«J’ai commis l'irréparable»Mort du fils du chef Alléno: huit ans de prison requis contre le chauffard
AFP
31.10.2024
«Qui fait le max' mérite le max'», a lancé le procureur au prévenu comparaissant devant le tribunal correctionnel de Paris. Il a en outre requis à son encontre une interdiction de conduire pendant dix ans.
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31.10.2024, 22:55
31.10.2024, 22:56
Megane Bochatay
Le soir du 8 mai 2022, Antoine Alléno, 24 ans, sort du restaurant où il travaille et ramène en scooter sa collègue, Anisa. Ils chantent au feu rouge. D'un coup, ils sont percutés à vive allure par Franky D., sans permis, au volant d'une Audi RS6.
Antoine Alléno succombe à ses blessures, Anisa n'est que blessée.
Au volant de cette voiture volée juste avant, l'enquête a montré que Franky D. avait circulé à 120 km/h dans les rues du 7e arrondissement, limitées à 30. Il heurte d'abord un VTC puis un taxi et perd le contrôle de la grosse cylindrée qui frappe le deux-roues. Prenant la fuite à pied, il est arrêté rapidement.
«Cauchemar»
«L’une des soirées les plus heureuses de ma vie se transformait en cauchemar», raconte à la barre Anisa, la passagère.
Ce soir-là, Antoine lui a attaché son casque avant d'attacher «le sien», affirme la jeune femme. Le casque du jeune homme a été retrouvé à plusieurs mètres.
En s'avançant dans le prétoire, aux deux tiers plein, la voix de Franky D., membre de la communauté des gens du voyage, hésitante, tranche avec sa carrure, imposante.
«Je reconnais tous les faits» sauf les violences, dit l'homme de 27 ans, accusé par un voiturier de lui avoir asséné des coups de poing au moment de voler la voiture à la sortie d'un restaurant où il avait passé la soirée.
Franky D. invoque sa consommation d'alcool excessive ce jour-là -il a été contrôlé environ deux heures après les faits avec 1,56 g/l d'alcool dans le sang- pour expliquer ses trous de mémoire. Le tribunal, lui, cite des témoins et des vidéos qui montrent notamment qu'il n'a «pas l'air de tituber».
Ses réponses, même parcellaires, montrent qu'il a «conscience de la douleur et du mal» causés, affirme Joseph Cohen-Sabban, l'un de ses avocats.
«L'irréparable»
Interrogé par le président, le prévenu lâche: «Je n'aime pas spécialement la vitesse mais j’aime les grosses voitures», notamment la RS6, admet-il, dont il connait la puissance: «600 chevaux». En 2018, il avait perdu le permis pour excès de vitesse.
«J’ai commis l'irréparable», regrette ce père de deux petites filles. Il assure que, sans alcool, «cela ne se serait jamais» produit.
«L'alcool n'est pas une circonstance atténuante», rétorque Valérie Munoz-Pons, une des avocates des parties civiles.
«Je me suis allongé sur mon fils, j’ai crié», raconte, très ému, Yannick Alléno en retraçant cette terrible soirée. Quand le chef arrive sur les lieux, il reconnaît son fils qui «porte ses chaussettes rayées».
A l'écoute des parties civiles, Franky D. comme ses deux co-prévenus, poursuivis pour vol en réunion, restent prostrés.
Pour René A., 47 ans, le procureur requiert six mois d'emprisonnement et neuf mois avec sursis pour Sniper G., 20 ans.
«J’essaye de me mettre au service des autres pour donner un sens à ma vie» désormais, dit Isabelle Alléno, alors que la famille a lancé une association portant le nom d'Antoine.
Franky D., qui comparaît libre sous contrôle judiciaire, est notamment poursuivi pour homicide involontaire, avec au moins deux circonstances aggravantes. Celui qui avait déjà six condamnations à son casier judiciaire au moment du drame, encourt dix ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amendes.
Depuis ce drame, Yannick Alléno est devenu un ardent défenseur de la création d'un délit d'«homicide routier», proposition de loi qui devait passer en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, avant la dissolution en juin.
Franky D., lui, a pu repasser son permis de conduire il y a un an et demi.