Revue de presse La presse analyse le bilan d'Alain Berset, entre échecs et succès

ot, ats

21.6.2023 - 23:57

Alors que certains médias saluent son succès dans la gestion de la crise sanitaire et sa popularité auprès des Suisses, d'autres soulignent les défis non résolus tels que les coûts croissants de la santé et les réformes en suspens.

Alain Berset: «C'est le bon moment pour partir»

Alain Berset: «C'est le bon moment pour partir»

«J'ai informé le Conseil fédéral que j'ai prévu de quitter le gouvernement à la fin de cette année», a dit mercredi le président de la Confédération devant les médias à Berne.

21.06.2023

Keystone-SDA, ot, ats

Pour le journal fribourgeois La Liberté, le départ d'Alain Berset est somme toute logique. Et il arrive au bon moment: la population a accepté la révision de l'AVS et le sort du 2e pilier n'est plus entre ses mains.

L'échec de la réforme du système de santé est certes une ombre au tableau du Fribourgeois, «mais un autre ministre aurait-il fait mieux?», se demande la Liberté, qui rappelle que sa gestion de la pandémie a fait d'Alain Berset le conseiller fédéral préféré des Suisses.

«Quant à la médiatisation de ses affaires privées, elle aura certes malmené le premier de la classe, mais il s’en est sorti presque sans mal», juge le titre.

Avec ses capacités de compromis et son pragmatisme, Alain Berset a été l'un des conseillers fédéraux les plus puissants, juge Le Temps.
Avec ses capacités de compromis et son pragmatisme, Alain Berset a été l'un des conseillers fédéraux les plus puissants, juge Le Temps.
KEYSTONE

Pour le Parti socialiste, ce départ est «une bonne et une mauvaise nouvelle», relève encore La Liberté. C’est «l’assurance d’avoir de la visibilité durant toute la campagne pour les élections fédérales d’octobre, de profiler des personnalités».

La Bernoise Simonetta Sommaruga ayant été remplacée par la Jurassienne Elisabeth Baume-Schneider, les Alémaniques ne laisseront pas passer leur tour, prévoit encore le journal. «A moins que les résultats des prochaines élections viennent brouiller les cartes. Un nouveau succès des Verts et des Vert'libéraux suscitera immanquablement des vocations».

Le Temps:

Avec ses capacités de compromis et son pragmatisme, Alain Berset a été l'un des conseillers fédéraux les plus puissants, juge Le Temps. Qui souligne que le socialiste fribourgeois a aussi lancé mercredi la campagne pour les élections fédérales.

«Cette influence, dont il était très fier, il l'a aussi travaillée par son sens de la mise en scène», écrit l'éditorial du journal édité à Genève. Le titre relève ses capacités à sortir de la crise du Covid «malgré de très fortes pressions et des attaques d'une violence inégalée», ainsi que le succès de la révision de l'AVS.

Mais le Temps rappelle aussi les échecs d'Alain Berset, en particulier les coûts de la santé et les primes maladie qui n'ont cessé d'augmenter. Et sur le dossier européen, le socialiste «s'est caché», regrette le journal.

L'annonce de mercredi n'arrange pas les affaires du PS, analyse encore Le Temps. Les Vert.e.s ont déjà annoncé qu'ils revendiquaient un siège au Conseil fédéral. En décembre, la majorité de droite pourrait tout à fait élire un écologiste pour diviser la gauche, selon le journal.

Le site watson.ch:

Le départ d'Alain Berset du Conseil fédéral s'annonçait. Il n'avait plus rien à gagner dans cette fonction. Tout au plus peut-on s'étonner que l'annonce ait été faite avec six mois d'avance. On peut interpréter cela comme une faveur faite à son parti.

Le bilan de ses douze années à la tête du département fédéral de l'intérieur est limité, ce qu'il a reconnu indirectement. On peut se demander si Alain Berset aurait pu faire mieux. Mais en fin de compte, il a échoué à cause d'un mal bien connu: en matière de prévoyance vieillesse et de politique de la santé, il y a un blocage notoire des réformes.

