«Une lourde responsabilité» Neuchâtel: Amoureuse des arbres, elle doit pourtant les faire abattre

js, ats

14.10.2024 - 09:47

Gaël Müller Heyraud, cheffe du service de l’environnement, de l’énergie, des parcs et forêts de Neuchâtel, est émue chaque fois qu'elle doit prendre la décision d'abattre un arbre. Elle a même soutenu, avec son équipe d’arboristes-grimpeurs, une opération de sauvetage de grande envergure d'un cyprès chauve dans le cadre du chantier des Jeunes-Rives.

Gael Mueller Heyraud, Cheffe du Service de l'environnement, des parcs, forets et domaines de la ville de Neuchatel pose devant le cypres chauve des Jeunes-Rives le vendredi 11 octobre 2024 a Neuchatel. (KEYSTONE/Jean-Christophe Bott)
Gael Mueller Heyraud, Cheffe du Service de l'environnement, des parcs, forets et domaines de la ville de Neuchatel pose devant le cypres chauve des Jeunes-Rives le vendredi 11 octobre 2024 a Neuchatel. (KEYSTONE/Jean-Christophe Bott)
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«Mais, vous aimez les arbres». Cette phrase de conseillers généraux lors d'une visite a choqué Gaël Müller Heyraud. L'architecte-paysagiste communale, en place depuis fin 2021, les aime tellement que son équipe d’arboristes lui a donné la possibilité de grimper tout en haut d'un séquoia. «C'était tellement magique que j’étais sur un petit nuage pendant deux semaines».

«Si l'on abat un arbre, c'est uniquement pour des raisons sanitaires et sécuritaires et que nous n’avons plus d'autre alternative», a déclaré Gaël Müller Heyraud dans un entretien à Keystone-ATS. «Nous avons une lourde responsabilité sur un territoire urbain où la sécurité est primordiale», a-t-elle ajouté. «Je dors mal chaque fois qu'il y a de forts vents par peur qu'un arbre tombe».

Le chantier des Jeunes-Rives a été particulièrement difficile. «Des collaborateurs ont même été insultés lorsque l'on a dû abattre des arbres dans le cadre du projet et pour des raisons sanitaires. Cela nous a également fait un choc, à nous, d'abattre les saules pleureurs qui faisaient partie du paysage de notre bord du lac, mais ils étaient malades, envahis par un champignon lignivore, le phellin, qui fragilisait leur développement».

Abattage de 61 platanes remis en question

Pour certains séquoias des Jeunes-Rives, une protection spécifique des racines (matelas pédologique) a été opérée et le bâtiment du futur restaurant a même été déplacé d'un mètre. Finalement, 28 arbres ont dû être abattus en raison du projet et 14 pour des raisons sanitaires. La Ville va replanter tous les arbres abattus, ainsi que 80 qui proviennent de la compensation liée à Expo.02, soit une centaine d'arbres.

Quant à l'abattage des 61 platanes du parking des Jeunes-Rives, «il est désormais remis en question. On préfère une transition sur le long terme avec un remplacement progressif de ces arbres», a expliqué Gaël Müller Heyraud.

Dans le cadre de ce chantier, l'architecte-paysagiste et son équipe ont choisi de déplacer un cyprès chauve, seul individu de son espèce sur le domaine public communal, âgé d'environ 30 ans. Sa valeur de compensation a été estimée à 25'000 francs. Une transplantation coûtant 25'000 francs, il a été décidé de le déplacer d'une dizaine de mètres, en prenant toutes les mesures nécessaires pour assurer son transfert.

«Cette opération nous a demandé plusieurs mois de préparation. Le jour J, la grue choisie finalement pour soulever le cyprès chauve a permis son transfert et maintenant il a refait des radicelles. L'arbre aura désormais toute la place pour se développer», a ajouté Gaël Müller Heyraud.

On taille moins et on creuse

Hors forêt, très importante sur le territoire communal, 60% du patrimoine arboré est en mains de privés. La commune de Neuchâtel a dressé un inventaire des arbres marquants (environ 300) et des arbres remarquables (environ 120) pour mieux les protéger.

Les 6000 arbres, que la commune gère sur le territoire urbain, sont introduits dans une base de données géoréférencées. Tout ce qui les concerne est mis à jour chaque année, lors de chaque intervention.

«La manière d'entretenir les arbres sur le domaine public a beaucoup changé. Auparavant, la taille en tête de chat, qui était très répandue, demandait une intervention annuelle, ce qui occasionnait des plaies, et ce qui rendait les arbres plus vulnérables aux attaques de champignon. Maintenant, on taille uniquement ce qui est nécessaire», a expliqué la spécialiste. La Ville a été pionnière en Suisse romande avec la création d’une équipe spécialisée et dédiée dans le soin aux arbres.

Gaël Müller Heyraud a aussi ajouté que le choix des essences et la manière de planter les arbres change avec le dérèglement climatique. «On choisit des essences qui résistent à la sécheresse. On creuse aussi des fosses plus grandes qui permettent de retenir l'eau de pluie».

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