A 55 ans, Sophie Lavaud est entrée dans l'histoire de l'alpinisme français: elle est devenue lundi la première Française, femmes et hommes confondus, à avoir gravi les quatorze sommets de plus de 8.000 mètres de la planète.
«Plus je grimpe ces grandes montagnes et plus je me rends compte que l'on n'est rien face à l'immensité de l'Himalaya», avait-elle expliqué à l'AFP quelques jours avant de se lancer dans l'ascension du Nanga Parbat, sommet situé au Pakistan s'élevant à 8.126 mètres d'altitude.
Après douze heures d'alpinisme extrême, dans des conditions difficiles marquées par d'importantes chutes de neige et des bourrasques, la grimpeuse a réalisé son rêve, un projet entamé il y a plus de 10 ans, entrant du même coup dans l'histoire de l'himalayisme.
«L'équipe entière de notre expédition a réussi à grimper le Mont Nanga Parbat», a indiqué en début de matinée lundi, l'opérateur Chhang Dawa Sherpa, en charge de l'ascension, sur les réseaux sociaux.
Quelques heures plus tard, l'entourage de Sophie Lavaud a confirmé à l'AFP que le groupe était bien sain et sauf et avait fait halte au camp 3 du Nanga Parbat, à 6.750 mètres d'altitude, pour passer la nuit avant de redescendre mardi au camp de base.
L'expédition, composée de vingt alpinistes chevronnés, dont la célèbre alpiniste norvégienne Kristin Harila, qui cherche elle à gravir les 14 plus hauts sommets de la planète (de plus de 8 000 m) en moins de six mois, a atteint son but à 9 heures 15 du matin.
«Saveur particulière»
«Le Nanga Parbat a une saveur particulière car si j'atteins le sommet, ce grand projet initié il y a 11 ans se réalisera ! J'ai du mal à y croire», avait raconté Lavaud, alpiniste de 55 ans, à la triple nationalité (française, suisse et canadienne).
Elle a découvert la montagne en grandissant à Argentière (Haute-Savoie), mais ce projet a commencé à prendre forme dans son esprit en 2012, lors qu'elle a atteint son premier «8.000», le Cho Oyu, un sommet tibétain.
«En 2015, j'ai démissionné de mon dernier job (elle dirigeait une société d'événementiel, NDLR) pour sauter le pas et me consacrer pleinement à cet objectif (...) j'aime l'aventure qui s’inscrit dans chaque expédition, j'aime les pays, les villages qu'on traverse, les rencontres, la vie sur les camps de base», avait-elle détaillé.
Une quarantaine d’hommes et de femmes dans le monde ont gravi les quatorze géants himalayens, selon la base de données en ligne The Himalayan Database. L'alpiniste italien Reinhold Messner, en 1986, est le premier à l'avoir fait.
Mais Sophie Lavaud est la seule française, tous genres confondus, à avoir accompli un tel exploit. Et seule une poignée de femmes avant elle l'avait réussi.
Dans les années 1990, plusieurs alpinistes français ont tenté d'y arriver. La Parisienne Chantal Mauduit en avait atteint six, sans oxygène et en style alpin, entre 1992 et 1997, mais a perdu la vie un an plus tard à 34 ans, en s'attaquant au Dhaulagiri (Népal).
Tout comme le Gapençais Jean-Christophe Lafaille, décédé en 2006, en abordant la première ascension solitaire en hivernale du Makalu, son douzième «8.000». «Mon moteur n’est ni la performance ni la quête d’exploit», avait affirmé à l'AFP Sophie Lavaud depuis le camp de base du Nanga Parbat.
C'est donc «l'amour de l'aventure» qui a mené l'alpiniste vers les sommets.