Becky Sauerbrunn «Les joueuses sont horrifiées et avaient le coeur brisé»

AFP

5.10.2022

La capitaine de l'équipe des Etats-Unis, Becky Sauerbrunn, a estimé mardi que les propriétaires d'équipes et autres responsables pointés pour leur passivité dans l'enquête sur la pratique systémique d'abus et d'agressions sexuels dans le football féminin américain, devaient être bannis.

Becky Sauerbrunn a pris la parole suite à l’enquête sur les abus dans le football féminin US.
Becky Sauerbrunn a pris la parole suite à l’enquête sur les abus dans le football féminin US.
KEYSTONE

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La double championne du monde, âgée de 37 ans, participait à une vidéoconférence de Londres, où la sélection américaine doit affronter l'Angleterre en amical vendredi. Les joueuses sont «horrifiées et avaient le coeur brisé», a-t-elle souligné, au lendemain de la publication des conclusions de l'enquête indépendante menée par l'ancienne procureure générale des États-Unis, Sally Yates.

Ce rapport de 172 pages comprend des entretiens avec plus de 200 joueuses de la Ligue nord-américaine (NWSL) et décrit en détail les abus commis par plusieurs entraîneurs, la manipulation, les brimades et les représailles exercées à l'encontre de joueuses. Des faits qui incluent «des commentaires à connotation sexuelle, des avances, des attouchements non désirés et des rapports sexuels forcés» au sein du championnat professionnel et même au-delà, dans des structures dédiées aux jeunes.

«Chaque propriétaire, dirigeant, responsable du football féminin américain, qui a manqué à ses obligations envers les joueuses, qui ne les pas protégées, qui s'est caché derrière des considérations juridiques et n'a pas participé pleinement à ces enquêtes devrait être renvoyé», a estimé Sauerbrunn.

«Tous»

Merritt Paulson, propriétaire du club de Sauerbrunn, les Portland Thorns, est accusé dans le rapport Yates, avec d'autres responsables du club, d'avoir fermé les yeux sur des abus commis par Paul Riley l'ancien entraîneur de l'équipe.

Lorsqu'on a insisté en lui demandant si Paulson fait partie des propriétaires qui, selon elle, devraient être banni de la NSWL, Sauerbrunn a répondu: «Cela inclut tous ceux qui ont continué à décevoir les joueuses à maintes reprises, qui n'ont pas pris leurs préoccupations au sérieux, qui n'ont pas transmis les informations correctement, qui n'ont pas participé aux enquêtes. Tous».

Paulson, qui est également le propriétaire des Portland Timbers, franchise de la ligue masculine (MLS), a annoncé mardi qu'il se retirait de la direction des Thorns jusqu'à la conclusion d'une enquête distincte menée par la NWSL, conjointement avec le syndicat des joueuses.

Il a été rejoint par un autre propriétaire de club, celui des Chicago Red Stars, Arnim Whisler, qui a aussi annoncé sa mise en retrait.

«Je suis profondément désolé de ce que nos joueuses ont pu endurer durant le temps passé à Chicago», a déclaré ce membre du bureau de la NWSL. «Notre organisation est déterminée à rebâtir la confiance et le respect (...) et je reconnais que ma présence actuellement est source de confusion», a-t-il ajouté.

«Période difficile»

Durant la vidéo-conférence, Sauerbrunn a insisté sur la «frustration» de ses coéquipières et d'elle-même. «Nous sommes épuisés et nous sommes vraiment, vraiment en colère. Parce qu'il a fallu l'enquête d'une tierce partie, parce qu'il a fallu des articles dans The Athletic et le Washington Post (qui ont révélé l'affaire, ndlr), parce qu'il a fallu que plus de 200 personnes partagent leur traumatisme», a-t-elle regretté.

Le sélectionneur Vlatko Andonovski a pour sa part indiqué vouloir laisser le choix aux joueuses «de ne pas jouer» de vendredi, si elles ne s'en sentent pas capables mentalement. «Certaines ont besoin de temps pour réfléchir à tout cela. C'est pourquoi, nous leur permettons de faire ce dont elles ont besoin, pour surmonter cette période difficile.»

Enfin, Sauerbrunn a assuré n'avoir pas songer à faire grève, pour forcer le changement au sein de la NWSL.

«Je n'y ai pas pensé. J'espère que nous n'en arriverons pas là. Beaucoup d'entre nous ont navigué dans ces eaux pendant très longtemps (...). On finit par trouver un moyen de faire face. En tant que femmes, joueuses, nous avons dû faire face à beaucoup de choses pendant très longtemps. Malheureusement, je dirais qu'on s'y habitue.»