Un historien sur Trump «Nous avons affaire à un fasciste en herbe»

Philipp Fischer

2.11.2024

Selon l'historien Federico Finchelstein, les positions populistes de Donald Trump prennent de plus en plus un tournant extrémiste. Les partisans de l'ex-président se seraient déjà acclimatés à sa rhétorique d'extrême droite - un signal d'alarme à ne pas ignorer.

L'historien américain Federico Finchelstein met en garde : «Il y a un risque réel que Trump devienne aussi autoritaire qu'il le souhaite».
L'historien américain Federico Finchelstein met en garde : «Il y a un risque réel que Trump devienne aussi autoritaire qu'il le souhaite».
Archivbild: Keystone

Spécialisé dans l'extrémisme et le fascisme, l'historien Federico Finchelstein a récemment publié un ouvrage intitulé The Wannabe Fascists – A Guide to Understanding the Greatest Threat to Democracy (Les fascistes en herbe – Un guide pour comprendre la plus grande menace pour la démocratie).

Dans une interview accordée à l'AFP, Finchelstein analyse la campagne présidentielle américaine en cours, observant comment Trump est passé d'un populisme classique à des positions de plus en plus extrêmes.

A quel point Trump est-il extrémiste ?

«Trump incarne une version extrême du populisme, qui flirte avec le fascisme», affirme Finchelstein. L'historien identifie quatre éléments clés du fascisme : la violence politique, la propagande et la désinformation, la xénophobie, et un leadership autoritaire.

Ces traits, bien que parfois présents dans le populisme, se révèlent beaucoup plus marqués dans le fascisme. Adolf Hitler en représente l'exemple le plus extrême, souligne l'historien. «L'histoire ne se répète pas, mais le simple fait que nous nous posions cette question est déjà un signal d'alerte», ajoute-t-il. «Il y a un risque réel que Trump devienne aussi autoritaire qu'il le souhaite.»

Pourquoi Trump est-il élu par les citoyens américains ?

«Il y a beaucoup de gens aux États-Unis qui ne sont pas satisfaits de la situation économique ou des changements que connaît le pays. Et parfois, une combinaison de maux conduit les gens à voter pour un politicien autoritaire», explique Finchelstein.

Mais ces électeurs ne voient pas que Trump n'offre que des illusions pour traiter des problèmes réels – et qu’il «place sa volonté au-dessus de la réalité».

Ses partisans sont-ils des extrémistes ?

Un autre problème réside dans le fait que ses partisans semblent s'être accoutumés à sa rhétorique d'extrême droite, déclare Finchelstein. «Le véritable danger réside dans la normalisation de cet extrémisme au sein de la société, notamment dans les médias, mais aussi chez les électeurs», poursuit-il. «Avant, ce type de discours relevait du domaine de l’inacceptable; aujourd'hui, il ne l'est plus.»

Selon lui, le public a affaire à un candidat qui prévoit des expulsions massives parce que les migrants apportent de «mauvais gènes» dans le pays. Une position qu'il juge définitivement «extrême».

Jusqu'où irait Trump s'il remportait les élections ?

«Nous avons affaire à un fasciste en herbe. Mais la question reste de savoir dans quelle mesure il sera en mesure de faire toutes les choses qu'il aimerait faire», dit Finchelstein. Le fait que le résultat des élections soit serré est «le résultat de la crise de la démocratie américaine».

L'historien fait référence à l'exemple de l'ancien président brésilien Jair Bolsonaro qui, après sa défaite électorale en 2022 dans son pays, a fomenté un scénario similaire à celui de Trump en 2020 aux Etats-Unis. Condamné pour abus de pouvoir après la tentative de coup d'État de janvier 2023, Bolsonaro a été privé de ses droits politiques pour huit ans, l'empêchant de se présenter à nouveau.

Trump, en revanche, bien que poursuivi en justice, n’a pas été condamné pour son rôle dans les événements du 6 janvier 2021, lorsque ses partisans ont pris d'assaut le Capitole à Washington. Il peut donc encore se présenter à l’élection présidentielle sans être inquiété.

«Soit la justice n'a pas fonctionné, soit il était trop tard. Comment une personne avec autant de problèmes juridiques peut-elle encore être candidate?», s'interroge Finchelstein. «Techniquement, le soulèvement du 6 janvier était une tentative de coup d'État, même si l'on peut se demander combien de fois cela a été formulé de cette manière.»