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Interview Matthieu Fournier: «L’émission n’a pas pour vocation d’être écologiste»
D'Aurélia Brégnac/AllTheContent
26.9.2019
Après une première saison à gravir les sommets, Matthieu Fournier reprend les commandes de «Passe-moi les jumelles!», en sillonnant cette fois la Suisse à vélo. Une série d’émissions hors des sentiers battus qui explore la nature sous toutes ses facettes, au cœur de la Transjurassienne. Randonnée, VTT, étapes dans les bivouacs…
S’il est forcément un peu aventurier, le journaliste de 31 ans ne se considère pourtant pas comme un sportif acharné, mais plutôt comme un contemplatif. Et en effet, c’est avant tout la beauté des rencontres et des paysages qu’il tient à partager en y ajoutant une touche personnelle: des images à couper le souffle, illustrées d’un soupçon de poésie. Rencontre avec un amoureux de la nature.
Pour cette nouvelle saison de «Passe-moi les Jumelles», vous avez décidé de traverser la Suisse à vélo… Comment vous est venue cette idée de présenter l’émission en pleine nature?
Au départ, j’avais en fait postulé à «Passe-moi les Jumelles» pour faire des reportages, pas du tout pour présenter l’émission. Et puis, on m’a proposé la présentation. J’ai accepté, mais je voulais faire des choses plus sportives, qui nous emmènent dehors, différentes de la présentation habituelle. Au tout début, c’est d’ailleurs comme ça que Benoît Aymon avait conçu l’émission, puis on était revenu à une présentation et des invités en intérieur. Je leur ai donc proposé pour la première saison de faire une série en montagne et dans les bivouacs.
Pour cette deuxième saison, on voulait changer de décor, pour satisfaire aussi le public qui n’aime pas forcément la montagne. Et c’est là qu’est venue l’idée de traverser la Suisse en VTT. Il y a pas mal d’itinéraires nationaux, et des endroits qu’on n’avait encore jamais vus dans les saisons précédentes. Ça permet d’explorer plus l’horizontalité, par rapport à la montagne.
«Pour certaines personnes, ça serait l’enfer ou trop contraignant. Mais pour moi, c’est une expérience magique!»
Vous avez arrêté votre travail de journaliste d’actualité pour présenter «PaJu»… Il y a moins de stress?
Le niveau de stress est effectivement très différent. Dans l’actualité, ce sont de gros coups de stress pour arriver à sortir un papier en une journée alors qu’on ne connaît pas grand-chose du sujet le matin même, et qu’il faut rendre quelque chose de documenté en fin de journée… Alors ce stress-là, il n’existe plus du tout. Et c’est une chance!
Par contre, il y a peut-être plus de pression. Dans l’actu, il y a toujours des options… Là, il faut que les émissions soient prêtes, complètes, de qualité - au niveau de l’image comme du contenu. Donc la pression est différente. Les tournages sont limités dans le temps, la partie de postproduction et le montage également… Le plaisir est aussi beaucoup plus grand! Pouvoir prendre la caméra pour montrer ces images aux gens, avoir ce décor pour travail, c’est génial! J’ai du plaisir à marcher dans la nature, dans le froid; porter un sac lourd ne me dérange pas… Pour certaines personnes, ça serait l’enfer ou trop contraignant. Mais pour moi, c’est une expérience magique!
«Je ne suis pas non plus un sportif acharné.»
Vous êtes évidemment sportif, mais aussi poète – vous avez remporté un prix de poésie de l’association des poètes valaisans. Ce sont deux côtés de votre personnalité finalement très différents, non?
Je ne suis pas non plus un sportif acharné. J’aime bien faire de belles montagnes ou de belles randonnées mais je ne vais pas regarder les dénivelés que j’ai faits dans la journée… ça ne m’intéresse absolument pas. Je suis sportif mais ce n’est pas ce qui me caractérise. Concernant la poésie, j’avais en fait remporté ce prix quand j’avais 16 ans. J’avais appris les rimes, la rythmique et c’était une manière de m’exprimer que j’aimais bien… Certains poèmes étaient bien travaillés, mais c’était un peu de la poésie d’adolescent, ce qu’on écrit quand on a 15 ou 16 ans.
Sur quels sujets… la nature?
