«Au fond du gouffre», Manchester United est sorti de la cour des grands d'Europe avec un bonnet d'âne, bien loin de sa splendeur passée, sous la coupe d'un entraîneur dépassé et englué en outre dans un interminable processus de vente.
Le géant endormi aux trois Ligue des champions (1968, 1999 et 2008), celles de Bobby Charlton, David Beckham et Cristiano Ronaldo, a renoué avec la mauvaise face de son histoire, mardi, en terminant bon dernier de sa phase de groupes, comme en 2005/2006. C'est la quatrième fois seulement qu'un club anglais finit son aventure en C1 comme lanterne rouge.
Et au cours de la décennie écoulée, Manchester United n'a pas fait mieux qu'un quart de finale, en 2014 et 2019. Pire, les Red Devils version 2023 ont enchaîné quatre défaites en six matches, plombés une défense aux abois (15 buts encaissés, un record pour un club anglais) alors qu'ils terminent co-meilleure attaque du groupe (12 buts, comme le Bayern Munich).
«Saison d'horreur»
Finir derrière les bien moins riches Copenhague et Galatasaray, éliminé de toute compétition européenne, a fait réagir la presse britannique avec férocité. Le Times a ouvert ses pages Sports sur une photo du capitaine Bruno Fernandes, prostré, un poing à terre, avec ce titre : «Rock bottom», une expression signifiant «au fond du gouffre» et un clin d'oeil à «bottom», l'équivalent de «dernier» ou «lanterne rouge» dans le vocabulaire sportif.
«C'est un k.-o. européen pour United, une saison d'horreur qui prend une nouvelle tournure», a abondé le Daily Mail. Le Sun a insisté sur l'absence de Ligue Europa, le lot de consolation accordé aux troisièmes de groupe: «United n'est pas seulement éliminé, ils sont éliminés, éliminés».
Déjà sorti de la coupe de la Ligue, dont il était tenant du titre, Manchester United n'a plus qu'à jouer le championnat et la Coupe d'Angleterre, ce qui n'est pas forcément une mauvaise chose au regard de ses manques actuels. «Je pense que c'est le meilleur des pires scénarios», a résumé Rio Ferdinand, roc défensif des Red Devils dans les années 2000. «Je préférais sortir complètement de l'Europe pour me concentrer sur le championnat et remettre les joueurs en forme plutôt que de participer à la Ligue Europa et de devoir faire encore plus d'efforts».
Liverpool dimanche
A l'approche de la mi-saison, les Mancuniens pointent à la sixième place, avec Newcastle et Brighton dans le dos, et restent sur une humiliation 3-0 contre Bournemouth à la maison. Ils ont perdu 12 de leurs 24 matches, toutes compétitions confondues, soit le nombre de défaites concédées sur toute la saison passée (en 62 rencontres).
Cette dernière avait ressemblé à un début d'embellie pour Manchester, sous la coupe du nouveau venu Erik ten Hag, arrivé de l'Ajax avec une réputation flatteuse. Mais la deuxième saison de l'entraîneur néerlandais s'est assombrie à cause des mauvais résultats et des blessures, certes, mais aussi d'affaires extra-sportives (Antony, Mason Greenwood) et d'un conflit avec l'attaquant Jadon Sancho, mis à l'écart depuis septembre.
La sérénité n'est pas le point fort du club mancunien, cette saison, et ses propriétaires n'y sont pas pour rien. La famille Glazer a ouvert la porte à une cession totale ou partielle, mais le feuilleton s'étire depuis plus d'un an déjà, ce qui alimente la colère des supporters.
Ses derniers craignent le pire à l'approche du choc de dimanche à Liverpool (17h30), l'actuel leader de la Premier League, chez qui ils ont bu la tasse en mars (défaite 7-0). Pour contenir la marée rouge, ils ne pourront en plus probablement pas compter sur leurs défenseurs Harry Maguire et Luke Shaw, sortis blessés contre le Bayern mardi. Le calice, jusqu'à la lie.
AFP