A 30 ans, Marc Rochat va vivre sa première expérience aux Championnats du monde dimanche en slalom à Courchevel. Le Vaudois s’est dit «très serein et tranquille» à l’approche de la course. «J’ai juste le plaisir de vivre mon rêve et de me battre contre les meilleurs du monde», a reconnu le Lausannois.
Marc Rochat va s’élancer dimanche dans le grand bain. A 30 ans, le Vaudois qui a découvert le ski à Crans-Montana entend prendre un maximum de plaisir pour son premier slalom aux Mondiaux. Et contrairement à ses compatriotes Loïc Meillard, Daniel Yule et Ramon Zenhäusern, il sait que les attentes autour de lui seront moindres. «Pour moi, c’est nettement plus facile qu’un athlète qui a le poids de la nation sur les épaules», a-t-il avoué.
Son ticket pour le rendez-vous planétaire de Courchevel-Méribel, il l’a obtenu de haute lutte - et aux dépens de son «plus vieil ami en ski», Luca Aerni - grâce à ses 7e et 9e places à Garmisch-Partenkirchen et à Adelboden. Une sacrée récompense pour le Lausannois dont la carrière a été freinée par des nombreuses blessures. Ces moments «de doute et de tristesse», il a su s’en servir à son avantage.
«Le simple fait de pouvoir me remettre constamment en question m’a aidé à avancer, en tant que personne, pas uniquement qu’en tant qu’athlète. Aujourd’hui, j’ai pleinement conscience du chemin que j’ai parcouru, avec des hauts et des bas. C’est une arme dont je peux bien me servir», a raconté Rochat, qui n’est «pas non plus en vacances» à Courchevel. Entretien.
Marc Rochat, comment vous sentez-vous à quelques heures de disputer vos premiers Mondiaux ?
«Franchement, aucune pression. J’étais juste un peu inquiet, car j’avais mon dos qui m'embêtait ces derniers jours. J’ai dû un peu serrer les dents les dix derniers jours d’entraînements car j’avais pas mal de matériel à tester. Mais là, j’ai eu deux jours de coupure totale. Ça m'a permis de me reprendre et là, je me sens vraiment bien. Samedi, on s’entraîne sur le haut du géant, puis ensuite départ !»
Le dernier slalom en Coupe du monde remonte à début février. Comment avez-vous gérer cette période sans compétition ?
«Après Chamonix, je suis sorti du rythme parce que c’était pénible pour moi les dix derniers jours avant la course. Tout le monde disait que j’étais déjà qualifié, ce qui n’était vraiment pas le cas. Ce n’était pas drôle non plus. Se battre contre mon ami Luca (Aerni, pas retenu pour les Mondiaux), ce n’est pas des moments drôles. La pression a donc un peu chuté après Chamonix, ça m’a fait du bien. J’ai pu me changer les idées. On a été faire un peu de géant en Valais, au soleil, sur des neiges faciles. Chose qu’on n’avait plus vraiment l’habitude (rires). Ça fait du bien, c’était plus de la thérapie que de l’entraînement. Ensuite, on a repris le rythme en Italie, à La Thuile, sur une piste assez engagée comme ici pour tester le matériel et faire les derniers préparatifs avant la course. Maintenant, on est là avec l’équipe et on reprend le rythme.»
«C’est un honneur de représenter son pays aux Mondiaux»
retenu pour le slalom des Mondiaux
Qu’attendez-vous de la course de dimanche ?
«Ce n’est que du bénéf’. Au final, ce discours de dire qu’il y a uniquement les médailles qui comptent, c’est un peu de la merde pour moi. J’estime que le fait d’être là est déjà une belle victoire. Pour tout le monde, c’est un honneur de représenter son pays aux Championnats du monde. Pierre de Coubertin l’a bien dit, et ce n’est pas le dernier des idiots, l’importance est de participer. Du moment qu’on participe, on peut potentiellement gagner. Moi, je n’ai pas d’attente particulière vis-à-vis du résultat, ça dépend trop des autres. Par contre, je peux vous assurer que je vais faire mon maximum pour montrer mon meilleur ski sur la piste et démontrer que j’ai bien ma place ici.»
Pour jouer devant, il faudra prendre plus de risques...
«Je ne pense pas nécessairement prendre plus de risques. Le simple fait de pouvoir skier totalement libéré, comme à une course du ski club, c’est un avantage. J’estime que je peux montrer du très très bon ski dans cet état d’esprit.»
Avec vos résultats de ces derniers mois, on peut dire que vous êtes lancé ?
«Je ne sais pas si je suis lancé, mais les dernières courses avant les Mondiaux n’étaient pas faciles. On dit que les meilleurs sont sous pression parce qu’on attend une victoire. Je vous assure que d’être sur le siège éjectable, c’est, selon moi, plus difficile que de faire une 15e victoire quand on en a déjà 14 dans la poche. Je me suis retrouvé dans cette situation qui n’était pas facile. Cette année, j’ai fait de grands pas en technique, mais aussi d’un point de vue mental. Comme vous l’avez dit, je suis lancé. Ce n’est que du bénéf’, je m’amuse. Tout fonctionne et quand c’est ainsi, c’est chouette !»
«De pouvoir atteindre l’objectif d’une vie, ça efface tous ces moments difficiles»
qui va disputer ses premiers Mondiaux
Justement, vous avez gagné votre place pour les Mondiaux aux dépens de Luca Aerni, avec lequel vous skiez depuis longtemps...
«Je vais être le représentant de la Coupe du Wildhorn. J’ai une pensée pour lui, c’est mon cher ami, mon plus vieil ami en ski. J’aurais préféré me battre avec lui ici aux Mondiaux. Malheureusement, je suis le seul représentant du ski club au départ et je vais tâcher de lui faire honneur.»
Que représente pour vous cette participation aux Mondiaux ?
«Ça a représente 15 ans de travail. Ça représente peut-être 7 opérations. Ça représente des heures, des heures et des heures dans des salles d’entraînement où personne ne te regarde. Ça représente des moments de doute, des moments de tristesse, très peu de moments de joie au final. Parce que les carrières sportives sont difficiles. De pouvoir atteindre un objectif, qui est un objectif d’une vie - participer à un Championnat du monde n’est pas anodin -, ça efface tous ces moments difficiles. Je suis content d’avoir serré les dents toutes ces années et de m’être battu. Ça servira d’exemple aux jeunes, qui ne sont peut-être pas les meilleurs à leur âge, que si on travaille dur, qu’on veut vraiment y arriver, il y a toujours une chance pour tout le monde.»
Concrètement, quel objectif vous êtes-vous fixé pour dimanche ?
«Ouvrir le portillon sincèrement ! Comme je l’ai dit, bien sûr que les médailles comptes et sont importantes, mais le parcours que j’ai eu est plus important. Attention à un Rochat qui est libéré !»