accumuler ces dernières années», a-t-il déclaré à Melbourne, un peu perplexe.
Bien intentionné, mal reçu
Chez Novak Djokovic, les gestes soi-disant positifs se transforment (trop) souvent en gestes négatifs. Lorsqu'il se tourne dans les quatre directions dans le stade et qu'il déverse symboliquement son cœur avec ses mains, cela semble quelque peu artificiel. Lorsqu'il crie ses émotions après un point important, il n'a pas l'air d'un combattant sympathique, mais plutôt martial. Lorsqu'il veut générer une possibilité de jeu pour ses collègues pendant la pause due au Covid-19, cela dégénère en événement «superspreader».
Novak Djokovic refuse d'ailleurs de se faire vacciner contre le Covid-19, ce qui a fait de lui l'une des icônes des opposants à la vaccination. Croyant avoir obtenu une dérogation, il s'était rendu en Australie l'an dernier mais avait été expulsé dans un véritable cirque médiatique et judiciaire. On peut admirer la cohérence de son attitude, mais pour la plupart des gens, elle est têtue et incompréhensible.
Douze mois plus tard en Australie, tout s'est vraiment bien passé, le Serbe ayant été majoritairement accueilli de manière amicale ou du moins respectueuse. Jusqu'à ce que son père Srdjan ne trouve rien de mieux que de se faire filmer en train d'exulter avec des fans brandissant des drapeaux de Poutine et exhibant des insignes de guerre. Si ces contretemps ne font que stimuler Djokovic, ils ne lui ouvrent en revanche pas le cœur du public.
Trop dominant pour être aimé ?
Il est significatif que Nole a rarement reçu plus d'amour de la part des fans dans un stade que lors de la finale de l'US Open 2021 lorsque, avec l'opportunité de réaliser le Grand Chelem calendaire – ce que ni Federer ni Nadal n'ont réussi à faire – il s'était pour une fois effondré mentalement et avait été déclassé par Daniil Medvedev.
Il semble que Novak Djokovic ne puisse pas avoir les deux: le succès et l'amour du grand public. Ce qui est d'autant plus amer pour lui, c'est que Roger Federer et Rafael Nadal y sont en revanche. Cela doit d'ailleurs être d'autant plus doux pour lui d'arracher un record après l'autre aux deux favoris du public.
ATS