Qui pour Matignon? Après son succès, le Nouveau Front populaire peut-il gouverner?

AFP

8.7.2024

Et maintenant, le plus dur reste à faire: après avoir fini en tête des élections législatives, le Nouveau Front populaire, qui se dit prêt à gouverner, va entamer de difficiles tractations en son sein, notamment autour de la figure du Premier ministre.

Qui pourrait être désigné Premier ministre, si la gauche est en capacité de gouverner ? Jean-Luc Mélenchon est pour certains devenu une figure trop clivante.
Qui pourrait être désigné Premier ministre, si la gauche est en capacité de gouverner ? Jean-Luc Mélenchon est pour certains devenu une figure trop clivante.
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La gauche revendique de former le gouvernement, même s'il lui manque une centaine de sièges pour atteindre la majorité absolue. Les discussions entre ses différentes composantes ont commencé dès dimanche soir et vont se poursuivre dans les jours qui viennent.

«Les choses avancent pour l'instant très bien», a indiqué à propos des négociations le coordinateur de LFI Manuel Bompard, qui doit retrouver en fin d'après-midi ses homologues pour une nouvelle réunion.

Qui pourrait être désigné Premier ministre?

Et le premier écueil sur lequel le Nouveau Front populaire risque de se déchirer est celui de l'incarnation, une question qui a déjà fait couler beaucoup d'encre pendant la campagne pour les législatives, alors même qu'un succès de la gauche était très hypothétique.

Qui pourrait être désigné Premier ministre, si la gauche est en capacité de gouverner ? Les Insoumis persistent dans l'idée que c'est au groupe majoritaire de proposer un nom. Les autres penchent pour une décision collective des députés de l'alliance, Jean-Luc Mélenchon étant devenu une figure trop clivante, même au sein d'une partie de la gauche.

«Il faut que dans la semaine, nous puissions être en mesure de présenter une candidature» pour Matignon, a estimé lundi Olivier Faure, précisant qu'"il y a des profils qui s'imposent plus que d'autres" pour «apaiser ce pays». Des propos qui semblent donc exclure Jean-Luc Mélenchon qui, selon l'ancienne cheffe des députés LFI Mathilde Panot «n'est absolument pas disqualifié» pour le poste.

Pour Olivier Faure, ce choix se fera «par consensus» ou par «vote» des différents députés de gauche. La proposition du «consensus» ayant été jugée acceptable par le coordinateur de LF, Manuel Bompard.

Quel programme ?

Dimanche soir, toutes ses formations l'ont répété: ce sera sur son programme de rupture que le Nouveau Front populaire, fort de ses quelque 190 élus, veut baser son projet de nouveau gouvernement.

Avec en ligne de mire l'abrogation de la réforme des retraites, de la loi immigration et de la réforme de l'assurance chômage, mais aussi des mesures sur le pouvoir d'achat, comme le Smic à 1.600 euros net, et pour les services publics.

Pas de main tendue vers les macronistes donc. Le président de la République ne s'est d'ailleurs pas prononcé sur la constitution d'un nouveau gouvernement ou sur les ambitions de la gauche.

Ce serait «un gouvernement minoritaire homogène», qui travaillerait «en partenariat avec la société civile pour avoir une assise plus large», qui exercerait le pouvoir règlementaire et déposerait des textes à l'Assemblée, qu'il discuterait avec les autres groupes «à ses risques et périls», explique un cadre socialiste.

49-3?

Mais ces discussions se feront «sur des propositions du Nouveau Front populaire qui sont majoritaires dans l'opinion», insiste le secrétaire national du PS Pierre Jouvet, invitant les macronistes de gauche à «se positionner».

Même analyse de la part de l'écologiste Yannick Jadot: «Il nous revient de construire des majorités autour de notre projet».

Mais si la macronie fait le choix de la motion de censure, «le pays sera ingouvernable», et «on dira +on a essayé, ils nous ont empêchés+», ajoute Pierre Jouvet.

Ce gouvernement demanderait au président de la République et à son groupe de «s'engager à ne pas voter des texte avec le Rassemblement national», notamment «pour rendre le pays gouvernable», ajoute le cadre cité plus haut.

Jean-Luc Mélenchon a de son côté promis que l'augmentation du Smic se fera «par décret».

Concernant l'annulation de la réforme des retraites, «ce qui s'est fait par le 49-3, peut se défaire par 49-3», a estimé de son côté le patron des socialistes Olivier Faure.

Face aux rumeurs d'une coalition entre le camp présidentiel et la frange la plus modérée de la gauche, un cadre insoumis s'agace: «Les macronistes tentent de nous voler la victoire et de faire une coalition».

Mais même le maire socialiste de Rouen Nicolas Mayer-Rossignol, qui était un fervent opposant au mariage avec les Insoumis au sein de l'ancienne alliance Nupes, l'assure: «il n'y a pas besoin de faire sans» LFI. «La Nupes c'est terminé, LFI n'est pas majoritaire», assure-t-il.