Racket, extorsion de fonds, assassinatsLa DZ Mafia, «groupe criminel le plus dangereux du siècle»
ats
13.1.2025 - 15:46
La DZ Mafia, qui sévit à Marseille et au-delà, diversifiant désormais ses activités au-delà du trafic de drogue, est «le groupe criminel le plus structuré et le plus dangereux» du XXIe siècle en France, selon un expert.
ats
13.01.2025, 15:46
ATS
Racket, extorsion de fonds, assassinats: la DZ Mafia étend ses activités sur une large partie sud de la France, ont révélé début décembre la police et le parquet marseillais, après de récentes enquêtes qui ont permis d'incarcérer des dizaines de membres de l'organisation.
Les lettres DZ renvoient au domaine national pour l'Algérie (Dzayer en arabe algérien) dans les adresses internet. D'après Jean-Baptiste Perrier, professeur de droit privé et de sciences criminelles à l'université d'Aix-Marseille, la DZ Mafia n'est «pas une mafia» en tant que telle, contrairement ce que laisse entendre son nom.
«Les mafias en Italie tournent autour de la personnalité d'un chef. C'est très clanique, très difficile d'y rentrer, on ne recrute pas comme ça sur les réseaux sociaux. Et puis on a une différence notable, on n'a pas d'exemple mafieux qui ait utilisé des adolescents comme ça», souligne-t-il.
Pour lui, «la DZ Mafia semble plus proche de ce qu'on a pu connaître en Amérique du Sud avec les cartels».
«Surenchère»
A Marseille, la deuxième ville de France, l'année 2023 avait été marquée par une explosion des narchomicides, sur fond de conflit entre la DZ Mafia et le groupe Yoda. Une cinquantaine d'homicides avaient alors été recensés, après 36 morts en 2022 et 24 en 2024.
Si le conflit avec Yoda s'est calmé, de nouvelles tensions ont lieu désormais «entre la DZ Mafia et ceux qu'on appelle les 'nouveaux blacks', des Comoriens qui essaient de récupérer des points qui étaient aux mains de Yoda, sans que ce soit une guerre de clan à ce stade», note Jean-Baptiste Perrier.
«Ce qui explique la sauvagerie de certains actes, c'est qu'il y a une sorte de phénomène de mode, de surenchère sur les réseaux sociaux», souligne l'expert, qui évoque «le groupe criminel le plus structuré et le plus dangereux» du XXIe siècle en France, «si on laisse de côté les organisations terroristes».
Il souligne, comme la police et les magistrats, la diversification actuelle de leurs activités. «Ils proposent de faire des règlements de comptes sur commande, développent des activités internationales. (...). Ils annoncent des accords avec la Ndrangheta en Italie, c'est du marketing», explique M. Perrier.
Omerta
De janvier à novembre 2024, la police a traité 34 affaires de racket ou d'extorsion de fonds visant des commerces comme les restaurants ou discothèques par exemple, selon la préfecture de police des Bouches-du-Rhône, le département dont Marseille est le chef-lieu, mais, ajoute-t-elle, il est bien «possible que le silence des victimes empêche un décompte exact».
«La peur panique se diffuse. Nous on ne demande qu'une chose, être protégés», déclare à l'AFP Bernard Marty, président dans les Bouches-du-Rhône de l'Umih, principale organisation patronale dans l'hôtellerie-restauration.
Historiquement, les commerçants ici ont déjà connu de tels phénomènes de racket, mais «il y avait longtemps que ça n'existait plus», poursuit-il: «On a des adhérents qui ne portent pas plainte, ils ont peur».
Rançon
Car les intimidations vont parfois loin. Fin décembre, le gérant d'une épicerie casher des quartiers chics de Marseille recevait ainsi des photos récentes de sa famille, assorties d'une demande de rançon de 250'000 euros signée «DZ Mafia», selon une source policière. Et parfois, les menaces se concrétisent.
En échange d'une supposée protection, le propriétaire du First, établissement de nuit entre Marseille et Aix, «a fini par accéder aux demandes des malfaiteurs, en versant mensuellement une somme de 10'000 euros», a rapporté le procureur de Marseille, Nicolas Bessone.
Dans ce dossier, le travail de la police judiciaire a permis d'inculper 22 personnes. Parmi ces mis en cause, certains sont aussi soupçonnés d'être impliqués dans la mort en août d'un proche du rappeur marseillais SCH à la sortie d'une discothèque de la Grande-Motte.
L'artiste, Julien Schwarzer de son vrai nom, faisait l'objet de tentatives d'extorsion depuis un an. Il y avait résisté. Avaient suivi des menaces de mort, puis cette attaque. Il ne doit sa survie qu'à un changement de véhicule.