Entre polémiques et préparatifs Le Qatar à un mois de son immense défi

AFP

19.10.2022

A un mois du Mondial-2022 (20 novembre-18 décembre), Coupe du monde la plus chère de l'histoire et événement gigantesque pour le minuscule Qatar, les ouvriers s'activent encore sur des chantiers et les organisateurs sont plus que jamais pressés de questions sur leur bilan.

Le patron du Mondial-2022 Nasser al-Khater, lors d'une conférence de presse, le 17 octobre 2022.
Le patron du Mondial-2022 Nasser al-Khater, lors d'une conférence de presse, le 17 octobre 2022.
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AFP

«Tout est prêt (pour) la meilleure Coupe du monde de tous les temps», a assuré le président de la Fifa, Gianni Infantino, lors d'une conférence de presse lundi.

Le dernier des huit stades a été inauguré début septembre et les camps de base attendent les 32 équipes qualifiées, à commencer par le Japon le 7 novembre. Mais, dans les rues décorées aux couleurs du tournoi et dans de nombreuses tours, les travaux se poursuivent jour et nuit.

Stades climatisés, centaines de vols quotidiens pour acheminer les supporters, droits bafoués des travailleurs migrants et des personnes LGBTQ+... Les critiques aussi sont légion, relayées par les ONG, les politiques et les médias occidentaux, certains appelant au boycott.

Avec plus d'un million de visiteurs et cinq milliards de téléspectateurs prévus, la première Coupe du monde de foot dans un pays arabe et au Moyen-Orient devait être un formidable instrument au service de la notoriété du petit émirat du Golfe.

Le riche Etat gazier n'a pas lésiné sur les dépenses, consacrant 6,5 milliards dollars à ses stades, 36 milliards à son métro, sans compter la construction de nombreux hôtels et l'extension de son aéroport international.

La comparaison avec les éditions précédentes est «injuste», tempère toutefois Danyel Reiche, chargé d'un projet de recherche sur le Mondial à l'université Georgetown au Qatar. Il rappelle qu'"une grande partie des infrastructures faisaient déjà partie d'un plan de développement à l'horizon 2030".

«Rectifier les choses»

Depuis l'attribution du tournoi fin 2010, les autorités qataries, les organisateurs et la Fifa, l'instance dirigeante du foot, ont surtout dû se justifier sur une kyrielle de sujets, d'apparence triviale (absence de culture sportive ou encadrement de la vente d'alcool) ou bien essentiels (accusations de corruption pour obtenir l'organisation du Mondial ou appel à constituer un fonds d'indemnisation des travailleurs des chantiers).

«Cela fait douze ans que les travailleurs et leurs familles n'ont pas été indemnisés pour les décès, les blessures et les salaires impayés. Trop de décès n'ont pas fait l'objet d'une enquête (...). Nous pouvons au moins rectifier les choses avant le Mondial», plaide Rothna Begum, de l'ONG Human Rights Watch, auprès de l'AFP.

Lundi, Infantino a salué les «réformes révolutionnaires du Qatar qui, au cours des dernières années et pour les années à venir, améliorent la vie de milliers de travailleurs» et a martelé que «tout le monde» serait «le bienvenu, quels que soient son origine, son milieu, sa religion, son sexe, son orientation sexuelle ou sa nationalité».

Les médias nationaux, étroitement liés au pouvoir, ont mené une attaque concertée contre les critiques il y a une dizaine de jours. Le journal arabophone Al Sharq, par exemple, estime qu'il existe une «conspiration systématique» des médias de nombreux pays européens, «alors que ces médias ont oublié les conditions misérables subies par les travailleurs en Europe».

Rencontrée dans le très touristique souk Waqif, Yasmian Ghanem, golfeuse qatarie, assure tout de même que «les supporters vont beaucoup s'amuser» et que «ce sera une expérience agréable pour tout le monde». Conscient de l'enjeu, Hani El-Keridi, guide touristique égyptien, apprend «beaucoup pour pouvoir être un ambassadeur de l'État du Qatar».

Objectif huitièmes

En Europe, la sélection qatarie, qualifiée d'office pour son premier Mondial, s'entraîne dans un quasi huis clos depuis juin, comme l'avait fait la Corée du Sud, demi-finaliste à domicile en 2002.

Pour l'attaquant Akram Afif et ses coéquipiers, vainqueurs de la Coupe d'Asie des nations en 2019, finir à l'une des deux premières places du groupe A, où se retrouveront aussi les Pays-Bas, le Sénégal et l'Equateur et atteindre ainsi les huitièmes de finale serait un succès.

Or, leurs derniers matchs amicaux en septembre n'ont pas été très encourageants, avec des défaites contre l'équipe des moins de 23 ans de la Croatie (3-0), le Canada (2-0) et un nul contre le Chili (2-2).

«Nous sommes pleinement conscients de notre besoin de développer certains aspects tactiques et techniques qui ne se sont pas déroulés comme nous le souhaitions», a admis le sélectionneur espagnol du Qatar, Félix Sanchez, lors d'un unique entraînement en public à Doha début octobre.

Sur les pelouses foulées par Al-Annabi (le surnom de la sélection tiré de la couleur bordeaux du maillot) comme sous les lampadaires en forme de palmier de l'emblématique Corniche de Doha, l'heure est aux derniers réglages. Pour les forces de sécurité du Qatar mais aussi des renforts de pays étrangers, ce sera par exemple un ultime exercice de cinq jours à partir de dimanche.