Politique commerciale Les firmes suisses qui échapperaient aux taxes douanières de Trump

Une centaine d'entreprises suisses cotées en Bourse sont présentes sur sol américain. Les plus grandes d'entre elles produisent et vendent localement et seraient peu impactées par le relèvement des taxes douanières dont le futur président américain Donald Trump, qui sera investi le 20 janvier, menace les importations européennes.

Si l'idée d'un «mur douanier» protégeant l'économie américaine était mise en oeuvre, les relations commerciales entre la Suisse et les Etats-Unis en souffriraient peu, à moins que les tensions géopolitiques ne conduisent à une récession mondiale, estime un rapport d'UBS publié à l'automne dernier. De plus, un relèvement des taxes douanières n'aurait même aucune influence sur les activités des grandes entreprises helvétiques de part leur implantation sur le territoire américain.

«95% de ce que nous vendons aux Etats-Unis est produit aux Etats-Unis», explique à l'agence AWP une porte-parole de Nestlé. Les ventes totales de la zone Amérique du Nord, qui comprend les Etats-Unis et le Canada, s'élevaient pour le géant veveysan de l'alimentation à 26 milliards de francs en 2023, en recul de 1,3% sur un an.

Même son de cloche du côté de Sika, qui exploite 50 usines outre-Atlantique. «L'influence est nulle, puisque nous produisons localement tout ce que nous vendons aux Etats-Unis», indique un porte-parole du chimiste de la construction. Le groupe zougois réalise dans ce pays s environ 2,3 milliards de chiffre d'affaires annuel.

Emmi est également ancré de longue date sur la place économique américaine avec ses propres sites de production. «La majeure partie de nos spécialités fromagères est produite localement aux Etats-Unis et nous en exportons également une partie depuis la Suisse. Aujourd'hui, la situation douanière n'a pas changé», commente une porte-parole.

Le fabricant de produits laitiers lucernois attend de voir si de futures décisions politiques auront une influence sur les relations commerciales entre les Etats-Unis et la Suisse. Dans la division Amériques, qui comprend notamment les Etats-Unis, Emmi a réalisé en 2023 un chiffre d'affaires de 1,7 milliard de francs.

ABB connaît une situation similaire. «Parmi les produits vendus par notre groupe aux Etats-Unis, 75% sont fabriqués localement», explique un porte-parole de l'entreprise zurichoise spécialisée dans les technologies de l'énergie et de l'automation. ABB a engrangé outre-Atlantique des recettes de 8,25 milliards de francs en 2023.

La pharma plus durement impactée

En revanche, la pharma devrait ressentir plus durement une hausse des taxes douanières américaines. D'après le rapport d'UBS, c'est le commerce des médicaments qui présente une dépendance importante à la politique américaine, la Suisse expédiant plus de 25% de ses exportations pharmaceutiques vers la première économie mondiale.

A ce stade, le sous-traitant pharmaceutique Lonza ainsi que les deux laboratoires Novartis et Roche ne veulent faire aucun commentaire. «Nos filiales outre-Atlantique continueront de collaborer avec la nouvelle administration américaine», déclare une porte-parole de Roche.

Le groupe pharmaceutique bâlois a réalisé un chiffre d'affaires de 18,16 milliards de francs au pays de la bannière étoilée de janvier à septembre 2024, en hausse de 4,2% par rapport à la même période de l'année précédente. Chez son concurrent rhénan, les ventes dans ce pays s'inscrivent à 5,4 milliards au troisième trimestre de l'an dernier, en progression sur un an de 16,4%.

Plus de 500 entreprises suisses sont actives aux Etats-Unis, selon Rahul Sahgal, directeur de la Chambre de commerce Suisse-Etats-Unis. Nombre d'entre elles ont plusieurs filiales dans différents Etats, soit plus de 4000 au total. «Si l'industrie pharmaceutique serait principalement touchée, les fabricants de machines, d'appareils, d'instruments de précision, de montres et de produits alimentaires, par exemple, souffriraient aussi nettement d'une hausse des taxes douanières», relève M. Sahgal.

Les Etats-Unis sont devenus en 2021 le premier partenaire commercial de notre pays, devant l'Allemagne. En 2023, la Suisse a exporté des marchandises vers le pays de l'Oncle Sam pour une valeur de 56,6 milliards de francs.