Antisémitisme Une secte russe se développe en Suisse

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14.12.2018

La série de dix livres évoquant le mouvement Anastasia sert de Bible aux adeptes de la secte.
La série de dix livres évoquant le mouvement Anastasia sert de Bible aux adeptes de la secte.
Facebook/Anastasia - Vladimir Megre

Ils prônent une vie en harmonie avec la nature et propagent l’antisémitisme: le mouvement ésotérique d’extrême droite Anastasia fait de plus en plus d’adeptes en Suisse.

Par les idées qu’ils mettent en avant, ils sont plutôt dans l’air du temps: être en harmonie avec la nature, adopter un mode de vie végétalien ou encore donner aux enfants une place dans leur développement. Tout comme Anastasia. Cette belle jeune femme qui vit à l’état sauvage quelque part dans la taïga sibérienne, avec pour seule compagnie les animaux de la région. Les adeptes d’Anastasia ne connaissent son existence que par le biais de Vladimir Megre, qui aurait rencontré la sage blonde il y a une vingtaine d’années.

L’auteur russe a écrit dix livres sur ses expériences avec cette jolie femme, traduits en allemand il y a quelques années et parus aux éditions Govinda Verlag. Ils sont considérés comme la Bible de la secte russe Anastasia, qui prend lentement pied en Suisse.

Anastasia parle plusieurs langues et communique avec les animaux, elle sait tout sur l’avenir, le présent et le passé, elle peut guérir les malades. Ce qui incite ses disciples à lui ressembler. Dans ses livres, Megre leur promet que c’est possible, il suffit de suivre tout ce que préconise Anastasia en matière de mode de vie.

Le personnage du roman, Anastasia, montre aux adeptes de la secte la voie à suivre pour vivre heureux.

Aliments crus et antisémitisme

Selon une analyse d’InfoSekta, organisme spécialisé sur la question des sectes, cette ligne de conduite se traduit notamment par la consommation de légumes crus, idéalement cultivés sur son propre «domaine familial». Les membres de l’association suisse du même nom fondée en 2015 rêvent d’une «vie responsable et aussi autonome que possible, en bonne santé et en harmonie avec la nature». Selon Infosekta, il existe déjà en Suisse deux communautés de familles, c’est-à-dire des regroupement de plusieurs domaines familiaux.

Ces derniers font l’objet d’un regard critique, ce qui n’a rien d’étonnant au vu des propos antisémites ouvertement proférés par Vladimir Megre dans ses livres sur Anastasia. Il explique aux adeptes d’Anastasia les conspirations montées par les Juifs contre les dirigeants et relativise l’Holocauste dans ses écrits. D’autres partisans d’Anastasia, qui ont acquis une certaine importance au sein de la secte, propagent la supériorité de la race slave. Le fait que le mouvement Anastasia soit proche à la fois de la scène extrémiste de droite et du mouvement «Citoyens du Reich» n’est pas surprenant.

Une philosophie dangereuse pour la santé

Ce «mélange de religion proche de la nature, d’ésotérisme, de théories du complot et de révisionnisme historique» peut être dangereux pour la santé, comme l’a récemment montré un litige de garde d’enfant devant l’APEA de Winterthur-Andelfingen.

Selon un article du «Tages-Anzeiger», un père de famille aurait revendiqué la garde exclusive de son fils parce que la mère de l’enfant appartenait à la secte Anastasia. Un avis de mise en danger de la vie d’autrui a par ailleurs été déposé, la mère ayant refusé un traitement médical d’une semaine pour son nourrisson souffrant de problèmes d’estomac. L’enfant a finalement dû subir une intervention chirurgicale.

Les partisans du mouvement Anastasia s’opposent à la médecine conventionnelle et s’appuient plutôt sur la «nouvelle médecine germanique»: «Il est faux de penser qu’un médecin ou un médicament peuvent guérir une maladie», affirme le leader de la secte, Vladimir Megre dans une interview publiée sur le site Internet de mouvement. «En réalité, l’homme peut guérir n’importe quelle maladie, de la même façon qu’il l’a causée.»

Anastasia veut servir d’exemple

Le système scolaire prôné par les adeptes d’Anastasia est également vivement critiqué par les spécialistes des sectes: «Apprendre de façon naturelle», telle est la devise séduisante de l’Institut LAIS, ou les enfants apprennent «quasiment» par eux-mêmes. La secte n’ayant toujours pas reçu d’approbation pour des écoles proprement dites, le contenu est transmis par le biais de conférences et de cours à domicile.

Loin des contenus didactiques de l’enseignement traditionnel, les modules de cours, auxquels les adultes peuvent participer pour 225 francs suisses chacun, transmettent surtout de grandes émotions, comme l’a observé InfoSekta: «Le modèle en vigueur manque de faits, de concepts ou même de théories».

Pour un développement sain, l’idée selon laquelle les enfants ont une connaissance de base cosmique à laquelle ils doivent être initiés en une année scolaire seulement est même préjudiciable: «De telles représentations peuvent entraîner de graves problèmes chez les jeunes». Sans compter qu’il sera d’autant plus difficile pour les enfants de la secte de se libérer du joug d’Anastasia.

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