Alain Berset est un politicien exceptionnellement intelligent et charismatique au regard des standards helvétiques. Avec la pandémie, il a dû gérer la plus grande crise que la Suisse ait connue depuis la Seconde Guerre mondiale. Il ne l'a pas fait de manière impeccable, mais la majorité de la population l'a soutenu. En tant que président de la Confédération, il a véritablement cherché ces derniers mois des apparitions sur la scène internationale. Peut-être qu'un nouvel emploi l'y attend.

Blick alémanique

Pour le Blick alémanique, «Alain Berset n'a pas vraiment obtenu grand-chose: son projet prestigieux, la réforme commune de l'AVS et des caisses de pension, a échoué devant le peuple. Les coûts de la santé, le deuxième grand chantier du département, continuent eux de croître.»

Certes, écrit l'éditorialiste, «Alain Berset a pu imposer des mesures d'économie – sur le prix des médicaments et, en partie, sur les tarifs médicaux. Mais là aussi, il manque un coup de pouce». «De manière cynique», dit-il, «on pourrait dire que le seul grand héritage est qu'un conseiller fédéral PS a relevé l'âge de la retraite des femmes à 65 ans».

Alain Berset a globalement bien géré la pandémie, «même s'il y a eu des erreurs de décision et des pannes» et «même s'il a été traité plus durement que jamais», reconnaît toutefois le journal. «Il a été pour le pays la boussole dont il avait besoin, comme le montrent de manière impressionnante les sondages de popularité. Même ses scandales et ses escapades, la population les lui a pardonnés».

Les titres de CH-Media:

La démission d'Alain Berset est un cadeau pour le parti. Le PS reçoit un coup de pouce pour les élections. Contrairement à l'élection de remplacement de Simonetta Sommaruga en décembre dernier, la direction du parti ne limite plus le champ des participants. Les politiciennes et politiciens de Suisse romande et de Suisse alémanique peuvent se présenter. Plus de têtes, plus de spéculations, plus d'attention.

En matière de mobilisation – et c'est l'enjeu des élections fédérales – le PS sera gagnant. Toutefois, l'élection du Conseil fédéral en décembre comporte aussi une part d'impondérable. Le siège d'Alain Berset sera attribué en dernier. Cela ouvre la voie à des petits jeux de la part des autres partis. Le PS doit défendre sa position de deuxième parti du pays – sinon, sa position deviendra inconfortable.

La Südostschweiz:

Alain Berset a conduit la Suisse à travers la période difficile de la pandémie tout à fait brillamment, il a fait accepter la dernière révision de l'AVS par le peuple, même si c'était de justesse, mais il n'a pas réussi à maîtriser les coûts de la santé à long terme. Il n'était pas le meilleur conseiller fédéral que la Suisse ait jamais connu, mais de loin pas le pire non plus.

On pouvait compter sur lui et sur sa politique: avec toute la retenue et la modestie suisses, c'est un éloge que les affaires privées ne viendront pas vraiment ternir.

Tages-Anzeiger

«(...) Quelqu'un s'en va qui donnait de plus en plus l'impression de se situer au-dessus. Sur qui la critique n'avait pas de prise. Qui a pu se permettre un nombre inhabituel de choses dans ce pays trop correct qu'est la Suisse. 'Coronaleaks', affaire de chantage, vol privé problématique (dans le ciel français): la pression n'a fait que s'amplifier récemment, mais Berset l'éloignait en souriant. Fort de son aura de 'ministre des crises'. (Mais) hormis son rôle dans la gestion de la pandémie, Alain Berset présente un bilan politique modeste. Même si, après des années de lutte, il a pu faire adopter l'automne dernier une réforme limitée de l'AVS. La réforme du 2e pilier se fait en revanche toujours attendre. Et les coûts de la santé explosent à nouveau (...).

NZZ

«C'est le bon moment pour s'en aller, après douze ans de fonction, a déclaré Alain Berset. (...) Mais dans la salle, il était clair pour les personnes présentes qu'Alain Berset avait manqué 'le bon moment' depuis un certain temps. Il aurait dû s'en aller après la levée des dernières mesures anti-Covid, au sommet de sa carrière et de sa force. (...) Aujourd'hui, il laissera le souvenir des affaires (de ces derniers mois), d'un Mitterrand en miniature à qui la Suisse romande a laissé passer plus de choses que la Suisse alémanique.»