A la veille d'un 3e mandat Xi Jinping: «Osez vous battre pour la victoire»

ATS

22.10.2022 - 18:08

Le président chinois Xi Jinping s'est assuré samedi un contrôle total du Parti communiste chinois (PCC), lors d'une cérémonie perturbée par la sortie inattendue de son prédécesseur Hu Jintao. Ce dernier s'est senti mal, selon les médias officiels.

Xi Jinping à l'aube d'un 3e mandat historique.
Xi Jinping à l'aube d'un 3e mandat historique.
ATS

«Osez vous battre pour la victoire», a lancé d'un air triomphal Xi Jinping à l'issue de la cérémonie de clôture du congrès du PCC au Palais du peuple à Pékin, un bâtiment de style soviétique à la décoration intérieure dominée par le rouge.

La composition du nouveau Comité central, sorte de «Parlement» interne au parti, y a été dévoilée. Quatre pointures du PCC dont l'actuel premier ministre Li Keqiang – qui quittera ses fonctions en mars prochain – ne figurent plus sur la liste publiée par l'agence officielle Chine nouvelle.

Le numéro trois chinois Li Zhanshu, le vice-premier ministre Han Zheng et Wang Yang, le président de la Conférence consultative politique du peuple chinois (une assemblée sans pouvoir de décision), tirent également leur révérence.

Considéré comme l'une des voix les plus libérales du Parti, Wang Yang était l'un des favoris comme prochain premier ministre.

Selon des calculs de l'AFP, ce nouveau Comité central est remanié à 65% par rapport à la précédente mouture de 2017.

Ce groupe de 205 personnes dont seulement 11 femmes, une liste longuement égrenée à la télévision d'Etat, doit se réunir dimanche pour la première fois. Il désignera les 25 membres de l'instance de décision du PCC (le Bureau politique) ainsi que son Comité permanent.

Cet organe tout-puissant de sept membres actuellement détient la réalité du pouvoir en Chine.

Couac dans la chorégraphie

Le nouveau Comité permanent, largement remanié, sera composé en «majorité de personnalités loyales à Xi Jinping», subodore Nis Grünberg, de l'Institut Mercator d'études chinoises (Merics) à Berlin.

Nombre de sinologues estiment qu'aucun successeur potentiel ne devrait émerger.

Xi Jinping sera très vraisemblablement reconduit au poste de secrétaire général du PCC. Cette procédure doit permettre à l'homme fort de Pékin de décrocher en mars prochain un troisième mandat présidentiel inédit de cinq ans.

«Ce troisième mandat mettra fin à trois décennies de transition (encadrée) du pouvoir» en Chine, relève Neil Thomas, analyste du cabinet Eurasia Group.

Pour se maintenir au pouvoir, Xi Jinping avait ainsi fait supprimer de la Constitution en 2018 la limite de deux mandats. Agé de 69 ans, il peut donc en théorie présider à vie la République populaire.

Samedi, le Parti communiste a intégré dans sa charte «le rôle central du camarade Xi Jinping», une résolution adoptée à l'unanimité qui semble encore renforcer son pouvoir en interne.

Durant une cérémonie pourtant très chorégraphiée, l'ancien président Hu Jintao, apparu affaibli pendant le congrès, a pour sa part été escorté vers la sortie, ont constaté des journalistes de l'AFP.

Visiblement contre son gré, l'homme de 79 ans, qui a présidé la Chine de 2003 à 2013, a été incité par des employés à se lever de son siège, situé à côté de Xi Jinping.

Après un long silence radio des médias officiels sur cette sortie, l'agence Chine nouvelle a assuré que Hu Jintao «ne se sentait pas bien».

«Hu Jintao avait insisté pour assister à la séance de clôture... malgré le fait qu'il avait dû prendre du temps pour récupérer récemment», a assuré l'agence Chine nouvelle sur Twitter. «Lorsqu'il ne s'est pas senti bien pendant la séance, son équipe, pour sa santé, l'a accompagné dans une salle adjacente pour se reposer. Maintenant, il va beaucoup mieux», ajoute l'agence officielle.

«On ne sait pas encore ce qui a provoqué cela, s'il s'agissait de contrer le pouvoir de Xi ou d'un moment désagréable pour une personne âgée», commente l'analyste Neil Thomas.

«Que ce soit délibéré, ou que (Hu Jintao) ait été souffrant, l'effet est le même. Une humiliation complète pour la dernière génération de dirigeants d'avant Xi», a tweeté Alex White, un analyste britannique ayant vécu en Chine.

Lumière sur Taïwan

Ce congrès, le 20e depuis la création du PCC en 1921, s'est tenu dans un contexte délicat pour la Chine, confrontée à un ralentissement de sa croissance en raison de confinements à répétition et de tensions diplomatiques avec l'Occident.

Depuis une semaine, quelque 2300 délégués choisis par les différentes instances du Parti étaient réunis à huis clos, avec pour mission de remanier l'équipe dirigeante du parti, et donc de la deuxième économie mondiale, et de tracer les futures orientations du pays.

Depuis son arrivée au pouvoir fin 2012, Xi Jinping a accumulé les pouvoirs au sommet de la Chine et présidé à un renforcement de l'autorité du régime.

Chef du Parti, chef des armées, chef de l'Etat... le dirigeant avait plaidé pour la continuité de ses politiques lors d'un discours à l'ouverture du congrès.

La stratégie «zéro Covid» devrait ainsi se poursuivre malgré ses conséquences néfastes sur l'économie et l'exaspération grandissante de la population face aux confinements.

Loin de la diplomatie prudente de ses prédécesseurs, Xi Jinping devrait encore davantage faire entendre la voix de la Chine. Quitte à accroître les tensions avec le grand rival américain, en particulier autour de la question de Taïwan.

Pour la première fois, le PCC a d'ailleurs décidé d'inclure dans sa charte une mention spécifique sur son «opposition» à l'indépendance de l'île de 23 millions d'habitants.

Taipei a appelé samedi Pékin à se défaire de son «ancienne mentalité», après cette décision.

«Nous appelons la nouvelle direction du gouvernement communiste chinois à renoncer à son ancienne mentalité d'invasion et de confrontation et à résoudre les différends par des moyens pacifiques, équitables et réalistes», a affirmé dans un communiqué le Conseil des affaires continentales de Taïwan, l'organisme qui définit la politique du gouvernement taïwanais à l'égard de Pékin.

ATS