Personne ne l'a vu venir. Buteur et passeur lors du 3-1 contre la Hongrie samedi à Cologne à l'Euro, Michel Aebischer cultive une certaine discrétion qui peut trancher avec le bling-bling véhiculé par bien d'autres.
«Je sais ce que je peux apporter à l'équipe. Mes entraîneurs le savent aussi. Le reste m'importe peu», explique celui qui n'était, sur le papier, que la cinquième roue du char en ligne médiane derrière Granit Xhaka, Remo Freuler, Denis Zakaria et Vincent Sierro. Mais c'était sans compter le choix de Murat Yakin de le titulariser sur le flanc gauche avec comme mission de se recentrer en phase offensive.
«Au coach de décider»
«Dans le même temps, Rodriguez a glissé sur la gauche et Widmer a un peu reculé sur le flanc droit pour revenir sur quelques phases à une défense à quatre, précise le joueur de Bologne, présent devant la presse lundi. Cette flexibilité a, je crois, beaucoup gêné les Hongrois.»
Michel Aebischer ne sait pas si ce schéma qui privilégie la supériorité numérique au cœur du jeu sera reconduit mercredi contre l'Ecosse. «Les Ecossais sont sans doute en train d'analyser notre match de samedi pour trouver la parade, poursuit-il. J'ignore, par ailleurs, les intentions de notre entraîneur. Nous n'avons pas encore parlé du match de mercredi. J'espère bien sûr jouer à nouveau. Mais c'est au coach de décider.» De jouer plutôt pour mieux coller à la philosophie de Murat Yakin.
Sélectionné pour la première fois le 18 novembre 2019 lors de la rencontre gagnée 6-1 à Gibraltar où il avait relayé Ruben Vargas à la 85e minute, Michel Aebischer aura dû attendre son 21e match avec l'équipe de Suisse pour marquer enfin les esprits. «Il y a de si bons joueurs pour occuper les places en ligne médiane dans cette équipe de Suisse, sourit Michel Aebischer. Le fait de ne pas jouer ne me gêne pas. Être convoqué en équipe de Suisse est un immense honneur. Si je suis sur le banc, je peux vous assurer que je suis le plus grand fan de l'équipe.»
Mais comme Thiago Motta à Bologne, Murat Yakin se rend compte gentiment que se priver encore longtemps d'un joueur au sens tactique aussi affiné serait une aberration.
«Notre équipe peut aller loin»
Celui qui «n'a plus pensé à rien lorsque le ballon a fini dans les filets hongrois pour le 2-0» garde les pieds sur terre. «Dans nos têtes, le match contre la Hongrie ne compte plus, lâche-t-il. Mercredi contre l'Ecosse, les compteurs seront remis à zéro. Les Ecossais vont réagir après la claque reçue contre l'Allemagne. C'est certain, affirme-t-il. Nous ne les sous-estimerons pas. Cette équipe sera dangereuse...»
A la Suisse de gagner comme samedi la bataille du milieu pour s'emparer du contrôle de la partie. «Même si nous ne devons pas nous projeter au-delà du match de mercredi, j'ai le sentiment que notre équipe peut aller loin dans ce tournoi», ajoute-t-il presque en s'excusant d'une telle audace.
A 27 ans, Michel Aebischer s'avance comme le porte-drapeau d'un football fribourgeois toujours en grande souffrance. «C'est vrai que le foot à Fribourg n'est pas vraiment au... top, glisse-t-il. Mais si mon parcours peut inspirer les jeunes, j'en serai très heureux.» Ce parcours qui l'a mené du FC Heitenried à Bologne en passant par le FC Fribourg et les Young Boys est exemplaire. Loin de tout bling-bling, il l'a conduit là où il voulait aller.