Elections régionales de Thuringe Une victoire inédite de l'AfD et des Allemands «très divisés»

ATS

2.9.2024 - 08:05

«C'était écrit qu'on gagnerait!»: Patrick Teichmann a les yeux qui pétillent depuis la victoire inédite de l'AfD aux élections régionales de Thuringe dimanche, une première pour ce parti d'extrême droite en Allemagne.

En remportant environ 33% des suffrages, selon les estimations, la formation anti-migrants et eurosceptique s'est imposée dans ce Land, l'un des moins peuplés d'Allemagne, infligeant un camouflet aux partis établis. (Photo d'archives)
En remportant environ 33% des suffrages, selon les estimations, la formation anti-migrants et eurosceptique s'est imposée dans ce Land, l'un des moins peuplés d'Allemagne, infligeant un camouflet aux partis établis. (Photo d'archives)
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En remportant environ 33% des suffrages, selon les estimations, la formation anti-migrants et eurosceptique s'est imposée dans ce Land, l'un des moins peuplés d'Allemagne, infligeant un camouflet aux partis établis.

Patrick Teichmann arbore fièrement un t-shirt dédicacé de Björn Höcke, figure de proue de l'AfD en Thuringe et chef de la frange la plus radicale du parti. «C'est le seul politique à avoir gardé la raison, et le seul à pouvoir sauver la Thuringe et l'Allemagne toute entière», assure ce cultivateur de légumes de 32 ans.

Outre l'AfD, les électeurs ont aussi apporté 15% des voix à un autre parti très virulent contre l'immigration, fondé avant les élections autour d'une personnalité de la gauche radicale Sahra Wagenknecht. Non loin de la rue où il s'est installé avec quelques amis, les cadres de AfD ont organisé une fête confidentielle pour célébrer leur score historique. A quelques centaines de mètres, une manifestation «anti-fasciste» commence sous haute surveillance policière.

«La population est très divisée [...] nous n'arrivons plus à sensibiliser les gens autant qu'avant», regrette une retraitée de 83 ans, Käthe, une militante associative contre l'extrême droite. Dans la manifestation de quelques centaines de personnes, surtout des jeunes, de nombreuses pancartes exigent l'interdiction de l'AfD et soutiennent les réfugiés.

Le débat sur le contrôle de l'immigration en Allemagne s'est de nouveau embrasé depuis l'attentat meurtrier commis il y a huit jours à Solingen (ouest), pour lequel un Syrien récemment arrivé en Allemagne a été arrêté.

«Besoin de diversité»

Sur l'immigration, «il doit y avoir des changements extrêmes. Ce serait possible avec l'AfD», déclare Jörg, un électeur de l'AfD rencontré plus tôt dans la journée. Cet homme de 54 ans, employé chez un grossiste alimentaire, se dit favorable à davantage d'expulsions de délinquants étrangers.

L'expulsion des étrangers d'Allemagne, par un programme de «remigration», est le pilier du programme de Björn Höcke. La plupart des étrangers «se font passer pour des réfugiés pour profiter du système social allemand», juge Patrick Teichmann.

Les manifestants traversent la ville à la tombée de la nuit, des logements bourgeois de l'élégant centre médiéval d'Erfurt jusqu'aux bâtiments hérités de l'époque communiste. Ina Buschinsky, une sage-femme, confie être «ébranlée» par le verdict des urnes: «J'espérais que mes compatriotes ne voteraient pas pour les fascistes».

«Je ne m'attendais pas à un tel score, j'espérais que les manifestations des derniers jours changeraient un peu les choses», regrette Jonas, kinésithérapeute de 30 ans qui n'a pas souhaité donner son nom. Sur le trajet du cortège, plusieurs passants applaudissent, d'autres désapprouvent en pointant le pouce vers le sol.

Thomas Schmidt, un entrepreneur de 53 ans, s'inquiète du signal envoyé par cette élection dans une région qui attire de nouveau les investissements industriels, notamment dans l'automobile, après les années difficiles de la réunification. «La Thuringe a besoin de diversité, car nous avons besoin de main-d'oeuvre. Et là c'est exactement la voie opposée, dont nous n'avons pas du tout besoin».

ATS