ContaminationsComment expliquer le nombre élevé de contaminations en Suisse romande ?
d'Anne Funk
11.3.2021
d'Anne Funk
11.03.2021, 13:46
11.03.2021, 17:09
Anne Funk
Alors que les premiers assouplissements sont entrés en vigueur et que d’autres sont envisagés, les taux d’incidence augmentent en Suisse romande. Mais pourquoi le virus se propage-t-il davantage dans cette région que dans le reste de la Suisse ?
Le calendrier de l’assouplissement des mesures de lutte contre le coronavirus a été fixé: si la situation épidémiologique connaît une évolution positive, de nouvelles étapes vers un retour à la normale pourront être franchies à partir du 22 mars. Cela concerne notamment la réouverture des restaurants. Mais cette décision dépend de certaines conditions. Des assouplissements ne seront possibles que si le nombre de reproduction effectif est inférieur à 1 et si le taux d’incidence suit une courbe descendante à partir du 1er mars.
Même si tous les espoirs sont permis, le bilan est mitigé à l’heure actuelle et ne laisse présager aucun assouplissement. Pour la deuxième semaine consécutive, le nombre de contaminations a augmenté. Il est vrai que certains cantons sont sur la bonne voie – comme Berne, avec un taux d’incidence sur 14 jours de 116,9 cas pour 100 000 habitants. La situation est cependant différente ailleurs, notamment en Suisse romande, comme le montre le graphique suivant de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP):
Dans le canton de Vaud, le taux d’incidence s’élève à 267 cas pour 100 000 habitants, soit deux fois plus qu’à Berne. Genève enregistre également 265,8 contaminations pour 100 000 habitants. Ces deux cantons ne font pas exception, puisque les cantons de Neuchâtel (231,7), du Jura (210,6) et de Fribourg (211) présentent également des chiffres élevés. A titre de comparaison, Schaffhouse figure actuellement en tête avec un taux d’incidence de 100,8 cas pour 100 000 habitants. A l’heure actuelle, la valeur globale pour la Suisse et le Liechtenstein est de 168,36 cas pour 100 000 habitants.
Interrogée par «blue News», la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS) confirme également que la situation est particulière en Suisse romande. «Il est exact que le taux d’incidence sur 14 jours dans les cantons de Suisse romande est supérieure à la moyenne suisse de 168 cas pour 100 000 habitants», indique l’organisme. Mais pourquoi précisément dans cette région? Selon la CDS, il est «pratiquement impossible d’en déterminer les raisons – et si oui, ce ne sera qu’avec un certain décalage dans le temps».
Interrogé par le «Tages-Anzeiger», Blaise Genton, médecin-chef du Centre universitaire de médecine générale et santé publique à Lausanne et responsable des centres de vaccination contre le Covid-19 du canton de Vaud, explique ces chiffres élevés par la mutation du virus qui circule actuellement. «Nous supposons que la hausse des contaminations est due à la circulation du variant britannique du virus.» Les mutations seraient déjà détectées dans 30 à 40% des échantillons.
Cependant, comme le souligne Nicolas Troillet, médecin cantonal adjoint en Valais et infectiologue, la recherche de mutations est beaucoup plus active en Suisse romande, ce qui explique également le nombre de cas comparativement élevé.
La Suisse romande était déjà un point chaud au cours de la deuxième vague
Il convient peut-être aussi de jeter un coup d’œil aux pays voisins: la France présente actuellement un taux d’incidence sur 7 jours de 219,2 cas pour 100 000 habitants. Dans le land allemand du Bade-Wurtemberg, ce chiffre n’est que de 60,7 cas. L’Autriche enregistre en revanche une valeur beaucoup plus élevée et pointe à 184 cas pour 100 000 habitants. En Italie, le taux d’incidence national sur 7 jours est de 240,9 cas pour 100 000 habitants.
Ainsi, des chiffres élevés dans les pays voisins se répercutent-ils dans les cantons frontaliers? Cela se vérifie en partie: si l’on peut effectivement émettre cette hypothèse dans le cas de la France et de l’Italie, les chiffres dans l’est du pays sont relativement bas – alors même que l’Autriche enregistre encore un nombre de contaminations comparativement élevé. En outre, il convient de garder à l’esprit que les voyages et le trafic frontalier sont toujours restreints: ainsi, la cause principale n’est certainement pas à rechercher dans les pays voisins.
Ce n’est pas la première fois que la Suisse romande devient un point chaud. La situation était déjà similaire au cours de la deuxième vague. A cette époque, la Suisse romande présentait également un nombre de contaminations élevé par rapport à la Suisse alémanique.
Comme le précise une analyse de la Swiss National COVID-19 Science Task Force, cela n’était pas dû à une propagation plus rapide du virus en automne par rapport à d’autres endroits, mais à un taux d’incidence plus élevé à la fin de l’été.
Les mesures doivent-elles être ajustées au niveau cantonal?
Les experts voient deux raisons possibles à cette situation. Premièrement, la Suisse romande a connu une augmentation un peu plus importante du nombre de cas durant l’été par rapport aux autres régions. Deuxièmement, le taux d’incidence était déjà très élevé en juin, alors qu’il était plutôt faible au niveau national.
Après le pic de la deuxième vague, le nombre de cas confirmés a diminué plus rapidement que dans le reste du pays, indiquent les experts. Malgré tout, précisent-ils, les mesures plus strictes de lutte contre le virus appliquées en Suisse romande par rapport aux autres cantons ont probablement joué un rôle décisif.
Compte tenu des chiffres actuellement élevés à l’échelle locale et des différences importantes entre les cantons, la question se pose à nouveau de savoir si un assouplissement au niveau national est encore de circonstance ou si des mesures plus strictes doivent être prises, comme ce fut le cas en automne.
La CDS a une opinion claire à ce sujet. «Pour ce qui est des mesures et de leur assouplissement, il nous semble judicieux pour le moment de privilégier une approche coordonnée au niveau national sans différenciation cantonale, étant donné les différences actuelles entre les régions», explique l’organisme à «blue News».