Bernard Challandes «Je vois un architecte en Inzaghi et plus du de Vinci en Guardiola»

Nicolas Larchevêque, à Istanbul

10.6.2023

La finale de la Ligue des champions mettra aux prises samedi deux équipes au style de jeu bien différent : d’un côté un Manchester City qui aime dominer, de l’autre un Inter Milan solide en défense qui procède en contre. Présent à Istanbul, Bernard Challandes décrypte les clés de ce «match d’échecs» entre deux entraîneurs à la philosophie bien distincte.

Simone Inzaghi et Pep Guardiola : deux entraîneurs au style de jeu et à la philosophie différents.
Simone Inzaghi et Pep Guardiola : deux entraîneurs au style de jeu et à la philosophie différents.
Keystone

Nicolas Larchevêque, à Istanbul

10.6.2023

«Ce match sera peut-être fermé, mais loin d’être ennuyeux.» Alors que beaucoup s’attendent à une nouvelle finale de C1 peu spectaculaire, Bernard Challandes préfère s’attarder sur le duel tactique qui sera offert par Pep Guardiola et Simone Inzaghi.

«Dans cette finale, Manchester City va dominer. Ils veulent la possession et jouer avec le ballon. Ils ne vont pas attendre que l’Inter sorte pour jouer en contre. C’est une constance dans le jeu que l’équipe de Guardiola ne sait pas faire, ou très rarement. Elle commence à opérer de la sorte grâce à Haaland. Ils ne l’ont pas choisi uniquement parce que c’est un buteur, ça va au-delà de cela. C’est un joueur qui permet l’appui et plus de ballon dans les 16 mètres adverses», relève le Neuchâtelois.

Avant de poursuivre : «De l’autre côté, l’Inter est une équipe de contre. C’est une équipe qui est préparée pour défendre et être compacte. Mais elle n’est pas seulement défensive. Les joueurs vont presser haut par séquence et c’est très bien organisé.»

Les Citizens devront donc trouver les solutions pour parvenir à percer le coffre intériste. «Ce qui sera intéressant de voir est comment Guardiola va procéder pour faire sortir les trois défenseurs centraux de leur position (à savoir Alessandro Bastoni, Francesco Acerbi et Matteo Darmian). Ce sont des joueurs qui adorent le contact, le un contre un», détaille Challandes.

Mais avec son jeu tourné vers l’offensive, la formation anglaise prend des risques et s’expose plus facilement aux contre-attaques des Italiens, qui parviennent à se tourner rapidement vers l’avant en nombre. Pour Challandes, elle a toutefois fait des progrès dans ce secteur.

«Il y a une nouvelle évolution de Guardiola et de City : ils défendent quand même mieux ensemble, avec plus de joueurs. Ils se font prendre en contre moins souvent. Ils ont été dominés en demi-finale contre le Real Madrid. C’est une des premières fois que cela arrive. C’est très rare, mais désormais, ils l’acceptent», rappelle l’ancien technicien de Sion, Xamax, Yverdon ou en encore Zurich.

«La patience de City nous énerve au bout d’un moment»

Bernard Challandes

Consultant blue Sport

Ce dernier reconnaît néanmoins que cette partie d’échecs n’est pas forcément des plus passionnantes pour l’amateur de football lambda. «Le seul risque de ce match est que City a de la patience. Mais cette patience nous énerve au bout d’un moment. Guardiola ne veut pas que ces joueurs perdent le ballon inutilement. Il faut donc encore patienter, encore revenir en arrière, encore aller de l’autre côté et encore revenir pour trouver enfin l’espace», explique l’ex-sélectionneur de l’Arménie et du Kosovo.

Avant d’étayer ses propos : «Si l’Inter, qui défend très bien, bouche correctement les zones, ça risque d’être peut-être ennuyeux pour le simple quidam qui aimerait du spectacle. Ça risque d’être un match d’échecs. Le jeu de City est de placer ses pions, tout en ayant en tête les cinq coups suivants. Le très bon joueur d’échecs ne déplace pas un pion pour simplement le déplacer.»

En résumé, Bernard Challandes a impatience d’assister à cet affrontement entre deux fins tacticiens. «Je vois davantage en Simone Inzaghi un architecte qui planifie et dont tout doit bien fonctionner. Et du côté de Pep Guardiola, il y a cette forme de créativité, de surprise. C’est plus du Léonard de Vinci : autant, c’est précis, mais autant il y a de la folie à certains moments. C’est l’opposition de deux styles ainsi que de deux philosophies un peu différentes. C’est cela qui va être intéressant à suivre.»