«Stade de Farce», «soirée de chaos»: sans éclipser le 14e sacre européen du Real Madrid, la presse européenne a des mots très durs dimanche sur l'organisation de la finale de la Ligue des Champions marquée samedi par des incidents en dehors du Stade de France.
Plus que sur la défaite de Liverpool (1-0), les médias britanniques insistent logiquement sur les graves défaillances constatées en marge de la rencontre en raison des difficultés d'accès à l'enceinte de Saint-Denis, qui ont retardé le coup d'envoi du match de plus de 30 minutes et provoqué des tensions à l'extérieur.
Le tabloïd The Sun est le plus virulent avec un titre en français ("Stade de Farce") et le témoignage de Marvin Matip, le frère du défenseur des Reds Joel Matip, qui a raconté avoir dû se réfugier dans un restaurant avec sa femme enceinte pour échapper aux lacrymogènes dispersés dans leur direction.
Le Telegraph publie de son côté le récit accablant de Jason Burt, le chef de la rubrique football du journal. «J'étais devant la porte Y quand j'ai été pris dans les gaz lacrymogènes utilisés sans discernement par la police anti-émeute française au Stade de France. Je parlais à des supporters qui attendaient tranquillement, certains depuis trois heures, quand ils ont atteint mon visage, me piquant les yeux, mes lèvres et ma langue. J'ai vu qu'on en dispersait. Je n'arrivais pas à y croire (...) c'était absolument honteux», a-t-il raconté dans un billet.
«Ils doivent s'excuser»
Soulignant les «goulots d'étranglement» vers lesquels étaient dirigés les supporters des Reds pourtant arrivés deux heures et demi avant le coup d'envoi et les contrôles «insupportablement lents», Burt estime que «c'est une honte que l'UEFA ait accusé les supporters d'être arrivés tardivement. C'est tout simplement faux. Ils ont essayé de lancer leur version. Maintenant, ils doivent s'excuser».
Du côté espagnol, l'accent est surtout mis sur le 14e titre continental du Real Madrid. Le quotidien sportif Marca a ainsi rebaptisé ce sacre la «Decimocurtua», un jeu de mot entre le nom de l'infranchissable gardien belge Thibaut Courtois et le chiffre quatorze.
«Avec neuf arrêts, Courtois a été le héros indiscutable de la finale», a souligné le journal le plus vendu d'Espagne dimanche à sa une.
Le gardien belge est partout, sur toutes les unes de la presse sportive espagnole, ce dimanche. «Courtois offre la Ligue des Champions» au Real, s'est aligné le quotidien sportif catalan Mundo Deportivo, avec une grande photo du géant belge tenant la «Coupe aux grandes oreilles» à sa une.
Mais les incidents de la soirée tiennent également une large place dans les journaux ibériques.
«Hordes de barbares»
Alfredo Relano, président d'honneur du quotidien sportif As et voix respectée du football espagnol, se montre très sévère dans un éditorial, dénonçant Liverpool et «ses hordes de barbares sans ticket d'entrée» qui «ont créé un scandale sans nom aux portes du stade, qui aurait bien pu provoquer une catastrophe, même si tout est heureusement rentré dans l'ordre avec le retard du coup d'envoi.»
«Ces faits ne peuvent par rester impunis», a-t-il ajouté.
«Une honte: la finale a débuté avec une demi-heure de retard à cause du chaos aux accès du stade», a affiché le quotidien catalan Sport en bandeau de sa une, dimanche.
Les médias allemands s'interrogent aussi sur des défauts d'organisation de l'UEFA. «La soirée du chaos», écrit Bild, pour qui, sur le plan sportif, il s'agit de «la défaite la plus amère de Klopp», l'entraîneur allemand de Liverpool.
En Italie, la presse salue sans surprise la 4e C1 de «l'empereur» Carlo Ancelotti (Corriere dello Sport).
«Encore un match parfait, pour les choix, la gestion et la préparation. Il est le premier à arriver à quatre Ligue des champions. Une saison énorme, une fierté italienne, merci Carlo!», souligne la Gazzetta dello sport.
Le Corriere dello Sport revient comme toute la presse italienne sur le «flop de l'organisation» parisienne.
«Une mauvaise soirée en conclusion d'une triste saison pour la France, où se sont multipliés dans les stades les problèmes de sécurité et d'ordre public», écrit le journal romain.
Soixante-huit personnes ont été interpellées
Soixante-huit personnes ont été interpellées et 39 placées en garde à vue samedi soir à Paris lors de la soirée de finale de Ligue des champions. Celle-ci a été émaillée d'incidents autour de l'accès au Stade de France.
De nombreux supporteurs avaient tenté d'escalader les grilles de l'enceinte pour tenter de forcer l'entrée. De brèves échauffourées ont alors opposé les forces de l'ordre qui repoussaient ces intrus, parfois en faisant usage de gaz lacrymogènes.
Plus de places pour les spectateurs payants
Certains spectateurs, pourtant munis de billets, n'ont pu accéder au stade qu'en fin de première période du match.
La préfecture de police de Paris a indiqué dans un communiqué publié samedi soir qu'avant la rencontre «de nombreux supporters sans billets pour le match ou détenteurs de faux billets ont perturbé l'accès au Stade de France, au niveau du périmètre de sécurité extérieur».
Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a lui, dans un tweet, pointé du doigt l'attitude «des milliers de 'supporters' britanniques sans billet ou avec des faux billets qui ont forcé les entrées» du Stade de France.
Mais l'évacuation des deux «fan zones» distinctes – pour les supporters du Real Madrid à Saint-Denis et pour ceux de Liverpool dans l'est de Paris – s'est déroulée sans incidents majeurs, a ajouté sur Twitter la préfecture, évoquant pour ces rassemblements une «bonne physionomie» générale de la soirée.