Chute du «tyran» Les rebelles syriens annoncent la fin du règne d'Assad

ATS

8.12.2024 - 03:07

Les rebelles menés par des islamistes radicaux ont annoncé à la télévision publique syrienne la chute du président Bachar al-Assad et la «libération» de la capitale Damas. Leur offensive fulgurante a mis fin à plus de cinq décennies de règne de la famille Assad.

Des Syriens et des combattants célèbrent à Damas

Des Syriens et des combattants célèbrent à Damas

Des Syriens et des combattants célèbrent dans le centre de Damas après que les rebelles dirigés par les islamistes ont déclaré avoir pris la capitale syrienne.

08.12.2024

Keystone-SDA

Plusieurs dizaines de personnes ont rallié le centre de Damas pour célébrer la chute du régime, selon des images de l'AFPTV. Sur la place des Omeyyades, le bruit de tirs d'armes à feu en signe de joie se mêle aux cris d'Allahou Akbar Allahou Akbar» ("Dieu est le plus grand").

«On attendait ce jour depuis longtemps», a indiqué Amer Batha, joint au téléphone par l'AFP depuis la place des Omeyyades. «Je n'arrive pas à croire que je suis en train de vivre cet instant» lâche ce Syrien qui fond en larmes: «C'est une nouvelle histoire qui commence pour la Syrie».

A la télévision publique les rebelles ont annoncé la chute du «tyran» Bachar al-Assad et la «libération» de la capitale Damas. Dans leur communiqué, ils ont dit avoir libéré tous les prisonniers «injustement détenus» et appelé à sauvegarder les biens de l'Etat syrien «libre».

Localisation d'Assad inconnue

Ils avaient annoncé plus tôt sur l'application Telegram «la fuite» du président et proclamé «la ville de Damas libre».

«Assad a quitté la Syrie via l'aéroport international de Damas avant que les membres des forces armées et de sécurité ne quittent» le site, a indiqué à l'AFP le directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), Rami Abdel Rahmane.

L'AFP n'était pas en mesure dans l'immédiat de confirmer de source officielle où se trouve le président qui a dirigé d'une main de fer la Syrie pendant vingt-quatre ans, réprimant en 2011 dans le sang de manifestations prodémocratie qui se sont transformées en guerre civile, l'une des plus violentes du XXIe siècle.

«Les événements extraordinaires» en cours en Syrie, sont suivis «attentivement» par le président américain, Joe Biden, selon la Maison blanche.

Fin d'une «ère sombre»

Depuis le début de leur offensive le 27 novembre dans le nord-ouest de la Syrie, les rebelles ont rapidement conquis plusieurs grandes villes clés, annonçant viser Damas et vouloir renverser le président syrien.

Ils ont lancé un appel «pour rentrer en Syrie libre» aux Syriens déplacés à l'étranger par le conflit qui a fait depuis 2011 un demi-million de morts, et a morcelé le pays en zones d'influence, avec des belligérants soutenus par différentes puissances étrangères.

Dans une vidéo publiée sur son compte Facebook, le Premier ministre syrien, Mohamed al-Jalali, s'est dit prêt à coopérer avec tout nouveau «leadership» choisi par le peuple, précisant qu'il serait dimanche matin dans ses bureaux au siège du gouvernement pour toute procédure de «passation» de pouvoir.

«Après 50 ans d'oppression sous le (parti au) pouvoir du Baas, et 13 années de crimes, de tyrannie et de déplacements, (depuis le début du soulèvement en 2011, ndlr) nous annonçons aujourd'hui la fin de cette ère sombre et le début d'une nouvelle ère pour la Syrie», ont ajouté les rebelles.

Le chef du groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS), Abou Mohammad al-Jolani, à la tête d'une coalition de rebelles soutenus par la Turquie, a appelé ses combattants à ne pas s'approcher des institutions publiques, ajoutant que celles-ci restaient sous contrôle du Premier ministre jusqu'à la «passation officielle»

Le Hezbollah libanais, soutien clé du pouvoir de Bachar al-Assad, a retiré parallèlement ses forces de la périphérie de Damas et de la région de Homs (ouest de la Syrie), selon la déclaration d'une source proche du mouvement à l'AFP.

Avancée spectaculaire

La coalition de groupes rebelles menée par HTS, un groupe issu de l'ancienne branche syrienne d'Al-Qaïda, a effectué en une dizaine de jours une avancée particulièrement spectaculaire, capturant les grandes villes d'Alep et Hama avant d'annoncer dans la nuit de samedi à dimanche avoir pris le contrôle de Homs, troisième ville du pays, et être entrée dans la capitale Damas.

Carte de Syrie montrant les principales villes prises par les rebelles entre la prise d'Alep le 1er décembre à celle de Damas la nuit du 7 au 8 décembre.
Carte de Syrie montrant les principales villes prises par les rebelles entre la prise d'Alep le 1er décembre à celle de Damas la nuit du 7 au 8 décembre.
AFP

Elle a notamment profité du retrait de plusieurs régions des forces gouvernementales face à l'offensive qu'elle a lancée à la surprise générale le 27 novembre à partir de la province d'Idleb, son fief dans le nord-ouest syrien, malgré des raids aériens menés avec l'allié du régime, la Russie, et des opérations au sol contre les secteurs insurgés.

Au sud de la capitale, près de la frontière jordanienne, les troupes gouvernementales ont également perdu le contrôle de la ville de Deraa, berceau du soulèvement de 2011, au profit de forces locales, selon l'OSDH.

Sur un autre front, dans la province de Deir Ezzor (est), les forces gouvernementales se sont retirées de territoires sous leur contrôle et les Forces démocratiques syriennes (FDS) dominées par les Kurdes s'y sont déployées.

Avec l'appui militaire de la Russie, de l'Iran et du Hezbollah, le pouvoir dirigé par M. Assad avait repris en 2015 une grande partie du pays et en 2016 la totalité d'Alep, dont la partie est avait été prise en 2012 par les rebelles.

Un cessez-le-feu instauré en 2020, parrainé par Ankara et Moscou, avait ramené un calme précaire dans le nord-ouest.