Escalade à craindre? Quelle riposte israélienne possible à l'attaque iranienne?

ATS

2.10.2024 - 19:18

La promesse d'Israël de riposter à l'attaque massive de missiles menée mardi par l'Iran fait craindre une nouvelle escalade au Moyen-Orient, poussant des diplomates à chercher des moyens d'éviter une guerre régionale à grande échelle.

Des personnes brûlent un drapeau israélien alors qu'elles se rassemblent pour un rassemblement anti-israélien suite à une attaque de missiles menée par l'Iran contre Israël la nuit précédente, sur la place Imam Hussein à Téhéran, en Iran, le 2 octobre 2024.
Des personnes brûlent un drapeau israélien alors qu'elles se rassemblent pour un rassemblement anti-israélien suite à une attaque de missiles menée par l'Iran contre Israël la nuit précédente, sur la place Imam Hussein à Téhéran, en Iran, le 2 octobre 2024.
KEYSTONE

L'AFP s'est entretenue avec cinq experts sur les intentions de l'Iran et les potentielles options d'Israël pour une réponse.

Pourquoi l'Iran a-t-il tiré sur Israël?

Israël se bat sur plusieurs fronts au Moyen-Orient contre des groupes soutenus par l'Iran réunis au sein d'une alliance que Téhéran qualifie d'"axe de la résistance».

Celle-ci comprend le mouvement islamiste palestinien Hamas, le Hezbollah au Liban, les rebelles houthis du Yémen et d'autres groupes armés musulmans chiites en Irak et en Syrie.

Israël est en guerre contre le Hamas dans la bande de Gaza depuis un an et est accusé d'avoir tué en juillet son chef, Ismaïl Haniyeh, à Téhéran.

Au Liban, il affronte le Hezbollah, qui a ouvert un front contre Israël en soutien au Hamas. Israël est accusé d'être à l'origine des explosions meurtrières d'appareils de communication du mouvement islamiste à la mi-septembre et a mené une série de frappes aériennes au Liban qui ont affaibli le groupe.

Le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a été tué par un missile israélien dans la banlieue sud de Beyrouth le 27 septembre, en même temps qu'un général iranien.

Dans ce contexte, l'Iran a tiré mardi 200 missiles sur le territoire israélien, dont un grand nombre a été intercepté, selon Israël.

Il s'agit de sa deuxième attaque contre le pays. Le 13 avril, l'Iran avait déjà tiré 300 missiles et drones sur Israël, dont la quasi-totalité avait aussi été interceptée, en riposte à une attaque israélienne contre le consulat iranien à Damas.

D'après K. Campbell, un vétéran du renseignement militaire américain, l'attaque iranienne de mardi était «symbolique».

«Tous les systèmes de défense aérienne ont un point de saturation, et l'Iran semble être resté délibérément en dessous du point de saturation de la défense aérienne israélienne», a-t-il expliqué à l'AFP.

«Je ne pense pas que l'Iran veuille une grande guerre régionale», a déclaré pour sa part Jon Alterman, expert du Moyen-Orient au Centre d'études stratégiques et internationales à Washington.

Comment Israël pourrait-il réagir?

James Demmin-De Lise, écrivain et analyste politique, estime qu'Israël cherche à renforcer son avantage. «L'Iran est désormais très affaibli, car ses mandataires ont été décimés», a-t-il affirmé.

«Nous sommes sur le point d'assister à un changement de pouvoir assez spectaculaire», a-t-il ajouté. «Dans ce cas, je pense qu'Israël lancera des attaques décisives contre l'Iran, probablement dans l'espoir de renverser le régime islamique».

Mercredi, l'ancien Premier ministre israélien, Naftali Bennett, a appelé à une frappe décisive pour détruire les installations nucléaires de l'Iran.

Mais les forces israéliennes sont déjà engagées à Gaza, où plus de 41'600 Palestiniens ont été tués selon le ministère de la Santé dirigé par le Hamas, et au Liban, où les troupes mènent depuis lundi des incursions terrestres visant le Hezbollah.

«Israël a remporté de nombreux succès au cours des deux dernières semaines, qu'il ne voudrait pas compromettre», a estimé M. Alterman, ajoutant qu'Israël devrait choisir entre «s'accrocher à un gain ou redoubler d'efforts dans une stratégie qui a donné des résultats».

Quelle issue?

Face à l'escalade en cours, l'ONU est largement considérée comme inefficace et divisée.

Les Etats-Unis sont la seule puissance étrangère susceptible d'exercer une influence sur Israël, mais l'administration du président Joe Biden a montré qu'elle n'avait qu'une influence relative.

Au lendemain de l'assassinat d'Hassan Nasrallah, M. Biden a réitéré le soutien de son pays au «droit d'Israël à se défendre contre le Hezbollah, le Hamas, les Houthis et tout autre groupe terroriste soutenu par l'Iran».

Mais le président américain a également fait pression en faveur d'un cessez-le-feu à Gaza et s'est dit opposé à toute offensive terrestre israélienne au Liban.

«Le président Biden interviendra très probablement pour négocier, mais je doute qu'il ait beaucoup d'influence», a indiqué Jordan Barkin, analyste politique israélien et ancien rédacteur en chef d'un magazine.

Les Etats-Unis n'ont pas de relations directes avec l'Iran, ce qui signifie que toute initiative diplomatique visant à désamorcer les tensions nécessiterait l'implication de l'Europe ou du Moyen-Orient.

«Tout dépendra de la nature de cette riposte israélienne, et tout dépendra bien sûr du conseil et de l'effort consenti par l'administration américaine qui n'a aucun intérêt en ce moment à s'engager dans une guerre régionale», a affirmé Hasni Abidi, analyste et directeur du Centre d'études sur le monde arabe et méditerranéen à Genève.

ATS