Zeidler Zeidler: "On a poussé les principes du football à l'extrême"

ATS

4.8.2020

La Super League avait besoin d'idées. Deuxième surprise mais convaincant de cette saison, le Saint-Gall de Peter Zeidler a démontré qu'il était possible de réussir à se faire une place malgré des moyens réduits.

Peter Zeidler: "Dans certains domaines, nous sommes allés plus loin que les autres."
Peter Zeidler: "Dans certains domaines, nous sommes allés plus loin que les autres."
Keystone

«Les gens ne vont pas oublier cette petite équipe de Saint-Gall, je pense qu'on a un peu marqué cette saison.» Jérémy Guillemenot vise juste. Le Genevois de 22 ans a, avec tant d'autres, incarné cette légère insolence, à l'image du seul but inscrit par les Brodeurs au Wankdorf lundi (une frappe lointaine qui a lobé Wölfli). Cette «petite équipe» a surtout osé regarder les plus imposantes dans le blanc des yeux. Le football suisse en est sûrement sorti grandi.

Car en douze mois et demi de Super League, il y eut le temps de réfléchir aux réussites saint-galloises. Le temps aussi de constater que l'accomplissement des Brodeurs est surtout tactique. Ce n'est pas un gros mot de l'affirmer, mais c'est rendre honneur au travail de Peter Zeidler. L'homme est au moins aussi ouvert que l'entraîneur est inflexible. Ses principes sont ce qu'ils sont: du football, mais à haute intensité, s'il vous plaît. Avec Zeidler, il faut courir. Beaucoup. Intelligemment, surtout.

«Je crois qu'on a poussé les principes à l'extrême parfois, souligne-t-il. Dans certains domaines, nous sommes allés plus loin que les autres. Nous avons été capables de jouer très haut, de défendre en avançant, avec des attaquants qui se cherchaient. Nous avons attaqué presque avec cinq attaquants, en comptant les deux 8 (Ruiz et Görtler). Si ces cinq-là étaient en forme, prêts à être réactifs à la perte de la balle, cela pouvait marcher.»

Un football moderne

Son Saint-Gall a fait presque figure d'ovni. C'est avoir une vision restrictive, peu flatteuse. Parce que les codes que Zeidler a reproduits sont ceux du football moderne, celui qui fonctionne aujourd'hui. Le «Gegenpressing» est devenu le terme à la mode. Ce n'est pas un hasard de constater que l'Allemand a été très proche de ses instigateurs, en étant par exemple l'adjoint de Ralf Rangnick à Hoffenheim il y a près d'une décennie. Ou en travaillant au sein du club de Salzbourg et de ses taureaux ailés, une écurie qui a fait de ce football une identité.

Alors qui voulait jouer pour Saint-Gall cette saison avait intérêt à réagir au quart de tour à chaque perte de balle. «Lorsqu'on cherche de nouveaux joueurs, dans les discussions que l'on a avec eux, on essaie de sentir s'ils sont prêts à faire les efforts pour jouer pour l'équipe, à se connecter tout le temps avec elle.» On parle là de quatre ou cinq secondes de sprint. C'est peu et beaucoup à la fois, car le caractère répétitif fait office de critère de sélection parmi les joueurs. Mais quand cela est bien réalisé, l'efficacité est assurée. La recette a fonctionné, car elle s'accompagnait d'une prise de risque.

Les statistiques ont révélé l'ambivalence de l'approche. On peut à la fois être l'équipe du championnat à perdre le plus souvent la balle et celle qui tire le plus. Saint-Gall n'a jamais vraiment voulu de la possession, mais il voulait surtout la récupérer le plus vite possible. Pour accepter de la perdre à nouveau. Plus d'un adversaire a été pris dans le cercle vicieux.

Et l'année prochaine?

Certains, comme YB, ont fini par trouver la réponse. Par des plans bien échafaudés. Par plus de fraîcheur physique aussi, Zeidler ayant très peu fait tourner son onze de base. Aussi par expérience, car la jeunesse saint-galloise est également ce qui a fait son authenticité. L'entraîneur allemand n'a pas hésité à lancer des inconnus, à faire confiance à des gamins qui, ailleurs, auraient patienté des semaines avant d'avoir leur chance. Zeidler, qui aura 58 ans samedi, a cette insouciance de faire confiance à l'insouciance de la jeunesse.

Le feeling se veut très humain. L'ancien prof de français aime louer l'enthousiasme de son équipe. Il y associe le spectacle de son jeu et la complicité de ses joueurs en dehors du terrain. Il y a un côté préoccupant: Ermedin Demirovic (à Freiburg) et Cedric Itten (destination encore inconnue) vont partir. Ce sont les deux buteurs (33 buts ensemble, et pas mal de passes décisives), les deux principaux finisseurs, les deux premiers chasseurs aussi.

Comment infirmer l'hypothèse du feu de paille en vue de la saison prochaine? «Excepté eux, la colonne vertébrale de l'équipe devrait rester, note Zeidler. Alors je crois qu'on peut trouver de nouveaux joueurs pour les remplacer.» Le système pourra évoluer, pourquoi pas. Mais pas les principes.

Le recrutement se fait aussi là-dessus: «Le plus important, c'est de trouver des joueurs avec ces qualités de courses et d'estimer leur capacité à s'imprégner de nos idées. On n'en est jamais sûr. Mais pour progresser, il faut que l'équipe soit convaincue de la façon dont on joue. Cela ne garantit pas le succès, mais le travail est plus facile.» Le discours fait connaître l'homme. Son football aussi.

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