Santé La schizophrénie, une maladie toujours victime de préjugés

Relax

11.10.2024 - 21:04

Dangerosité, violence et dédoublement de la personnalité sont encore largement associés, à tort, à la schizophrénie, une des maladies mentales les plus sévères. Professionnels de santé, associations, artistes et malades œuvrent pour en finir avec ces idées fausses, qui pèsent sur la santé des patients.

Près de 600.000 personnes en France sont atteintes de schizophrénie.
Près de 600.000 personnes en France sont atteintes de schizophrénie.
Naeblys / Getty Images

La schizophrénie se manifeste par des troubles importants de la perception de la réalité – notamment des hallucinations -, par une désorganisation de la pensée, qui se traduit par un discours confus ou une agitation extrême, ou par une absence d'émotions ou de capacité à aller vers les autres qui peuvent entraîner l'isolement.

La maladie peut prendre des formes très différentes d'un individu à l'autre. Elle s'accompagne d'un risque de décès prématuré deux à trois fois plus élevé que dans la population générale, dû à des troubles somatiques, cardiovasculaires, métaboliques ou infectieux, et à un taux de suicide élevé, de 5 à 10%.

Une partie des médecins, des patients, de leurs proches et des associations engagées auprès d'eux dénoncent également un environnement délétère, façonné par une image très négative de la maladie qui pèsent lourdement sur le mental des malades.

A l'annonce «des diagnostics», «beaucoup de personnes sont dévastées», déplore la psychiatre Jasmina Mallet qui constate que les patients «s'auto-stigmatisent» pensant «qu'une personne qui a une schizophrénie est forcément violente» ou «va forcément rater sa vie».

Stigmatisation

C'est contre cette «stigmatisation» des personnes atteintes de schizophrénie, près de 600.000 en France, selon l'Assurance maladie, que le festival Pop & Psy, qui s'ouvre vendredi jusqu'à dimanche, veut oeuvrer.

Pour sa troisième édition sous le patronage de l'actrice Judith Godrèche, ce festival co-fondé par le psychiatre Jean-Victor Blanc et la journaliste Florence Tredez, y consacre une table ronde.

Cette pathologie reste «stigmatisée» et «associée à la violence», regrette Jean-Victor Blanc.

«C'est une idée que les gens se font à partir de choses qu'ils voient, qu'ils entendent» et ce «dans toutes les couches de la société», observe aussi Jean-Christophe Leroy, directeur de Positive Minders, association franco-suisse dédiée à la sensibilisation aux questions de santé mentale.

D'après une étude réalisée par Opinion Way pour l'association, encore trois Français sur quatre confondent schizophrénie et dédoublement de la personnalité et l'associent avec dangerosité.

Pour Positive Minders, la culture peut néanmoins être «un moteur de déstigmatisation».

Le rappeur Gringe a parlé publiquement il y a quatre ans de la schizophrénie de son petit frère, dans son livre «Ensemble, on aboie en silence».

Il est également le parrain de l'association La Maison perchée, où des volontaires, eux-mêmes atteints de troubles lourds, accueillent des jeunes malades.

«Ils sont en capacité de tenir le bon langage à ces jeunes gens qui peuvent être désemparés», a-t-il expliqué à l'AFP.

«Rétablissement possible»

Dans les nouvelles générations, la chanteuse Emma Peters, nommée aux Victoires de la musique 2023, consacre dans son nouvel album une chanson à «Juliette», une personne atteinte de schizophrénie, pour raconter «le monde à travers ses yeux».

La schizophrénie se soigne avant tout avec des médicaments. Même si on ne peut aujourd'hui pas guérir de cette maladie, un patient sur trois mène une vie normale avec un traitement adapté. Une prise en charge psychothérapique est souvent recommandée.

Donner «de l'espoir» et montrer que «le rétablissement» est possible, qu'«on peut s'en sortir»: c'est ce que veut apporter David Martinelli, lui-même atteint de schizophrénie et passé par «des moments difficiles».

Il a décidé de devenir «médiateur santé pair», diplôme réservé aux personnes elles-mêmes atteintes d'un trouble, pour lequel il suit à 41 ans une licence, et travaille à l'établissement de santé mentale de Rueil-Malmaison (Haut-de-Seine).

Jardinier dans une précédente carrière, il a désormais pour rôle de «soutenir l'équipe soignante» en apportant «un regard complémentaire» et en faisant l'intermédiaire entre patients et soignants.

A ses yeux, faire d'un parcours «assez traumatisant», semé d'hospitalisations, «parfois de force», «quelque chose d'aidant pour les autres, donne une cohérence».

«Si (…) ça sert, finalement, je ne suis pas passé par là pour rien».

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