Non, c’était plutôt sur l’humain et les sentiments que je pouvais avoir à cet âge-là. J’avais perdu mon père plus jeune. Et puis 16 ans, c’est aussi un âge où on est amoureux, où l’on se pose plein de questions… C’était un peu de tout ça. Ensuite, j’ai continué à l’Uni à écrire des poèmes, mais aussi des textes courts. Et c’est justement ça qui a pu être mis en place dans l’émission. Dans la présentation, j’annonce d’abord le sommaire, le parcours, où l’on va… On lance un premier sujet. Puis au milieu, entre les deux reportages, c’est là qu’on a pu insérer un texte poétique qui dure entre 1’30 et 2 minutes.
C’est l’occasion de pouvoir raconter la montagne ou bien mes sentiments en montagne, mais toujours en essayant de trouver un angle un peu original, un regard un peu particulier sur un aspect. J’ai essayé d’apporter ça et ça a très bien fonctionné cet hiver. Les producteurs étaient contents, les retours qu’on a aussi eus du public étaient très positifs. Du coup, on s’est dit qu’on allait continuer à faire ça à vélo et par la suite. Ça donne une touche très personnelle aux présentations qu’on a pu mettre en place.
«Il n’y a pas toujours de poêle, parfois pas de matelas.»
Hébergement dans des bivouacs, conditions de vie spartiates, efforts sportifs intenses… Les tournages ne sont pas trop durs physiquement?
Certains bivouacs étaient vraiment très froids. Il n’y a pas toujours de poêle, parfois pas de matelas. On a aussi une fois dormi sous la tente. L’équipe de télévision, qui est très restreinte, devait avoir le technique et le physique pour aller en montagne. Il faut pouvoir respecter le timing tout en supportant l’altitude, monter 1500m d’altitude dans des conditions dantesques, et pouvoir redescendre à ski des pentes dangereuses…
Qu’est-ce qui vous effraie -ou pourrait vous effrayer- lorsque vous partez en randonnée?
En Suisse, à part une avalanche ou une chute de sérac, il n’y pas grand-chose à craindre… Et puis, à vélo, c’est beaucoup moins épuisant, plus standard, plus facile à vivre qu’en haute-montagne.
Qu’est-ce que l’amoureux de montagne et de nature que vous êtes pense des enjeux environnementaux actuels?
Je suis très sensible à la montagne et je pense que c’est un endroit qui rend les gens plus sensibles à la nature et à l’environnement. Pour autant, l’émission n’a pas pour vocation d’être écologiste ou partisane. Cette reconnexion au monde qui nous entoure est mise en avant mais ce n’est pas un message. Les enjeux sont évidemment très importants, et l’on essaye, à notre manière, de rendre les gens sensibles à cette planète.
«Je pense que la montagne est plus qu’un terrain de sport…»
En début d’année, vous expliquiez dans la «Tribune de Genève» que «la montagne, à [vos] yeux, n’[était] pas un terrain de sport mais plutôt de contemplation»… Pouvez-vous nous en dire un peu plus?
Oui, je ne suis pas forcément dans la recherche de la performance mais plutôt d’avoir accès à de beaux paysages. Si l’on veut faire du sport pour se dépenser, on peut courir autour d’une piste ou aller dans une salle de fitness. La montagne est clairement un endroit où on peut avoir une activité sportive, mais qui mérite un peu plus que d’y passer en courant, qui propose une vrai moment de rencontre avec soi et avec l’univers qui nous entoure. Et ça, ça ne se passe pas avec un chrono, mais avec le cœur. Je pense que la montagne est plus qu’un terrain de sport…
«On est en fait revenu habiter en Valais, près de notre famille qui nous aide beaucoup.»
Vous êtes devenu papa récemment. N’est-ce pas trop difficile d’être séparé de vos proches durant les tournages?
Forcément, ce n’est pas évident… Mais on s’organise: on est en fait revenu habiter en Valais, près de notre famille qui nous aide beaucoup. Et ce n’est pas difficile dans la mesure où les tournages sont tellement intenses que lorsque je reviens, j’ai beaucoup de disponibilité et de joie à apporter et à partager avec mon fils et ma femme.
Quels sont les prochains endroits que vous vous apprêtez à faire découvrir aux téléspectateurs de «PaJu»?
En 2020, on a prévu de faire une série d’émissions sur les plus hauts sommets des 26 cantons. Ça va donc nous emmener à travers toute la Suisse, dans chacun des 26 cantons.
«Passe-moi les jumelles», le vendredi à 20h10 sur RTS Un. Avec Swisscom TV Air, vous profitez gratuitement de Swisscom TV sur votre ordinateur, votre tablette et votre Smartphone. Ainsi, vous pouvez regarder Swisscom TV, vos enregistrements inclus, où que vous soyez.
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