Nos deux journalistes Michaël Bugnon et Daniel Romano se sont prêtés au jeu des pronostics avant le troisième match de l'équipe de Suisse à l'Euro ce dimanche à 21h contre l’Allemagne.

Qui l'emportera ?

Suisse - Allemagne

Le duel de la rédaction

Des Suisses aux dents longues

Michaël Bugnon

Journaliste TV

Il fallait bien un fou pour argumenter en faveur de la Suisse face à l’Allemagne, et ce fou, c’est moi. Mais est-ce vraiment déraisonnable de croire à un succès helvétique ? Et bien non, simplement parce que notre «Nati» devrait pouvoir jouer libérée après avoir «réussi» son début d’Euro. Réussi en matière de résultats en tout cas...

Les hommes de Murat Yakin sont à 99% sûrs d’être qualifiés et n’auront pas grand-chose à perdre, et ils auront aussi à cœur de montrer que la performance très moyenne face à l’Ecosse n’était qu’une erreur de parcours. Je vois donc une équipe de Suisse joueuse et un match qui pourrait bien partir dans tous les sens. Une grande rencontre de football est attendue à Francfort.

En effet, les deux équipes devraient faire jouer certains de leurs remplaçants et ces derniers auront les dents longues. «Shaq» devrait notamment (re)montrer à l’Europe entière que sa patte gauche ne s’est pas envolée avec lui de l’autre côté de l’Atlantique. On pourrait aussi redécouvrir des joueurs comme Noah Okafor ou Steven Zuber, qui n’ont pas encore eu la moindre minute dans cet Euro.

Dans l’autre camp, certes, l’Allemagne a réalisé un récital jusqu’à maintenant, mais elle va s’endormir sur ses lauriers. Cette équipe sera offensive, créera du jeu mais va prendre ce match à la légère défensivement et laisser beaucoup d’espaces aux attaquants helvétiques. En plus, c’est un Suisse - Allemagne donc notre équipe nationale joue «à domicile». OK, cet argument est un peu nul mais reste que la Suisse n’a plus perdu «à domicile» depuis juin 2022 et c’était face à l’Espagne. Bon, je vous l’accorde, au niveau de l’argumentaire, je commence à être à court d’idées.

Peu importe. Sur le principe, je miserais bien sur un match nul passionnant 2 à 2. Mais pour l’histoire et pour le jeu, et bien je vais dire que la Suisse va s’imposer d’un but. 2-1, 3-2, 4-3, c’est comme vous voulez. On prendra même un vieux 1-0 sur un autogoal de Rüdiger... Allez, on y croit. Hop Suisse !

Euphorie allemande

Daniel Romano

Journaliste TV

Chaque soir de match, l’Allemagne subit un exorcisme. Elle cherche à se libérer de ce mal mystérieux qui la ronge de l’intérieur depuis trop longtemps. Elle veut se débarrasser de ses vieux démons, de cette étiquette de moderner Verlierer après ses résultats traumatisants lors des 3 derniers grands tournois : 2 éliminations en phase de poules de Coupe du monde et huitième de finaliste à l’Euro 2020, c’est indigne d’une équipe qui avait été sacrée championne du monde au Brésil, il y a 10 ans.

La croyance autour de cette équipe est importante. On le sent quand on échange avec ses supporters. On ressent la même foi que lors du Mondial allemand en 2006. Cette Allemagne est un amalgame de gamins insouciants et d’anciens expérimentés. J’adore Gündogan, ce milieu divin, ce capitaine formidable et indispensable que les fans ne voulaient même plus voir sur un terrain avant l’Euro. Je craque évidemment pour Musiala, ce Créateur, capable de surprendre n’importe qui, n’importe quand. Un joueur aux gestes miraculeux, à la fois bienveillant avec ses coéquipiers, mais aussi si malin et venimeux - face à ses adversaires - capable de se faufiler entre les lignes tel un serpent. Un vrai régal.

Cependant, les limites de l’Allemagne sont là, juste sous vos yeux, depuis le 14 juin : la Mannschaft n’est pas (encore) une équipe homogène. On ne parle pour l’instant que de très belles individualités. Havertz et Wirtz sont-ils ces prodiges touchés par la grâce, comme lors du match contre l’Écosse, ou sont-ils ces joueurs avilis, mesquins et condescendants comme contre la Hongrie ? Sané peut-il laver cette image de doux agneau égaré et se salir enfin un peu ? Füllkrug est-il capable d’aller chercher cette place d’élu à la pointe de l’attaque, contre la Suisse ? Les Portes de la défense sont-elles réellement impénétrables ? Beaucoup de questions. Peu de réponses pour l’instant.  

Ce que j’aime chez cette équipe, c’est sa résilience. Je ne la trouve pas techniquement impressionnante, comme l’Angleterre, la France, le Portugal ou l’Espagne. Mais l’Allemagne me semble capable de résister au calvaire que lui réserveront ses futurs adversaires pour demeurer dans cette douce Europhorie. À partir de maintenant, ses opposants seront tous mieux armés que les deux premiers. Pour moi, le vrai Euro de la Mannschaft commence aujourd’hui contre la Suisse.