Dominique Aegerter est en proie à des sentiments mitigés au sortir d'une saison qui l'a vu décrocher le titre mondial de Supersport et briller en MotoE. Ces performances n'ont cependant pas suffi à le propulser dans une catégorie supérieure.
Antichambre du Superbike (SBK), avec des motos proches des modèles de série destinés au grand public, le Supersport est le théâtre d'un Championnat organisé sur les mêmes circuits et durant les mêmes week-ends que le SBK.
Sacré champion du monde deux courses avant la fin de la saison, Aegerter (31 ans) espérait que ce titre en Supersport lui permettrait d'accéder à la catégorie supérieure ou de retrouver un guidon en Moto2, dans le championnat de vitesse sur lequel il avait fêté un succès en 2014, au GP d'Allemagne.
Etre Suisse, un handicap
Il n'en a rien été. Et pourtant, en parallèle à ses exploits en Supersport, le Bernois a aussi été à deux doigts de devenir champion du monde en MotoE. Seule une pénalité très controversée de 38 secondes lors de l'ultime manche l'en a empêché.
Alors, pourquoi Aegerter n'a-t-il pas été promu? «Tout d'abord, je suis heureux d'avoir obtenu un nouveau contrat avec mon team néerlandais Ten Kate (sur Yamaha RG) pour la prochaine saison en Supersport. Mais c'est vrai que j'espérais plus. Avoir réussi une super saison sans obtenir la reconnaissance dans les médias, qui n'en ont pratiquement pas parlé, représente une grande déception. Cela a touché mon ego et mes fans. Je m'attendais aussi à pouvoir revenir en Moto2 ou obtenir un guidon dans une équipe d'usine en Superbike.»
Interrogé sur les raisons de cette non-promotion, Aegerter pointe... son passeport helvétique. «La Suisse n'est guère intéressante pour le sport motorisé. Le marché est petit, nous n'avons pas de circuit, les sponsors ne se bousculent pas. Et pour la Moto2, mon âge a sans doute été un handicap, d'autant que j'ai déjà roulé dix ans dans cette catégorie. En Superbike en revanche, on trouve des coureurs de 34 ou 35 ans. On ne m'a pas donné ma chance.»
Reconnaissant envers Lüthi
Concernant son avenir en MotoE, Aegerter veut se donner encore un peu de temps pour décider s'il continuera à s'aligner dans cette catégorie, en plus du Supersport. Quatorze courses réparties sur sept week-ends sont inscrites au calendrier, toutes en Europe. Il conviendra de voir si c'est compatible.
A 31 ans, Aegerter vit chez ses parents, dans la maison familiale à Rohrbach. «Tout tourne autour du sport dans la famille. Les courses, la moto, la recherche de sponsors meublent nos discussions», explique-t-il. «J'ai bien gagné ma vie en Moto2, mais il y a aussi eu des moments où je n'aurais pas pu me payer de logement», a-t-il ajouté.
Interrogé sur une éventuelle jalousie envers Thomas Lüthi, Dominique Aegerter assure ne nourrir aucun sentiment de ce genre. Au contraire. «Je suis très content qu'il ait eu autant de succès. Sinon, en tant que pilote suisse, j'aurais rencontré encore plus de difficultés. Tom a fait vivre notre sport en Suisse et est à l'origine des retransmissions télévisées de moto. J'ai pu progresser dans son sillage.»
Aegerter assure que sa motivation est intacte. «L'adrénaline, la sensation de vitesse, vouloir être encore le meilleur, c'est ce que je recherche.»