Attaque au couteau Un an après l'attentat, Arras rend hommage à Dominique Bernard

ATS

13.10.2024 - 13:36

Un an jour pour jour après l'assassinat de Dominique Bernard par un ex-élève radicalisé islamiste, Arras rend hommage dimanche à l'enseignant, lors d'une cérémonie mêlant textes, musique et danse. Parmi la foule, figurent ses proches, des rescapés de l'attentat et plusieurs ministres.

Plus de 2000 personnes se sont rassemblées sur la place des Héros d'Arras (Pas-de-Calais), à l'endroit même où plusieurs milliers d'Arrageois affligés s'étaient retrouvés en octobre 2023, deux jours après l'assassinat du professeur (archives).
Plus de 2000 personnes se sont rassemblées sur la place des Héros d'Arras (Pas-de-Calais), à l'endroit même où plusieurs milliers d'Arrageois affligés s'étaient retrouvés en octobre 2023, deux jours après l'assassinat du professeur (archives).
KEYSTONE

La sirène de la ville a retenti à 11h00, l'heure à laquelle Dominique Bernard, 57 ans, a été tué de plusieurs coups de couteau par Mohammed Mogouchkov, Russe originaire d'Ingouchie, alors âgé de 20 ans et fiché pour radicalisation islamiste.

Plus de 2000 personnes se sont rassemblées sur la place des Héros d'Arras (Pas-de-Calais), à l'endroit même où plusieurs milliers d'Arrageois affligés s'étaient retrouvés en octobre 2023, deux jours après l'assassinat du professeur, poignardé à l'entrée de la cité scolaire Gambetta-Carnot où il enseignait.

Une interprétation du quatuor K.285 de Mozart, de la danse contemporaine, des poèmes lus par ses proches, une reprise de «Les enfants paradis» de Damien Saez, hommage aux victimes du Bataclan: la cérémonie a fait la part belle aux arts, laissant peu de place aux discours, comme l'avait voulu son épouse Isabelle Bernard.

«J'atteste qu'il n'y a d'être humain que celui qui combat sans relâche la haine en lui et autour de lui», lit un ami de Dominique Bernard, reprenant un texte du poète marocain Abdellatif Laabi.

Sur scène, une artiste réalise en direct une grande toile représentant une colombe s'envolant au-delà d'une forme bleu-blanc-rouge et des mots «Liberté, égalité, fraternité».

«Plus de discours»

Michel, un retraité arrageois de 77 ans, est venu car il a «des enfants enseignants et des petits-enfants lycéens et collégiens». «Il nous semble important de montrer notre soutien à la fois aux enseignants et à tous ceux qui sont menacés», souligne-t-il, accompagné de sa femme.

Depuis la mort de Dominique Bernard, il se dit «toujours inquiet» pour ses enfants, «mais il faut rester confiant en la République».

Venu en touriste de région parisienne, Philippe, retraité de 65 ans, souligne qu'"un peu de musique, un peu de danse, un peu de beauté dans cette période troublée, c'est toujours important» pour répondre à cette «atteinte à la République et à la laïcité».

«Il y a un an, la ville d'Arras basculait dans l'horreur», et «un an plus tard, nous sommes ensemble, toujours debout», a déclaré à la tribune le maire centriste de la ville Frédéric Leturque, ajoutant avoir «une pensée» pour Samuel Paty, enseignant également victime d'un attentat djihadiste il y a bientôt quatre ans.

Le maire est le seul à avoir pris la parole, malgré la présence de plusieurs membres du gouvernement, dont les ministres de la Justice Didier Migaud, de l'Intérieur Bruno Retailleau et de l'Education nationale Anne Genetet.

La ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher, élue dans le Pas-de-Calais, l'ancien Premier ministre Gabriel Attal, le président de région Hauts-de-France Xavier Bertrand (LR) ou encore le député du Nord Ugo Bernalicis (LFI) étaient également dans les premiers rangs.

«Je ne veux plus de discours. A quoi bon? Tout a été dit», a expliqué Isabelle Bernard dans un entretien au Monde. «Il est hors de question» qu'il y ait une récupération politique, a-t-elle dit à La Voix du Nord, dans une autre interview également parue samedi.

«Quelle plus belle réponse que des musiciens, des comédiens, des danseurs», continue-t-elle dans La Voix du Nord, en soulignant que les autres victimes du 13 octobre 2023 «ont aussi participé, par leurs idées, à construire cet hommage». Un autre professeur et deux agents de la cité scolaire avaient été blessés dans l'attaque.

«Amoureux de la littérature»

Dominique Bernard avait enseigné pendant 25 ans au sein de l'établissement où il a trouvé la mort. «Amoureux de la littérature, il aimait transmettre cet amour à ses élèves», se souvient sa soeur Emmanuelle Delatte dans un entretien à l'hebdomadaire chrétien Le Pèlerin, paru mercredi.

Une minute de silence sera observée lundi dans les collèges et lycées de France en hommage à Dominique Bernard et Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie également assassiné par un jeune islamiste radicalisé le 16 octobre 2020, à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines).

Lorsqu'ils avaient appris l'assassinat de Samuel Paty, Isabelle Bernard se souvient que son mari et elle-même avaient pris «conscience de (leur) vulnérabilité». «Qui sera le prochain? Parce qu'il y en aura un», lui avait-elle dit.

ATS