Un duel de toute beauté en course entre Max Verstappen et Charles Leclerc mais des interrogations hors piste: l'avenir du Grand Prix d'Arabie saoudite pose questions.
Aux critiques sur la question des droits humains dans le royaume, où la F1 s'est installée l'an dernier, s'est ajoutée vendredi une attaque contre un dépôt pétrolier à proximité du circuit de Jeddah par les rebelles yéménites Houthis.
La sécurité est venue alimenter le débat sur l'opportunité de courir dans un pays contesté sur la scène internationale, une réalité qu'est venue rappeler l'exécution par l'État saoudien de 81 personnes accusées de terrorisme mi-mars.
«J'ai juste hâte de m'en aller. Je veux juste rentrer chez moi», a ainsi répété le septuple champion du monde britannique Lewis Hamilton (Mercedes) pendant cette deuxième manche de la saison, terminée à une modeste 10e place.
Hamilton ou encore l'Allemand Sebastian Vettel (Aston Martin) ont plusieurs fois évoqué la nécessité de mettre en lumière les problèmes dans les pays que la F1 visite et qui sont accusés de «sportswashing» – c'est-à-dire d'utiliser le sport pour redorer leur image. Hormis eux, toutefois, peu de pilotes s'étaient jusqu'alors exprimés sur le sujet.
«Des choses à clarifier»
L'attaque à Jeddah, à la veille du septième anniversaire de l'intervention de la coalition militaire dirigée par Ryad en soutien au gouvernement du Yémen face aux rebelles proches de l'Iran, a changé les choses.
Elle a provoqué un gigantesque incendie et un nuage de fumée noire visible depuis le circuit lors des essais libres 1.
Rapidement, les dirigeants du championnat et des écuries, conscients des aspects financiers d'une course dont la valeur est estimée à 900 millions de dollars sur dix ans, ont préféré maintenir le GP, après avoir «reçu l'assurance totale que, pour le pays, la sécurité est prioritaire», a expliqué le PDG de la F1, Stefano Domenicali.
Mais, pendant plus de quatre heures dans la nuit de vendredi à samedi, les pilotes ont discuté cette décision. Ils se sont finalement rangés derrière ce choix mais leurs langues se sont un peu déliées.
«Il y aura des choses à clarifier après ce week-end à propos de ce que nous allons faire par la suite mais, d'après ce que j'ai compris, tout était sous contrôle dans cette région spécifique», a expliqué le Britannique George Russell (Mercedes), directeur du syndicat des pilotes, la Grand Prix Drivers' Association (GPDA).
«On a tous décidé de courir mais, après ce week-end, il faudra reparler de toute la situation», a renchéri le champion du monde en titre, Verstappen (Red Bull).
Potentiel commercial
L'installation de la F1 dans plusieurs pays du Golfe (avec outre l'Arabie saoudite, Bahreïn, Abou Dhabi et le Qatar) montre l'intérêt croissant de la discipline pour cette région à fort potentiel commercial, malgré les critiques à répétition d'organisations de défense des droits humains.
«Nous ne voulons pas être politiques là-dessus mais je crois que nous jouons un rôle très important dans la modernisation de ce pays (l'Arabie saoudite, ndlr). Nous nous assurons que ce soit à l'ordre du jour de notre côté», s'est défendu Domenicali.
Avant ce Grand Prix, l'annulation en février du GP de Russie, après l'invasion russe de l'Ukraine, a montré tout le pouvoir d'action de la catégorie reine du sport automobile.
Autre événement du week-end, le violent accident de Mick Schumacher (Haas) en qualifications a ravivé les inquiétudes à propos de la sécurité du circuit urbain de Jeddah, très rapide et étroit.
La course devrait s'y tenir «quatre ans» encore, «le temps nécessaire pour construire le circuit de Qiddiya», proche de Riyad, où elle migrera par la suite, a estimé Martin Whitaker, PDG du Grand Prix.