Les droits des sportifs ukrainiens ont été ignorés par le CIO et par la rapporteure spéciale de l'ONU dans le domaine des droits culturels Alexandra Xanthaki, chargée d'évaluer la réintégration de la Russie et du Bélarus, selon une universitaire spécialiste des droits humains.
«La question est de savoir si les conditions de réadmission proposées sont suffisantes pour garantir le respect des droits humains des sportifs ukrainiens», a expliqué jeudi Patricia Wiater, lors d'une conférence de presse en ligne, deux jours après la recommandation du CIO de réintégrer les sportifs russes et bélarusses, bannis depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie.
«Sont-elles proportionnées et sont-elles suffisantes pour empêcher (que) les événements sportifs ne soient pas utilisés à des fins de propagande de guerre?», a-t-elle ajouté lors de cette conférence à laquelle des sportifs, ukrainiens et d'autres nationalités, ont également participé.
«Malheureusement, cela n'a été abordé ni dans la déclaration du CIO, ni par la rapporteure spéciale (de l'ONU sur les droits culturels, Alexandra Xanthaki, ndlr), alors que c'est très important lorsqu'il s'agit d'examiner la question de la réadmission», a déploré Patricia Wiater, à l'origine de l'avis du Comité olympique allemand favorable à l'interdiction des athlètes russes et bélarusses.
«Nous parlons de la vie»
La commission exécutive du CIO a recommandé mardi la réintégration des Russes et Bélarusses dans les compétitions sportives internationales, sous bannière neutre et «à titre individuel», pour peu qu'ils n'aient pas activement soutenu la guerre en Ukraine.
Alors que l'Ukraine, la Pologne et les pays baltes menacent de boycotter les JO 2024 en cas de présence de sportifs russes et bélarusses, la commission a précisé qu'elle déciderait «au moment approprié» de leur éventuelle participation aux Jeux de Paris.
Plus tôt dans le mois, la Fédération internationale d'escrime avait devancé la recommandation du CIO en rouvrant ses épreuves aux athlètes des deux pays.
Cette décision avait entraîné l'envoi au CIO d'une lettre signée par plus de 300 escrimeurs actuels ou retraités, demandant à Thomas Bach – lui-même champion olympique en fleuret par équipes en 1976 – et au président par intérim de la Fédération Emmanuel Katsiadakis, de «maintenir» l'exclusion des Russes et Bélarusses.
«Ici, nous parlons de la vie et pas seulement de la compétition», a déclaré l'escrimeuse allemande Lea Krüger, lors de la conférence de presse de jeudi, jugeant «insuffisantes» les conditions posées par le CIO.
«Extrêmement discriminés»
L'Ukrainienne Olga Kharlan – qui a remporté l'or olympique en sabre par équipes en 2008 – a déclaré qu'il serait «incroyable» que des Russes puissent être aux Jeux, mais pas des athlètes ukrainiens. «Nous devons faire tout notre possible pour que les Russes et les Bélarusses ne puissent pas participer à cause de leurs actions et de leur propagande», a déclaré la sportive de 32 ans.
«Pour moi, en tant qu'athlète, bien sûr, j'aimerais y aller. Cependant, en tant que citoyenne ukrainienne, il est difficile d'imaginer être assise à côté d'eux, de savoir qu'ils soutiennent la guerre ou qu'ils restent silencieux», a-t-elle déclaré aux journalistes. «Certains d'entre eux représentent l'armée qui bombarde l'Ukraine tous les jours.»
Si World Athletics et son président Sebastian Coe ont été félicités pour avoir interdit aux athlètes russes et bélarusses de concourir, d'autres fédérations internationales et instances ont été fustigées. La joueuse de tennis ukrainienne Marta Kostyuk (38e mondiale) s'est dite étonnée de la réponse de la WTA lorsqu'elle et ses compatriotes ont déclaré qu'ils ne joueraient pas contre des adversaires russes.
«Leur réponse a été +nous allons geler votre classement et une fois la guerre terminée, vous pourrez reprendre la compétition+», a raconté la joueuse de 20 ans. «C'est ridicule à entendre. Nous nous sommes sentis extrêmement discriminés l'année dernière par différentes organisations, la WTA, l'ATP et la Fédération internationale», a-t-elle regretté.