Mineurs clandestinsAfrique du Sud: le décompte macabre se poursuit dans l'ancienne mine d'or
ATS
15.1.2025 - 17:24
Le décompte macabre se poursuit au-dessus du puits d'or désaffecté d'Afrique du Sud avec 78 corps de mineurs clandestins extraits depuis le début de la semaine, a annoncé mercredi la police qui cerne le site depuis des mois pour déloger ces travailleurs illégaux.
Keystone-SDA
15.01.2025, 17:24
ATS
Chaque aller-retour de la nacelle, descendue au moyen d'un treuil spécialisé dans le puits de Stilfontein, à environ 150 km au sud-ouest de Johannesburg, aggrave le bilan.
Au total 216 sont sortis vivants de ce puits profond de 2,6 km abritant une sorte de ville souterraine pour travailleurs de la mine. Ils sont souvent en piètre état au vu des membres décharnés de ceux qui ont émergé de cette mine aurifère.
Un nombre incertain de mineurs clandestins, souvent étrangers, y demeuraient depuis des mois sous terre, trop faibles pour remonter par la seule corde qui leur permettait de revenir à la surface auparavant, selon plusieurs témoignages.
La police les avaient estimés à plusieurs centaines lorsqu'elle a commencé il y a plus de deux mois à limiter au minimum le ravitaillement en eau et nourriture du site. Cette stratégie visant à les pousser à sortir lui vaut aujourd'hui d'être accusée d'avoir provoqué la mort d'une partie de ceux restés à l'intérieur.
Le ministre de la Police Senzo Mchunu, en visite sur place mardi, n'a pas donné de chiffre précis. «Chaque chiffre que nous avons ici est une estimation, une supposition», a-t-il déclaré. «C'est impossible que quelqu'un nous dise +Je sais avec certitude qu'ils sont tant+».
L'opération de secours doit durer dix jours en tout pour extraire du sous-sol ces «zama zamas» ("Ceux qui essaient» en zoulou), comme sont appelés en Afrique du Sud les mineurs clandestins.
Une vidéo transmise à l'AFP lundi par l'ONG Macua, qui défend les communautés affectées par les activités minières, montrait ce qui s'apparentait à des dizaines de dépouilles emballées dans l'obscurité des galeries.
Plus de 1500 mineurs clandestins, pour la plupart étrangers, ont été arrêtés sur le site par la police depuis août.
Parmi eux, «121 mineurs illégaux ont déjà été expulsés, dont «80 originaires du Mozambique, 30 du Lesotho, 10 du Zimbabwe et un du Malawi», ont recensé les autorités sud-africaines.
Désaffecté depuis une décennie
Les hommes au visage émacié sortis mardi du puits paraissaient particulièrement affaiblis. Ils ont tous été soumis à une fouille au détecteur de métal par la police pour s'assurer qu'ils ne remontaient aucune pépite d'or du sous-sol.
Les autorités ont été accusées d'essayer de forcer les mineurs à remonter à la surface en réduisant depuis début novembre les réserves de nourriture et d'eau apportées par des proches qui vivent de l'économie informelle autour de la mine.
«Nous allons les enfumer et ils sortiront», avait lancé en novembre la ministre auprès de la présidence, Khumbudzo Ntshavheni, suscitant des réactions indignées.
Sur ce site minier proche de l'Etat Libre, situé sur l'autre berge de la rivière Vaal à seulement cinq km, des vivres et de l'alcool parvenaient aux hommes en sous-sol avant l'opération de police.
La fermeture de l'ultime puits, le numéro 10, il y a dix ans a plongé la zone dans le marasme.
Ces «zama zamas» sont des dizaines de milliers en Afrique du Sud et souvent sous la coupe de gangs criminels. Ce qui leur a tissé une mauvaise réputation auprès d'une part de la population sud-africaine.
Beaucoup sont étrangers --98,5% des mineurs arrêtés sur le site de Stilfontein d'après le ministre des Ressources minérales, Gwede Mantashe--, ce qui vaut encore plus d'intransigeance envers les «zama zamas» dans un pays où les flambées xénophobes sont récurrentes.
«C'est une activité criminelle. Il s'agit d'une attaque sur notre économie par des ressortissants étrangers», a martelé mardi le ministre.
Le bilan encore provisoire de Stilfontein est «jamais vu en Afrique du Sud», fustigeait mardi auprès de l'AFP Zinzi Tom, 31 ans, dont le frère vit au coeur des galeries souterraines depuis juillet.
«Ce n'est pas le prochain Marikana mais déjà le massacre de Stilfontein», accusait-elle dans un parallèle avec la mort en 2012 de 34 mineurs en grève à Marikana, sur lesquels la police avait ouvert le feu.