Elections américaines Je ne parle pas de politique avec mes nouveaux voisins

De René Sollberger, Las Vegas

28.10.2020

J’ai emménagé il y a quelques semaines et je fais peu à peu connaissance avec mes nouveaux voisins. La prudence est de mise dans cette campagne électorale américaine – surtout lorsque l’on n’appartient pas au même camp politique.

Il y a des signes extérieurs qui reflètent nos convictions. Aux Etats-Unis, certains se parent délibérément de signes extérieurs pour montrer leurs opinions politiques au monde qui les entoure. Comme par exemple un drapeau américain sur leur maison ou un autocollant sur leur voiture. Mais que veut dire un panier de basket-ball devant un garage?

Il y a quelques semaines, j’ai quitté la région de San Francisco pour Las Vegas, la Californie pour le Nevada. Je dois encore faire preuve de beaucoup de retenue avec mes nouveaux voisins. Je ne sais pas encore tout à fait qui est dans quel camp.

L’ennui politique en Californie

La Californie a toujours été un Etat fermement démocrate et dans mon district, il y a quatre ans, 85% des gens ont voté pour Hillary Clinton et contre Donald Trump. Et puisque le système électoral de chaque Etat américain suit le principe appelé «the winner takes it all», toutes les voix des grands électeurs en Californie sont toujours allées dans le camp bleu, c’est-à-dire chez les démocrates.

En d’autres termes, si l’on vote en Californie, autant rester chez soi, puisque rien ne changera. Le candidat démocrate Joe Biden remportera l’ensemble des voix des 55 grands électeurs de l’Etat. Comme la Californie est l’Etat le plus peuplé, aucun autre n’en attribue autant.

Focus sur les élections américaines de 2020

Les Américains se rendent aux urnes: «blue News» suit la phase critique du duel pour la Maison-Blanche, non seulement depuis la Suisse, mais également à travers des reportages de journalistes suisses vivant aux Etats-Unis. Donald Trump ou Joe Biden? Le scrutin est prévu le 3 novembre.

Les choses sont très différentes dans le Nevada. Ici, chaque voix compte. Cependant, l’Etat ne dispose que de six grands électeurs, soit six voix. Autrefois plutôt rouge, c’est-à-dire républicain, le Nevada se transforme lentement mais sûrement en un territoire bleu, c’est-à-dire démocrate. Cela s’explique par l’évolution démographique observée dans la ville désertique de Las Vegas. C’est l’une des métropoles qui se développe le plus rapidement aux États-Unis et beaucoup de nouveaux arrivants votent démocrate.

Ce sont pour la plupart des jeunes, souvent des Latinos. Ainsi, depuis 2019, les deux élus qui représentent l’Etat au sein de la chambre haute, c’est-à-dire au Sénat, proviennent du Parti démocrate. Et ce sont deux femmes.

En 2019 également, un gouverneur démocrate est entré en fonction pour la première fois. Et lors des dernières élections il y a quatre ans, Hillary Clinton a battu Donald Trump avec deux bons points de pourcentage d’avance. Le Nevada n’est donc plus conservateur.



Muscle cars et drapeaux américains

Un de mes voisins d’en face conduit une Chevy Camaro noire surbaissée et tunée, avec un aileron et un pot d’échappement très bruyant, une véritable muscle car. Ou est-ce une Ford Mustang? Non, c’est une Dodge Charger.

Au coin de la rue vit un homme dont la maison est presque constamment parée d’un drapeau américain suspendu à côté de l’entrée. A droite, il y a un jeune couple avec un bébé – ils viennent du nord-est des Etats-Unis, une région libérale. Et à gauche de ma maison vit un couple gay, deux hommes super gentils qui ont souvent de la visite. En fait, ils sont tous très gentils. Mais quel est leur positionnement politique?

Les signes extérieurs laissent imaginer qui se range dans quel camp. Le bolide noir et le drapeau sont typiques des partisans du camp conservateur, alors que le nord-est des Etats-Unis et le couple gay renvoient plutôt à des partisans du camp libéral. Mais on ne peut pas en être absolument certain.

On parle donc de choses et d’autres, des origines et du métier de chacun, du caractère du chien, de la chaleur estivale – mais pas de politique, tant qu’on n’est pas parfaitement certain de se comprendre parce qu’on est du même côté, dans le même camp.

C’est dommage. Parce que tout le monde attend des 435 membres de la Chambre des représentants et des 100 sénateurs de chaque camp qu’ils se parlent, qu’ils construisent des ponts, qu’ils comblent les fossés afin de trouver de bons compromis.


René Sollberger vit aux Etats-Unis depuis 2013. Après avoir passé tout d’abord deux ans à Boston puis cinq ans à San Francisco, il s’est installé à Las Vegas en 2020. Marié à une Américaine, il travaille comme journaliste spécialisé dans l’économie et la politique. Il a travaillé par le passé pour «Cash», la «Berner Zeitung» et la «Handelszeitung», entre autres publications.

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