Le monde de l'escrime a approuvé vendredi le retour en compétition des athlètes russes et bélarusses lors d'un congrès extraordinaire de la Fédération internationale d'escrime (FIE) à un an et demi des Jeux olympiques de Paris, une décision qui a provoqué la colère de l'Ukraine.
Les tireurs russes et bélarusses pourront donc prendre part aux épreuves du circuit mondial, qualificatives pour les JO-2024 (26 juillet-11 août), qui commencent début avril 2023 sans préjuger de leur participation à l'évènement.
L'escrime devient ainsi le premier sport à réintégrer sous bannière neutre les athlètes en provenance des deux pays, un an après leur exclusion en raison de la guerre en Ukraine.
La décision de la FIE, qui concerne les épreuves individuelles et par équipes, laisse quand même la main au CIO puisqu'elle sera effective à partir d'avril 2023 «sous réserve d'éventuelles recommandations/décisions futures du CIO», a-t-on appris auprès d'une fédération nationale ayant participé au congrès extraordinaire.
Les membres de la FIE, réunis en congrès extraordinaire à Lausanne vendredi, ont voté à environ 65% en faveur du retour des athlètes, équipes et officiels des deux pays, selon cette source ne souhaitant pas être identifiée.
«Premier pas»
«Le premier pas est fait. Je suis reconnaissant envers les collègues des fédérations étrangères», s'est félicité Ilgar Mamedov, le président de la Fédération russe d'escrime, cité par l'agence de presse Ria Novosti.
«Il n'y a qu'une seule réserve, la réintégration ne se fera pas avant la mi-avril», a-t-il précisé.
De son côté, la Fédération ukrainienne a réagi dans un communiqué: «Nous sommes profondément choqués et indignés par cette décision et nous convoquons immédiatement une réunion du Présidium pour décider de notre réponse à la décision de la FIE et de son éventuel appel».
«Pendant le week-end, nous consulterons les membres de la Fédération, les athlètes, les entraîneurs, le Comité olympique national et le ministère des Sports», a ajouté l'organisation ukrainienne.
Avant ce vote, la Fédération ukrainienne avait formulé une demande pour exclure de l'ordre du jour le sujet de la réintégration des athlètes russes et bélarusses, mais sa requête n'avait pas recueilli les suffrages nécessaires parmi les 136 votants.
L'instance internationale a dû se positionner en raison de l'imminence du début de la phase qualificative pour les JO de Paris, qui s'étaleront jusqu'au printemps 2024, avec huit étapes de Coupe du monde, un championnat d'Europe et un championnat du monde leur permettant de cumuler des points jusqu'au 31 mars 2024, avant des épreuves complémentaires par zone géographique.
Ce système complexe, qui aboutit à un classement individuel et par équipes, rend particulièrement importante la performance collective: pour chaque arme (sabre, fleuret et épée) et genre, les quatre meilleures nations, ainsi que quatre autres qualifiées par continent, peuvent ainsi s'aligner aux Jeux olympiques.
Hostilité européenne
Les tireurs russes, parmi les meilleurs au monde, avaient décroché trois médailles d'or (huit au total) lors des JO de Tokyo, alors qu'ils concouraient sous la bannière du comité olympique russe.
Le classement mondial est donc pour l'heure chamboulé par l'absence de certains de ses plus grands noms, qui auront l'occasion de se replacer avant le rendez-vous olympique parisien de l'été 2024, si le CIO autorise leur venue.
Leur retour en compétition pose un premier jalon en vue de la participation aux Jeux des deux délégations alors que l'hostilité à leur retour vient principalement d'Europe, notamment des alliés traditionnels de Kiev comme la Pologne et le Royaume-Uni.
Le Conseil olympique d'Asie a déjà proposé de les réintégrer, et les comités olympiques africains ont voté samedi dernier pour leur participation aux JO de Paris, alors que la position du CIO reste floue, un an après une claire «recommandation» d'exclusion des Russes et Bélarusses dans la foulée de l'invasion de l'Ukraine.
Sollicité vendredi par l'AFP, le CIO n'a pas répondu.
L'escrime ajoute à ce rapport de forces géopolitique un facteur supplémentaire: celui de l'influence russe au sein des instances, puisque la FIE a été dirigée pendant 14 ans par l'oligarque Alicher Ousmanov, qui a laissé il y a un an l'intérim au Grec Emmanuel Katsiadakis.